LA HAVANE: Surmonter la pire crise économique en 30 ans et affronter la «subversion» d'internet: les délégués du Parti communiste se penchent samedi et dimanche sur les défis qu'affronte Cuba, à la veille du départ à la retraite de Raul Castro.
Représentant les «plus de 700 000 militants» du parti unique, selon les médias officiels, sur une population de 11,2 millions d'habitants, quelque 300 délégués de toutes les provinces du pays sont réunis à La Havane pour ce congrès historique, démarré vendredi et organisé à huis clos.
Ils sont répartis en trois commissions de travail: l'une consacrée à l'économie, la deuxième à «l'activité idéologique et le travail sur les masses» et la troisième au parti et sa politique de promotion de dirigeants.
La plus grande urgence est économique, alors que le PIB s'est effondré de 11% en 2020, sa pire chute depuis 1993, sous l'effet du renforcement de l'embargo américain, en vigueur depuis 1962, et de la pandémie de coronavirus.
Vendredi, dans son dernier grand discours à la tête du parti, Raul Castro a appelé à «dynamiser le processus d'actualisation du modèle économique et social» qu'il avait lancé en 2008 avec une prudente ouverture au secteur privé et aux investissements étrangers.
Il a dénoncé «la médiocrité et l'improvisation», «l'excès de bureaucratie» et «la corruption», dans cette île aux pénuries récurrentes, qui doit importer 80% de ce qu'elle consomme, faute de production locale suffisante.
«La structure productive (du pays) n'arrive pas à satisfaire la demande de la population», a reconnu samedi le Premier ministre Manuel Marreo, qui préside l'un des groupes de travail.
«Cette question n'est pas seulement une priorité, c'est une question de sécurité nationale», a-t-il insisté.
Mais, dans l'ouverture au privé, «il y a des limites qu'on ne peut pas franchir, car les conséquences seraient irréversibles et conduiraient à des erreurs stratégiques, à la destruction même du socialisme et donc de la souveraineté et l'indépendance nationales», a affirmé vendredi Raul Castro.
A l'avenir, «des réformes de libéralisation économique sont certaines, mais leur rythme sera très lent car le gouvernement avance prudemment pour éviter des changements qui pourraient miner son contrôle», estime Norman McKay, analyste de The Economist Intelligence Unit.
Autre sujet de débat du parti: l'arrivée depuis fin 2018 de l'internet mobile, qui a stimulé les revendications de la société civile, encourageant certains à manifester, du jamais vu à Cuba.
Samedi, une vingtaine de militants, journalistes indépendants et artistes ont dénoncé via Twitter être empêchés par la police de sortir de chez eux, une technique généralement utilisée par les autorités pour empêcher tout rassemblement.
Fustigeant la «subversion» des réseaux sociaux et les fausses nouvelles qui y sont partagées, Raul Castro a affirmé que «par ce biais, on forme et on diffuse aux quatre vents une image virtuelle de Cuba comme une société moribonde et sans avenir, sur le point de s'effondrer et de laisser place à l'explosion sociale, tant souhaitée» par les Etats-Unis.
«Ces circonstances exigent une transformation urgente (...) sur le terrain idéologique», a-t-il dit.
Raul Castro, 89 ans, doit laisser son poste de premier secrétaire du parti, le plus important à Cuba, au président Miguel Diaz-Canel, 60 ans, lundi, dernier jour du congrès.