ALGER: La marche hebdomadaire du mouvement antirégime du Hirak a été à nouveau neutralisée vendredi à Alger par un impressionnant dispositif policier déployé dans la capitale, a constaté un journaliste.
Depuis le matin, policiers en uniforme ou en civil, avaient littéralement envahi les endroits névralgiques de la ville, bloquant les grandes artères et encerclant les mosquées d'où partent habituellement les cortèges de manifestants.
Des policiers en civil procédaient à des contrôles d'identité des passants.
« Rues et ruelles coupées avec des véhicules de police, policiers en tenues ou en civil avec des brassards aux alentours de Bab El Oued », quartier populaire et bastion du Hirak, a témoigné Lyes, qui n'a pas voulu donner son nom de famille.
« Pour ce 118e vendredi, ‘Alger la Blanche’ (le surnom de la capitale) est devenue bleu police », a ironisé ce quadragénaire. 118 marquant le nombre de semaines écoulées depuis la naissance du Hirak le 22 février 2019.
A la sortie de la mosquée Errahma, dans le centre-ville, les fidèles ont été incités à rejoindre en ordre leurs domiciles.
A la fin de la prière du vendredi, une centaine de personnes ont brièvement manifesté devant la plage Rmila de Bab El Oued, profitant pendant quelques instants de l'absence de policiers qui n'ont pas tardé à les pourchasser, selon le journaliste.
Reporters et photographes indépendants sont privés d'accréditation et ne peuvent pas couvrir normalement les marches du Hirak.
Ce bouclage d'Alger survient au lendemain de l'ouverture de la campagne pour les législatives du 12 juin.
Malgré deux échecs cinglants --la présidentielle de 2019 et le référendum constitutionnel de 2020, marqués par une abstention record--, le régime, appuyé par l'armée, est déterminé à imposer sa « feuille de route » électorale en dépit de son rejet par le Hirak et par l'opposition laïque et de gauche.
Pour ce faire, le ministère de l'Intérieur a décidé d'obliger les organisateurs des marches du Hirak --mouvement pacifique et sans véritable leadership-- à « déclarer » au préalable les manifestations auprès des autorités, ce qui revient de facto à les interdire.
Le Comité national pour la libération des détenus (CNLD) a fait état de nombreuses interpellations ce vendredi à Alger et dans d'autres villes du pays.
La plupart des personnes interpellées recouvrent généralement la liberté en fin de journée en attendant d'être convoquées devant la justice.
Au moins 127 personnes sont actuellement incarcérées pour des faits en lien avec le Hirak et/ou les libertés individuelles, selon le CNLD.