Alors que l’économie de l’Iran continue à se dégrader, de nombreux Iraniens luttent pour boucler leurs fins de mois, dans un contexte de taux records de chômage et l’inflation, et d’un sentiment de déception populaire galopante. Cette crise sans précédent n’a cependant pas empêché le Guide Suprême Ali Khamenei de recourir encore une fois à son modus operandi déjà testé et appliqué: ne pas assumer ses responsabilités.
Khamenei utilise plusieurs boucs émissaires pour échapper à ses responsabilités. Sa stratégie la plus importante consiste à tenir l’Occident pour responsable des problèmes financiers du pays, en particulier les Etats-Unis. Au cours de son dernier discours télévisé, à l’occasion de l’Aïd El-Adha la semaine dernière, Khamenei a de nouveau montré du doigt Washington en déclarant :’’Les sanctions américaines ont sans aucun doute créé des problèmes pour l’Iran.’’
Suite au retrait par l’administration Trump du Plan d’Action Global Conjoint, en d’autres termes l’accord nucléaire iranien, et son recours à de nouvelles sanctions contre la république islamique, les exportations de pétrole de l’Iran ont chuté de façon significative. Alors que Téhéran vendait environ 2,5 millions de barils par jour (b/j), ses exportations ne s’élèvent plus qu’à environ 70.000 b/j. Un grand nombre des problèmes économiques de l’Iran existaient toutefois avant que les Etats-Unis n’exercent leur politique de pression maximale.
En Iran, la corruption est enracinée dans les institutions politiques et financières qui constituent la colonne vertébrale du pays. Les malversations et le blanchiment d’argent à l’intérieur du système bancaire sont des exemples typiques de cette corruption. Les politiciens, dont des membres du bureau présidentiel, sont bien connus pour recourir à des pratiques de corruption pour leur propre bénéfice politique et financier. La corruption se traduit souvent par l’octroi de prêts, de bénéfices financiers et de bourses aux parents de hauts responsables, ou de ceux qui ont fait preuve de loyauté.
A titre d’exemple, Hossein Fereydoun – frère du Président Iranien Hassan Rouhani et membre du Parti de la Modération et du Développement, qui était auparavant en charge de la sécurité du guide suprême – a été l’année dernière condamné à cinq ans de prison pour son implication dans un scandale de corruption à grande échelle. En 2018, Ahmad Araqchi, ancien vice-gouverneur de la banque centrale et parent du vice-ministre des Affaires Etrangères Abbas Araqchi, ainsi que Meysam Khodaei, qui était conseiller de Mohammad Nahavandian, l’adjoint de Rouhani pour les affaires économiques, avaient été impliqués dans une affaire de corruption de près de 200 millions de dollars.
En décembre 2017, Hamid Baghaei, ancien vice-président et proche de l’ex-Président Mahmoud Ahmadinejad a été accusé de corruption et de malversations, et avait été selon certaines sources, condamné à une peine de prison de soixante-trois ans. Par ailleurs, en 2013, le milliardaire Babak Zanjani, a été condamné pour avoir détourné le montant de $2,7 milliards d’une compagnie de pétrole étatique. Ce ne sont là que quelques exemples de la corruption grandissant qui suscite la colère des Iraniens.
Il existe cependant quelques rares occasions, où les cas de corruption sont portés devant les tribunaux, non comme faisant partie des efforts concertés pour lutter contre cette pratique, mais comme un moyen de calmer les frustrations du peuple qui fait face à de très mauvaises conditions économiques que la corruption ne fait qu’aggraver. Normalement, de tels cas sont traités à huis clos, leurs sentences sont souvent tenues secrètes, après des mois de procès, et sans aucunes explications juridiques. Ces cas peuvent également avoir pour cause des désaccords politiques entre certaines factions, et utilisés alors comme moyen de marquer politiquement des points.
La colère populaire est croissante contre le train de vie excessif des enfants des élites, les‘’bien-nés’’ et leurs familles, comme ‘’aghazadeh’’, tandis que le peuple ordinaire lutte pour nourrir ses enfants ou les scolariser. Les comptes Instagram, tels que ‘’Enfants Riches de Téhéran’’ montrent des photos des élites étalant leur richesse et jouissant de styles de vie fastueux chez eux et à l’étranger.
Khamenei, le dirigeant iranien non élu, possède un empire financier évalué à plus de 95 milliards de dollars, selon un rapport publié par Reuters en 2013. Une estimation plus récente fournie par l’ambassade américaine à Bagdad évalue sa fortune à près de 200 milliards. Elle a posté en 2019 sur Facebook :’’Les avoirs de l’actuel guide suprême Ali Khamenei sont estimés à eux seuls à 200 milliards, alors qu’un grand nombre de personnes sombrent dans la misère en raison de la grave situation économique en Iran, après quarante années de règne des mollahs.’’
Le régime a également échoué à appliquer l’article 142 de sa propre constitution qui stipule que ‘’La fortune du guide, du président de la république, des députés, des ministres, de leurs épouses et de leurs enfants, sera examinée par le chef du pouvoir judiciaire avant et après la durée de leur fonction, en vue de déterminer si elle a augmenté de manière illégale.’’
Pendant près de quatre décennies, le régime a dilapidé les ressources du pays en finançant le terrorisme et les milices. Les dépenses liées au programme nucléaire iranien s’élèvent à plus de 100 milliards de dollars selon un rapport de 2013 publié par la Fédération des Scientifiques Américains qui a affirmé que ‘’la recherche de l’Iran pour le développement de son programme nucléaire a été marquée par d’énormes coûts et risques financiers. On estime que le coût du programme est bien au-dessus de 100 milliards de dollars, et la construction du réacteur de Bushehr a plus de $11 milliards, ce qui en fait l’un des réacteurs les plus chers au monde.’’
Khamenei, qui a le dernier mot sur la politique de l’Iran est la principale figure politique qui devrait être tenue responsable de la mauvaise situation économique dans laquelle se trouve le pays.