Vu avant-hier : une pièce de théâtre dans un théâtre privé à Oran, le premier, “La fourmi”. En début de soirée, vers 18h, les spectateurs arrivent hésitant, par deux, par trois, intimidés ou lents par prudence. Jamais seuls. Comme s’il s’agissait d’affronter l’inconnu et qu’il fallait alors être soutenu. Car voir un spectacle, “sortir” le soir, apprécier une pause entre le Covid, le cessez-le-feu et le Récit national est de l’inconnu. Nous en avons perdu l’habitude. D’ailleurs, “sortir” le soir est un acte mûrement réfléchi, un effort musculaire, de guerre. La “nuit” est, pour nous, toujours dangereuse. À cause du couvre-feu sanitaire, de l’histoire nationale, de la mémoire coloniale et de la décennie 90. Nous en avons été dépossédés, et lorsque nous l’endossons parfois, elle est souvent trop grande et froide. La nuit appartient aux gyrophares, aux hurlements, au désert du ciel et à la folie ou l’errance, le couteau et la menace. Elle est encore inhabitée, inhabitable, manquant de sécurité et de volonté de la sécuriser.
La nuit souffre aussi de la définition pécheresse du loisir, de son monopole tombé sous l’autorité de l’excès, de ce qui est perçu comme “vice”. La nuit est nocturne, mal éclairée par les poteaux, gardant mauvaise réputation. Trop de morts et de sans-abri s’y promènent pour qu’on tente de s’y mêler avec ses enfants ou son aimé(e). D’ailleurs, il y a quelque chose du cimetière dans les centres-villes algériens tombée la nuit. Un semblable air de trépas du vivant et du solaire qui nous rebute.
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