Le dollar s'envole, le Liban s'enfonce dans la tourmente

La pancarte du manifestant indique: «Tant que Salamé siège à la Banque (centrale), la monnaie est morte» alors que les manifestants ont brûlé mardi des poubelles devant la banque centrale libanaise à Beyrouth. (Photo, AFP)
La pancarte du manifestant indique: «Tant que Salamé siège à la Banque (centrale), la monnaie est morte» alors que les manifestants ont brûlé mardi des poubelles devant la banque centrale libanaise à Beyrouth. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 17 mars 2021

Le dollar s'envole, le Liban s'enfonce dans la tourmente

  • La rue se déchaîne face à une nouvelle plongée de la livre face au dollar américain
  • À Tripoli, les manifestants se sont tournés vers les demeures des politiciens, et ont brisé leurs caméras de sécurité

BEYROUTH: Le taux de change du dollar sur le marché noir libanais a atteint mardi des sommets jusque-là inégalés, une plongée de plus pour la livre qui est passée de 13 000 à 15 000 par rapport au dollar américain.

Des manifestants en colère sont descendus dans les rues et ont forcé les propriétaires des supermarchés à fermer leurs portes. D'autres commerçants ont pris la décision de fermer volontairement «jusqu'à nouvel ordre, et jusqu'à ce que toute cette folie du dollar s'arrête».

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Une manifestante porte le drapeau libanais dans une rue coupée, lors d'une manifestation contre la chute de la livre libanaise et la crise économique, près du bâtiment de la Banque centrale, à Beyrouth, au Liban, le 16 mars 2021. (Photo, Reuters)

Les propriétaires de boulangerie ont menacé d'arrêter la production de pain, et les propriétaires de stations-service pourraient leur emboîter le pas dans la vente de carburant.

Mardi était en pleine tourmente. Les manifestants ont réussi à barrer des artères à Beyrouth, ce qui créé une impasse à partir de la rue Bliss, qui longe l'Université américaine, jusqu’au quartier chic de Koraytem. Ils ont par ailleurs enflammé des pneus près de la Banque du Liban et d'autres institutions financières, et fracassé les façades des supermarchés.

Les routes qui relient les principales régions du Liban ont été coupées, notamment à la ville méridionale de Naqoura. À Tripoli, les manifestants se sont tournés vers les demeures des politiciens, et ont brisé leurs caméras de sécurité.

Des employées accompagnées de leurs enfants se sont rassemblées devant le sérail à Nabatiyeh, au sud du Liban.

Ilda Mazraani déclare: «Nous sommes des femmes employées à la fois dans les secteurs privé et public. Nos salaires se sont effondrés contrairement à nos inquiétudes qui elles ont augmenté».

Elle a exhorté les politiciens à «agir rapidement pour remédier à cette détérioration de la monnaie locale et sauver le pays et l'avenir de nos enfants».

Un document publié par la Sûreté générale libanaise qui circule sur les réseaux sociaux évoque «la possibilité d'une montée de violences dans les rues, pouvant atteindre des opérations armées visant les maisons des politiciens».

«Nos informations indiquent que le chaos, les bouleversements, et l’usage d’armes à feu dans les rues vont régner, tout comme les pillages et les règlements de compte, prétextant l'augmentation spectaculaire du taux de change du dollar et de la hausse du coût de la vie, dans le but de faire avancer des causes politiques, qui peuvent tous éclater à tout moment».

L'ambassade britannique a vivement conseillé mardi à ses citoyens au Liban de «rester vigilants lors de leurs déplacements dans les prochains jours».

Ismail, un livreur syrien dans un restaurant de Beyrouth, raconte à Arab News que «des hommes l’ont accosté lundi à midi à Tayouneh, un secteur qui relie Beyrouth à la banlieue sud de Dahyé, et lui ont ordonné de leur donner son argent, «parce qu'ils voulaient prendre le petit-déjeuner». Ils lui ont volé tout l'argent qu'il avait sur lui, et qui appartient au restaurant».

Les réfugiés et les travailleurs syriens au Liban sont parmi les groupes les plus vulnérables en temps de crise.

EN BREF

L’armée et les forces de sécurité sont intervenues mercredi afin d’empêcher les manifestants à Hay Al-Sellom, un quartier densément peuplé de la banlieue sud de Beyrouth (Dahyé), de couper les routes avec des pneus en feu.

Lors d'une session parlementaire mardi, les commissions parlementaires ont approuvé l'octroi d'un prêt de 200 millions de dollars à la compagnie d'électricité (EDL), ce qui retarderait l'obscurité totale, prévue pour fin de mars, de deux mois.

Le ministre de l'Énergie Raymond Ghajar a averti que le Liban plongerait dans un black-out si l'EDL ne reçois pas de subventions pour acheter du carburant et assurer le fonctionnement des centrales électriques.

Selon Reuters, le premier ministre Hassan Diab a annoncé que le Liban ne pourra pas financer les subventions sur le carburant après le mois de mars, et que celles des autres produits s’arrêteront après le mois de juin.

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Cette photo montre la valeur en livres libanaises d'un billet de 100 dollars américains au taux de change du marché noir (1 500 000 LP) à Beyrouth le 16 mars 2021. (Photo, AFP)

Aucune initiative de médiation n'a réussi jusque-là à résoudre le casse-tête qui entoure la formation de l’exécutif. Une source politique bien informée confie à Arab News que «le chef du Courant patriotique libre insiste toujours pour obtenir le tier de blocage dans le nouveau gouvernement, en plus de vouloir accorder un ministre au parti arménien Tachnag, et un autre à son allié, le député Talal Arslan».

L’ambassadeur saoudien au Liban, Walid Bukahri, a rencontré l’archevêque métropolite grec-orthodoxe de Beyrouth, Elias Audi, et a affirmé que «le Royaume se tient aux côtés du Liban».

L'ambassade américaine au Liban a révélé que le chef du Commandement central des États-Unis, le général Kenneth F. McKenzie, s'est rendu lundi à Beyrouth et a rencontré le chef de l'armée libanaise, le général Joseph Aoun, et d'autres officiers haut placés.

Un communiqué publié par l’ambassade a déclaré: «La réunion a souligné la nécessité de préserver la sécurité, la stabilité et la souveraineté du Liban,  ainsi que l’importance de ce partenariat solide entre les États-Unis et l’armée libanaise, surtout pendant les difficultés économiques que confronte le Liban».

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Le premier ministre par intérim du Liban, Hassan Diab, s’entretient avec des journalistes au palais présidentiel de Baabda, à l’est de la capitale Beyrouth. (Photo, Archives/Dalati et Nohra /AFP)

Une délégation du Hezbollah a de son côté, rencontré lundi le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov à Moscou.

Le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré que la «réunion a réitéré la position ferme de la Russie et son engagement à soutenir la souveraineté, l'intégrité et la sécurité du territoire au Liban. Elle a aussi rappelé la nécessité d'aborder les questions nationales les plus urgentes à travers un dialogue élargi, strictement juridique, entre les représentants de toutes les communautés religieuses du Liban, sans ingérence étrangère».

Le ministère russe ajoute que la réunion s’est principalement penchée sur «le besoin urgent de former un nouveau gouvernement dirigé par Saad Hariri qui soit capable de garantir au Liban un moyen de sortir de cette crise systémique».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
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  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).


L'Égypte annonce que 50 camions-citernes de carburant entreront chaque jour dans la bande de Gaza

Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
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  • Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.
  • M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

LE CAIRE : Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.

M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

La trêve devrait entrer en vigueur dimanche à 13 h 30 GMT, ouvrant ainsi la voie à un afflux massif d'aide, selon les médiateurs.

Des centaines de camions sont garés du côté égyptien du poste frontière de Rafah, un point d'entrée autrefois vital pour l'aide humanitaire, fermé depuis mai, lorsque les forces israéliennes ont pris le contrôle du côté palestinien du point de passage.

Au cours d'une conférence de presse conjointe avec son homologue nigérian, M. Abdelatty a déclaré : « Nous espérons que 300 camions se rendront au nord de la bande de Gaza », où des milliers de personnes sont bloquées dans des conditions que les agences humanitaires qualifient d'apocalyptiques.

Les travailleurs humanitaires ont mis en garde contre les obstacles monumentaux qui pourraient entraver les opérations d'aide, notamment la destruction des infrastructures qui traitaient auparavant les livraisons.