La condamnation de Sarkozy relance le débat sur l’impartialité des juges

Nicolas Sarkozy quittant la salle d’audience à l’issue du verdict, le 1er mars à Paris (Photo, AFP).
Nicolas Sarkozy quittant la salle d’audience à l’issue du verdict, le 1er mars à Paris (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Mercredi 03 mars 2021

La condamnation de Sarkozy relance le débat sur l’impartialité des juges

  • Les proches de Sarkozy croient dur comme fer que la procédure d’appel innocentera l’ancien président, condamné en premier instance à trois ans de prison, dont un ferme
  • Souvent décrié pour ses méthodes, le Parquet financier a peut-être voulu faire, avec l’affaire des écoutes, un coup d’éclat pour affirmer son autorité

PARIS: Coup de tonnerre, tremblement de terre, acharnement judiciaire, c’est ainsi que les proches de l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy ont qualifié sa condamnation à trois ans de prison dont un an ferme, par le tribunal correctionnel de Paris dans l’affaire dite «des écoutes». Verdict historique, date gravée dans le marbre, justice pour tous ont à l’inverse clamé les détracteurs de l’ancien président à l’annonce de la sentence.

C’est un débat de fond qui s’ouvre de nouveau en France à l’issue de cette affaire sur l’indépendance et l’impartialité de la justice. L’affaire des écoutes a été confiée au Parquet national financier, qui a décidé après enquête de déférer Nicolas Sarkozy, son ancien avocat Thierry Herzog ainsi que l’ancien magistrat Gilbert Azibert, devant la justice.

Certains ont même fait allusion à une tentative de mise à mort politique fomentée par François Hollande, son ancien rival à l’élection présidentielle de 2012.

Les enquêteurs avaient mis sur écoute deux lignes téléphoniques enregistrées au nom de Paul Bismuth (un faux nom) et utilisées par Sarkozy et Herzog pour échanger entre eux. Les écoutes ont révélé que dans ces échanges, Sarkozy, à l’époque président en exercice, avait promis à Azibert, par l’intermédiaire de Herzog, un poste à Monaco en échange d’informations sur un dossier en cours concernant l’ancien président, le dossier Bettencourt.

Une affaire dans laquelle Nicolas Sarkozy est accusé d’avoir reçu des financements illégaux pour la campagne présidentielle de 2007 de la part de la milliardaire Liliane Bettencourt. Cette affaire a débouché sur un non-lieu pour Sarkozy, qui avait comparu devant la justice après la fin de son mandat présidentiel, en 2012.

 

L’affaire des écoutes, elle, s’est poursuivie, et a débouché sur un verdict qui constitue une première sous la Vᵉ République. Le tribunal correctionnel a jugé que les délits imputés à l’ancien président avaient «porté gravement atteinte à la confiance publique», dans la mesure où un chef d’État est supposé «être le garant de l’indépendance de la justice» et non se servir de son statut «pour gratifier un magistrat ayant servi son intérêt personnel». Des délits caractérisés qui expliquent un verdict sévère à l’égard de Sarkozy, qui devient ainsi le premier président français condamné à de la prison ferme.

Ses deux coprévenus, Herzog et Azibert, qui comparaissaient avec lui ont écopé de la même peine. Sans surprise, les trois condamnés ont décidé de faire appel de cette décision. Sarkozy, même s’il n’avait pas fait appel, ne serait pas allé en prison, puisque la loi française prévoit un aménagement des peines de cette durée. La présidente de la 32ᵉ chambre a expliqué que «la partie ferme de la peine sera aménagée sous le régime de la détention à domicile sous surveillance électronique». Il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’une condamnation des plus sévères, au regard du délit commis, mais le tribunal a voulu insister sur sa gravité en raison de la fonction qu’occupait l’accusé au moment des faits.

Sarkozy reste toujours à ce jour la personnalité préférée des électeurs de droite, qui voient en lui un éventuel recours pour la présidentielle de 2022.

Les partisans de la famille politique de Sarkozy ont vu dans cette sévérité un acharnement judiciaire contre l’ancien chef de l'État. Certains ont même fait allusion à une tentative de mise à mort politique fomentée par François Hollande, son ancien rival à l’élection présidentielle de 2012. En effet, le Parquet national financier a été créé par Hollande en 2013, dans le but d’enquêter sur les dossiers de fraude fiscale, de corruption et de trafic d’influence.

Le but de ce Parquet selon Hollande – qui avait promis aux Français une République exemplaire – était de montrer aux citoyens que les hommes politiques n’étaient pas au-dessus des lois, justifiant ainsi les peines sévères qui pouvaient leur être infligées. Souvent décrié pour ses méthodes et la sensibilité des dossiers qu’il a à instruire, le Parquet a peut-être voulu, avec l’affaire des écoutes, faire un coup d’éclat pour affirmer son autorité. Il se retrouve aujourd’hui accusé d’ingérence politique en raison des retombées des affaires qu’il est amené à gérer. C’est ce qu’a souligné Christian Jacob, le patron du parti Les Républicains, qui a indiqué que «la sévérité de la peine retenue est absolument disproportionnée et révélatrice de l’acharnement judiciaire visant Nicolas Sarkozy».

Sarkozy reste toujours à ce jour la personnalité préférée des électeurs de droite, qui voient en lui un éventuel recours pour la présidentielle de 2022, mais ses ambitions se trouvent sérieusement entravées par sa condamnation, même si ses proches et son avocate Jacqueline Laffont affirment qu’il sera relaxé en appel. Entre-temps, Sarkozy, impliqué dans une dizaine d’affaires judiciaires devra de nouveau comparaître devant la justice le 17 mars dans l’affaire Bygmalion, qui concerne le dépassement de ses comptes de campagne présidentielle en 2012.

La France, elle, se retrouve encore une fois divisée sur la question du pouvoir des juges et de leur indépendance.


Le Sénat achève l'examen du budget de la Sécurité sociale à l'approche d'une semaine décisive

Cette vue générale prise à Paris le 2 avril 2024, montre le Sénat français en séance. Le retour de la taxe lapin : pour responsabiliser les patients qui annulent leurs rendez-vous médicaux, le Sénat français a voté le 22 novembre 2024 l'instauration d'une taxe à la charge de ces patients qui se lèvent, contre l'avis du gouvernement français. (Photo AFP)
Cette vue générale prise à Paris le 2 avril 2024, montre le Sénat français en séance. Le retour de la taxe lapin : pour responsabiliser les patients qui annulent leurs rendez-vous médicaux, le Sénat français a voté le 22 novembre 2024 l'instauration d'une taxe à la charge de ces patients qui se lèvent, contre l'avis du gouvernement français. (Photo AFP)
Short Url
  • : Samedi, le Sénat a achevé l'examen du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2025, avant un vote solennel mardi sur ce texte hautement risqué pour le gouvernement de Michel Barnier, qui pourrait être censure.
  • Un vote solennel sur l'ensemble du texte est prévu mardi au Sénat, avec une adoption quasi certaine.

PARIS : Samedi, le Sénat a achevé l'examen du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2025, avant un vote solennel mardi sur ce texte hautement risqué pour le gouvernement de Michel Barnier, qui pourrait être censure.

Après une semaine de débats autour de plusieurs mesures épineuses telles que les retraites, les allègements de cotisations patronales ou encore le temps de travail, la chambre haute a terminé ses travaux en approuvant les prévisions budgétaires du gouvernement.

Elle a notamment validé l'objectif de dépenses de l'assurance maladie (ONDAM) pour 2025, fixé par le gouvernement à 264,2 milliards d'euros. Il a été revu à la hausse de 300 millions d'euros, à la suite de l'attribution d'une enveloppe exceptionnelle de 100 millions d'euros aux maisons de retraite en difficulté, mais aussi pour prendre en compte le dérapage des dépenses de médicaments récemment identifié.

Le gouvernement entend contenir ce dérapage en demandant des efforts complémentaires aux industriels du médicament et au secteur du transport sanitaire.

La Haute Assemblée, dominée par une alliance droite-centristes qui soutient le gouvernement, a globalement approuvé les propositions de l'exécutif, à l'inverse de l'Assemblée nationale qui avait totalement remodelé ce budget de la Sécurité sociale à l'initiative des oppositions, sans pouvoir passer au vote dans les délais constitutionnels.

« Nous avons pris des mesures impopulaires, mais face au déficit qui se creuse, il faut faire face à la réalité et réduire ce train de vie, même si c'est difficile », a réagi auprès de l'AFP la rapporteure générale centriste du Sénat, Élisabeth Doineau.

Un vote solennel sur l'ensemble du texte est prévu mardi au Sénat, avec une adoption quasi certaine.

Le sort de ce projet de budget de la Sécurité sociale sera ensuite entre les mains de quatorze parlementaires — sept sénateurs et sept députés — chargés de trouver un texte de compromis lors d'une commission mixte paritaire (CMP) mercredi au Sénat.

Le camp gouvernemental y sera majoritaire, mais rien n'assure que le « socle commun » s'entende, car une mesure clé sur la baisse des exonérations de cotisations patronales irrite les troupes macronistes.

Si un compromis est trouvé, le texte final sera soumis à un ultime vote dans les deux chambres, avec l'utilisation plus que probable de l'article 49.3 par le gouvernement devant les députés.

Une motion de censure a déjà été annoncée par la gauche, ce qui pourrait provoquer la chute du gouvernement Barnier avant l'hiver si le Rassemblement national décide de la voter.


Darmanin presse Barnier d'inscrire le projet d'autonomie de la Corse à l'ordre du jour du Parlement

Gérald Darmanin a affirmé mercredi soir qu'il allait "tout organisateur pour" qu'un ressortissant ouzbek soupçonné de radicalisation expulsé en novembre vers son pays d'origine (Photo, AFP).
Gérald Darmanin a affirmé mercredi soir qu'il allait "tout organisateur pour" qu'un ressortissant ouzbek soupçonné de radicalisation expulsé en novembre vers son pays d'origine (Photo, AFP).
Short Url
  • Dans un entretien à Corse Matin publié samedi, l'ancien ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin presse le Premier ministre Michel Barnier de soumettre au Parlement la « proposition constitutionnelle » reconnaissant un statut d'autonomie à la Corse.
  • « Il faut que la Corse incarne la fin de l'État jacobin », a expliqué samedi M. Darmanin.

PARIS : Dans un entretien à Corse Matin publié samedi, l'ancien ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin presse le Premier ministre Michel Barnier de soumettre au Parlement la « proposition constitutionnelle » reconnaissant un statut d'autonomie à la Corse, un projet interrompu par la dissolution de l'Assemblée.

« Il faut désormais que Michel Barnier la présente au Parlement le plus rapidement possible. C'est ce qu'Emmanuel Macron a dit au président du Conseil exécutif de Corse Gilles Simeoni qu'il a récemment reçu », a déclaré M. Darmanin au quotidien.

« Le plus dur a été fait. Nous avons rétabli la paix civile en Corse. J'ai engagé, à la demande du chef de l’État, un processus historique : pour la première fois, un ministre de l'Intérieur a évoqué la question de l'autonomie que nous avons négociée », déclare également le député (EPR) du Nord.

« Une question se pose désormais : la représentation parlementaire peut-elle adopter la proposition constitutionnelle ? La réponse est oui, et encore plus qu'avant. Il existe une large majorité au Palais-Bourbon entre les LR, avec lesquels nous formons une majorité, les socialistes, les centristes de Liot, et du côté du Sénat. Je demande, je le redis, au Premier ministre d'inscrire ce texte à l'ordre du jour du Parlement. Il ne faut pas avoir peur », insiste M. Darmanin.

Le processus dit de « Beauvau » avait été initié en 2022 par Gérald Darmanin, à la demande d'Emmanuel Macron, pour mettre un terme aux violences sur l'île provoquées par la mort du militant indépendantiste Yvan Colonna. Il avait débouché en mars sur un accord prévoyant « la reconnaissance d'un statut d'autonomie » de la Corse « au sein de la République ».

Mais la dissolution de l'Assemblée nationale a mis un terme aux discussions, laissant de nombreux élus corses craindre l'abandon du projet.

« Il faut que la Corse incarne la fin de l'État jacobin », a expliqué samedi M. Darmanin.

Devant l'Assemblée, la ministre des Territoires Catherine Vautrin avait évoqué un projet de loi constitutionnelle en 2025 devant déboucher, in fine, sur un vote du Congrès « avant la fin de l'année 2025 ».

Par ailleurs, interrogé sur une éventuelle candidature à l'élection présidentielle, M. Darmanin a répondu : « Trop tôt pour le dire. » « Mais je ne m'en désintéresserai pas, j'y porterai de toute façon mes convictions et mes idées », ajoute le député LREM, membre du parti d'Emmanuel Macron mais également proche d’Édouard Philippe (Horizons), et qui a récemment créé un club de réflexion, Populaires.


Macron va marquer le 80e anniversaire de la libération de Strasbourg

Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors d'une conférence de presse après avoir visité le brise-glace Almirante viel de la marine chilienne à Muelle Molo de Abrigo, Valparaiso, Chili, le 21 novembre 2024. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors d'une conférence de presse après avoir visité le brise-glace Almirante viel de la marine chilienne à Muelle Molo de Abrigo, Valparaiso, Chili, le 21 novembre 2024. (AFP)
Short Url
  • Emmanuel Macron marque samedi le 80e anniversaire de la libération de Strasbourg du joug nazi avec un hommage à la résistance alsacienne
  • Le chef de l'Etat, qui poursuit un long cycle mémoriel autour des 80 ans de la Libération de la France et de la fin de la Seconde guerre mondiale, est attendu à 11H20 place Broglie pour une cérémonie militaire, avant un discours à l'université

STRASBOURG: Emmanuel Macron marque samedi le 80e anniversaire de la libération de Strasbourg du joug nazi avec un hommage à la résistance alsacienne, aux incorporés de force et à l'historien Marc Bloch qui pourrait être panthéonisé.

Le chef de l'Etat, qui poursuit un long cycle mémoriel autour des 80 ans de la Libération de la France et de la fin de la Seconde guerre mondiale, est attendu à 11H20 place Broglie pour une cérémonie militaire, avant un discours à l'université.

Il se rendra ensuite dans l'ancien camp de concentration nazi de Natzweiler-Struthof, le seul érigé sur le territoire français, à une soixantaine de kilomètres de Strasbourg, alors que l'Alsace était annexée de fait par le IIIe Reich.

Place Broglie, il saluera la mémoire du général Leclerc et des hommes de la Deuxième division blindée, libérateurs de Strasbourg le 23 novembre 1944, après s'être juré trois ans plus tôt lors du serment de Koufra (Libye) de combattre jusqu'à ce que le drapeau français flotte sur la capitale de l'Alsace.

En clin d'oeil, les couleurs de la France seront de nouveau hissées sur la flèche de la cathédrale de Strasbourg durant la cérémonie.

- "Malgré-nous" -

Emmanuel Macron prendra ensuite la parole au Palais universitaire de Strasbourg. "Ce sera l'occasion d'évoquer la résistance des Alsaciens, la libération du territoire et le toujours délicat sujet des incorporés de force d'Alsace-Moselle" dans la Wehrmacht, a indiqué l'Elysée.

Plus de 130.000 Alsaciens et Mosellans, considérés comme Allemands après l'annexion de ces territoires, ont dû intégrer l'armée allemande et 12.000 ne sont jamais revenus, un drame qui reste douloureux dans la région, 80 ans après la fin de la guerre.

Très longtemps, les "Malgré-nous", associés pour certains à l'un des pires massacres de civils commis par les Nazis en Europe occidentale à Oradour-sur-Glane (Haute-Vienne) en 1944, sont demeurés un sujet relativement tabou.

"Après la guerre, on va surtout valoriser la mémoire héroïque, résistante, tout ce qui peut refaire le ciment de la France. Et dans toute cette histoire, les +Malgré nous+, ça fait un peu tache, ce n'est pas glorieux, ça ne  permet pas de construire une mémoire qui sera nationale", pointe l'historien Christophe Woehrle.

"80 ans après, il faut poser des mots et des actes, il faut sortir des sentiments" de honte et de la "non-reconnaissance", estime la maire de Strasbourg Jeanne Barseghian qui appelle le président à se prononcer pour l'indemnisation des orphelins de "Malgré-nous".

- Entre France et Allemagne -

Emmanuel Macron pourrait aussi annoncer l'entrée au Panthéon de l'universitaire et résistant Marc Bloch, arrêté par la Gestapo et fusillé trois mois plus tard en 1944, selon plusieurs sources à l'AFP. A l'issue du discours, il remettra aussi la Légion d'honneur à son fils Daniel Bloch.

Professeur d'histoire du Moyen-Age à l'université de Strasbourg de 1919 à 1936, Marc Bloch a renouvelé en profondeur le champ de la recherche historique en l'étendant à la sociologie, la géographie, la psychologie et l'économie.

En 1929, il a notamment fondé avec Lucien Febvre la revue des "Annales d'histoire économique et sociale", qui a eu une résonance universitaire dans le monde entier.

Capitaine et Croix de guerre en 1914-1918, de nouveau mobilisé en 1939, Marc Bloch s'engage dans la résistance au tournant des années 1942/43.

Il est arrêté à Lyon le 8 mars 1944, emprisonné et torturé à la prison de Montluc, puis fusillé le 16 juin avec 29 de ses camarades.

Au Struthof, Emmanuel Macron ravivera la flamme au pied du Mémorial aux héros et martyrs de la déportation, après une "visite sobre et solennelle" du camp où 17.000 personnes périrent.

Le chef de l'Etat visitera également le Musée mémorial d'Alsace-Moselle à Schirmeck, qui retrace l'histoire des habitants de la région, ballotés entre France et Allemagne durant des décennies entre 1870 et 1945, et rend hommage aux 36.000 Alsaciens et Mosellans décédés durant la guerre.