ROME: L'Union européenne est en discussion avec la Tunisie pour un accord qui proposerait à ce pays de l'aide économique en échange d'un effort accru de sa part pour empêcher les migrants d'arriver en Europe, a annoncé jeudi un haut responsable européen.
La commissaire européenne pour les affaires intérieures, Ylva Johansson, a déclaré au journal italien La Repubblica que des discussions similaires avaient également commencé avec la Libye.
L'Italie réclame constamment que les autres pays européens l'aident à faire face aux arrivées de plus en plus importantes de migrants, qui tentent la traversée vers son île de Lampedusa, proche des côtes tunisiennes et libyennes.
L'Espagne accuse le Maroc «d'agression» et de «chantage»
L'afflux de migrants en provenance du Maroc voisin «est une agression à l'égard des frontières espagnoles mais aussi des frontières de l'Union européenne», a dénoncé Margarita Robles sur la radio publique, en dénonçant un «chantage» de Rabat qu'elle a accusé d'«utiliser des mineurs».
«Nous ne parlons pas de jeunes de 16, 17 ans», le Maroc a laissé passer des «enfants de 7 ou 8 ans, d'après ce que nous ont rapporté les ONG (...) en faisant fi du droit international», a vilipendé la ministre.
L'image d'un bébé sauvé de la noyade par un agent de la garde civile espagnole a notamment fait le tour du monde, suscitant l'effroi sur les réseaux sociaux.
Plusieurs ONG espagnoles et marocaines ont dénoncé le fait que ces mineurs se retrouvent victimes de la brouille entre les deux pays et s’inquiètent de les voir expulsés vers le Maroc.
Cette vague migratoire inédite a pour toile de fond la crise diplomatique majeure entre Madrid et Rabat, qui ne décolère pas depuis l'arrivée le mois dernier en Espagne, pour y être soigné, du chef des indépendantistes sahraouis du Front Polisario, ennemi juré du Maroc.
Mme Johansson a expliqué dans son interview à La Repubblica que Bruxelles était en train d'organiser «un réseau d'aide bénévole» pour cet été, en attendant une solution plus pérenne avec un accord sur le partage des migrants entre pays européens.
Mais «nous cherchons aussi à bloquer les départs» de migrants vers l'Europe, a-t-elle expliqué, notamment grâce à cet accord avec la Tunisie, qui devrait être conclu d'ici la fin de l'année.
La responsable européenne a expliqué qu'elle se rendrait jeudi en Tunisie avec la ministre italienne de l'Intérieur Luciana Lamorgese, «pour travailler sur un accord qui accorderait à ce pays une aide pour son économie, qui a terriblement souffert de la crise provoquée par le coronavirus, mais aussi des ressources pour lui permettre de mieux combattre les trafiquants d'êtres humains».
«Il y aura des fonds européens pour l'économie, les investissements, l'emploi. De leur côté, les autorités tunisiennes s'engagent à mieux surveiller leurs frontières, pour renvoyer dans leur pays les migrants qui ne sont pas des réfugiés, et à rapatrier leurs citoyens qui sont partis pour l'Europe illégalement», a-t-elle expliqué.
Et des discussions sont en cours avec le gouvernement libyen du Premier ministre Abdulhamid Dbeibah pour un accord sur un meilleur contrôle des départs de migrants des côtes libyennes, a-t-elle ajouté, estimant qu'il n'était "pas nécessaire d'attendre les élections de décembre" dans ce pays.