Les États-Unis doivent faire davantage pour affronter le régime iranien

Le porte-parole du Pentagone, John Kirby, a déclaré que les frappes contre les milices soutenues par l'Iran en Syrie étaient une réponse aux attaques contre le personnel américain en Irak. (Photo AP)
Le porte-parole du Pentagone, John Kirby, a déclaré que les frappes contre les milices soutenues par l'Iran en Syrie étaient une réponse aux attaques contre le personnel américain en Irak. (Photo AP)
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Publié le Samedi 06 mars 2021

Les États-Unis doivent faire davantage pour affronter le régime iranien

Les États-Unis doivent faire davantage pour affronter le régime iranien
  • La récente attaque militaire américaine contre les milices soutenues par l’Iran en Syrie était un pas dans la bonne direction, mais encore insuffisant pour affronter le régime prédateur de l’Iran
  • Le dossier du nucléaire ne doit pas être traité séparément du soutien malveillant du régime à des groupes terroristes au Moyen-Orient

Les frappes aériennes américaines visant les milices soutenues par l'Iran en Syrie la semaine dernière sont bienvenues, mais elles ne sont manifestement pas adéquates pour affronter le régime iranien et son vaste réseau de milices.

Les frappes aériennes autorisées par Joe Biden, qui ont détruit plusieurs installations dans l'est de la Syrie sont une réponse aux récentes attaques des milices soutenues par l'Iran en Irak. Cette action militaire enverra certainement un message au régime iranien: toute attaque contre des bases ou du personnel américains ne restera pas longtemps impunie.

Lorsque les dirigeants iraniens prendront conscience que leurs attaques contre les entités américaines auront des conséquences militaires, ils feront preuve de plus de retenue. Il semble que la stratégie de l'establishment théocratique s’adapte à la politique américaine: quand l’administration Trump a évoqué des frappes militaires en Iran, le guide suprême iranien Ali Khamenei a étonnamment ordonné à toutes les factions des groupes armés irakiens de cesser d'attaquer les intérêts américains en Irak. Un haut commandant d’un groupe armé soutenu par l’Iran et impliqué dans les attaques a déclaré au site Middle East Eye en octobre dernier que «les ordres de Khamenei étaient simples et clairs. Toutes les attaques visant les intérêts américains en Irak doivent cesser».

Afin d'affronter efficacement le régime iranien, l'administration Biden devrait s'abstenir d'envoyer des messages contradictoires: frapper d’une part des milices alliées à l’Iran et d’autre part tenter de relancer l’accord nucléaire conclu en 2015, qui permettra de lever les sanctions contre le régime et lui permettra d’engranger des milliards de dollars. Le dossier du nucléaire ne doit pas être traité séparément du soutien malveillant du régime à des groupes terroristes au Moyen-Orient.

L'administration Biden doit adopter une politique plus globale et cohérente envers le régime iranien qui inclut différentes questions clé: ses programmes de missiles nucléaires et balistiques, ses interventions régionales, ses assassinats ou tentatives d’attentats dans d’autres pays – y compris en Occident –  son parrainage de milices et de groupes terroristes à travers la région, et ses violations flagrantes des droits de l'homme. Il est important de rappeler que le programme de missiles balistiques, pilier de la politique étrangère de Téhéran est directement lié au programme nucléaire, qu’il doit être limité et pris en compte dans tout nouvel accord.

Cela signifie que la Maison Blanche devrait exhorter le Conseil de sécurité de l'ONU à imposer des sanctions à Téhéran, s'il continue de tester des missiles balistiques en violation de la résolution 2231. Cette résolution «appelle l'Iran à n'entreprendre aucune activité liée à des missiles balistiques capables de transporter des armes nucléaires, y compris les tirs recourant à la technologie des missiles balistiques». Le régime a tiré de nombreux missiles balistiques en toute impunité depuis la signature de l'accord nucléaire en 2015.

En outre, les États-Unis doivent imposer des sanctions politiques et économiques aux responsables iraniens coupables de violations des droits de l'homme, tout comme l'administration Trump l'a fait avec le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI), qui est toujours désigné comme une organisation terroriste. Malheureusement, Biden et son administration sont restés silencieux à la suite des violations choquantes des droits de l’homme qui ont eu lieu récemment en Iran, avec un nombre croissant d’exécutions de ceux qui s’opposent à l’establishment théocratique.

L'administration Biden doit également annoncer publiquement son soutien au peuple iranien, en particulier aux jeunes, qui demandent un gouvernement participatif et démocratique. L'Iran possède une forte population de jeunes – au moins 60% de ses citoyens ont moins de 30 ans – qui sont largement mécontents de l'establishment politique actuel. Le peuple veut un système de gouvernance démocratique où les libertés d'expression, de presse et de réunion ne sont pas supprimées. La jeunesse a le sentiment de ne pas être entendue dans ses tentatives d’atteindre son objectif d’autodétermination. La Maison Blanche doit envoyer un message clair indiquant qu'elle se tient aux côtés du peuple iranien et soutient ses aspirations.

La Maison Blanche doit envoyer un message clair indiquant qu'elle se tient aux côtés du peuple iranien et soutient ses aspirations.

Dr Majid Rafizadeh

 

Se ranger aux côtés de la population iranienne implique que les États-Unis ne peuvent pas d’un côté récompenser le régime en revenant dans l’accord nucléaire et en levant les sanctions, et de l’autre avoir des liens politiques étroits avec les dirigeants iraniens. L’administration Biden ne peut pas envoyer un message contradictoire au peuple iranien, tout comme l’administration Obama l’a fait, en déclarant qu’elle soutient sa cause tout en s’asseyant à la table  des négociations tout sourire avec les politiciens iraniens. Le peuple iranien considérerait un tel acte comme une trahison. Lorsque les États-Unis se lient d'amitié avec le régime iranien et lui redonnent le pouvoir politique et économique, ils affaiblissent directement la majorité du peuple iranien.

Enfin, être aux côtés du peuple iranien signifie soutenir et faciliter son accès aux plate-formes de médias sociaux. Le gouvernement iranien est devenu habile dans sa censure des médias sociaux, mais les États-Unis peuvent trouver des moyens de contourner cette censure.

La récente attaque militaire américaine contre les milices soutenues par l’Iran était un pas dans la bonne direction, mais qui n’est pas suffisant: l’administration Biden doit faire davantage pour affronter le régime prédateur de l’Iran.

 

Dr. Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Twitter: @@Dr_Rafizadeh.

L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur arabnews.com