Le cauchemar ethnique du Darfour revient hanter les dirigeants civils du Soudan

Les violences à Al-Geneina, la capitale du Darfour occidental, ont commencé le 16 janvier sous forme de bagarres. (AFP / Archive)
Les violences à Al-Geneina, la capitale du Darfour occidental, ont commencé le 16 janvier sous forme de bagarres. (AFP / Archive)
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Publié le Vendredi 29 janvier 2021

Le cauchemar ethnique du Darfour revient hanter les dirigeants civils du Soudan

  • Un nouveau carnage dans une région appauvrie et déchirée par les conflits pose un défi majeur au gouvernement de Khartoum
  • Les experts pensent que la fin de la mission de maintien de la paix de la Minuad pourrait avoir contribué à une flambée de violence

DUBAÏ: Au moment où la communauté internationale pensait avoir un conflit de moins à affronter, les inquiétudes ont été ravivées lorsque la nouvelle des affrontements tribaux dans la région du Darfour au Soudan a éclaté. Une fois le calme revenu, au moins 250 vies avaient été perdues, des centaines de personnes avaient été blessées et plus de 100 000 Soudanais avaient été déplacés dans deux États différents.

On pointe du doigt le gouvernement conjoint militaro-civil du Soudan, qui a pris en charge le mois dernier la sécurité au Darfour assuré jusque-là par l’Organisation des nations unies (ONU) et la mission conjointe des Nations unies et de l'Union africaine au Darfour (Minuad), dont les soldats de la paix ont quelque peu contenu la violence dans la région au cours des treize dernières années.

Les experts pensent que l'annonce, à la suite d'une résolution du Conseil de sécurité des nations unies du 22 décembre 2020, de la fin de la mission de la Minuad a indirectement contribué à la dernière flambée de violence. Le 31 décembre, la force a officiellement mis fin à ses opérations et annoncé des plans de retrait progressif de ses quelque 8 000 personnels armés et civils dans un délai de six mois.

La guerre a éclaté lorsque les rebelles des minorités ethniques du Darfour se sont soulevés contre le gouvernement islamiste du dictateur Omar al-Bachir. (AFP / Archive)
La guerre a éclaté lorsque les rebelles des minorités ethniques du Darfour se sont soulevés contre le gouvernement islamiste du dictateur Omar al-Bachir. (AFP / Archive)

Les violences à Al-Geneina, capitale du Darfour occidental, ont commencé le 16 janvier sous forme de bagarres. Des membres de la puissante tribu arabe Rizeigat et de la tribu non arabe Massalit se sont affrontés, coûtant la vie à de nombreuses personnes, dont des enfants et des membres des forces de sécurité, selon le syndicat des médecins soudanais.

Une nouvelle flambée de violence, deux jours plus tard, dans le sud du Darfour, entre les Rizeigat et la tribu non arabe Falata à la suite du meurtre d'un berger, a fait des dizaines de morts supplémentaires et a causé une nouvelle vague de déplacements. Les Falata sont des éleveurs de bovins et de chameaux dont les racines remontent aux Peuls d'Afrique occidentale.

 

En bref

  • La Minuad a officiellement mis fin aux opérations au Darfour le 31 décembre 2020
  • Le gouvernement soudanais a pris la responsabilité de la protection des civils dans la région
  • La Minuad a annoncé le retrait progressif de 8 000 personnels armés et civils dans un délai de six mois

Selon le Haut-Commissariat des nations unies pour les réfugiés (HCR), ceux qui fuient la violence dans la province d’Ouaddaï, dans l’est du Tchad, ont été contraints de chercher refuge dans des endroits reculés dépourvus de services élémentaires ou d’infrastructures publiques.

Rétrospectivement, les mises en garde des groupes de la société civile, des dirigeants locaux et des experts sur les conséquences de la décision de la Minuad se sont révélées exactes. Craignant une recrudescence des violences, les habitants du Darfour ont également organisé des manifestations à la fin de décembre pour protester contre le départ des soldats de la paix.

Pour eux, ce n’est pas seulement le manque d'expérience du gouvernement d’Abdallah Hamdok qui est préoccupant. Le calme qui régnait depuis l’arrivée de la Minuad n’était guère révélateur de la situation sur le terrain.

Alors que le conflit principal s'est apaisé au fil des années, la violence ethnique et tribale éclate encore périodiquement, impliquant principalement des pasteurs arabes semi-nomades et des agriculteurs sédentaires.

Les affrontements tribaux dans la région du Darfour au Soudan ont provoqué la mort d’au moins 250 personnes. (AFP / Archive)
Les affrontements tribaux dans la région du Darfour au Soudan ont provoqué la mort d’au moins 250 personnes. (AFP / Archive)

«Les combats n’ont pas été aussi soudains que les gens le pensaient; il y a eu par exemple des affrontements en décembre», a déclaré à Arab News Jonas Horner, analyste principal du Soudan à l'International Crisis Group.

«En réalité, la violence n’a jamais cessé au Darfour ces derniers mois, et cela contredit le postulat selon lequel la sécurité s’est suffisamment améliorée pour que la Minuad puisse partir. Je pense que le pic de violence du moment est directement causé par le retrait de la Minuad au Darfour. La violence a en effet explosé deux semaines seulement après la fin de sa mission.»

Pour être parfaitement honnête, la décision de l'ONU de retirer les soldats de la paix du Darfour a été prise sur la base des promesses faites par les autorités de Khartoum. «Je pense que c'est aussi une chose à noter, bien sûr: le gouvernement n'a pas réussi son premier test d’assurer la sécurité», précise Jonas Horner. «C'était la période durant laquelle ils étaient censés prendre la relève de la Minuad afin d’assumer la responsabilité essentielle de la sécurité des Darfouriens.»

La confiance du gouvernement soudanais dans sa capacité à prendre en charge la sécurité du Darfour découle probablement d’un accord de paix signé en octobre dans la capitale du Soudan du Sud, Juba, par la plupart des groupes en guerre, qui les oblige à déposer leurs armes.

La décision de l'ONU de retirer les soldats de la paix du Darfour a été prise sur la base des promesses faites par les autorités de Khartoum. (AFP / Archive)
La décision de l'ONU de retirer les soldats de la paix du Darfour a été prise sur la base des promesses faites par les autorités de Khartoum. (AFP / Archive)

Deux groupes ont refusé de rejoindre l'accord de paix, notamment la faction du Mouvement de libération du Soudan (MLS) dirigée par Abdelwahid Nour, qui bénéficierait d'un soutien considérable au Darfour.

Bien que les affrontements au Darfour occidental et au Darfour Sud ne semblent impliquer aucun des signataires de l’accord de paix, une combinaison de pauvreté, de conflits ethniques et de violence a laissé la région inondée d’armes et sa population divisée par des rivalités territoriales et d’accès à l’eau.

Amani al-Taweel, chercheur et expert des affaires soudanaises au Centre des études politiques et stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, affirme que les autorités de Khartoum n'ont pas déployé les forces de sécurité en temps opportun au Darfour, malgré le passif de la région en matière de conflits tribaux et ethniques, susceptibles de déclencher des conflits plus larges.

Amani al-Taweel affirme que les autorités de Khartoum n'ont pas déployé les forces de sécurité en temps opportun au Darfour. (Photo fournie)
Amani al-Taweel affirme que les autorités de Khartoum n'ont pas déployé les forces de sécurité en temps opportun au Darfour. (Photo fournie)

«Les tensions persistantes et ancrées depuis longtemps au Darfour ont été aggravées par l'entrée de nouveaux groupes d'Afrique de l'Ouest, l'absence de résolution globale et l'absence de l'une des milices les plus importantes de la liste des signataires de l'accord de Juba», a expliqué Amani al-Taweel à Arab News. «La combinaison de tous ces facteurs rend la situation au Darfour très explosive.»

Le Darfour est devenu synonyme de nettoyage ethnique et de génocide depuis que le conflit a éclaté en 2003, faisant environ 300 000 morts et 2,5 millions de personnes déplacées, selon l'ONU. Les récents combats à Al-Geneina étaient localisés autour d'un camp de personnes déplacées à cause du conflit.

La guerre a éclaté lorsque les rebelles des minorités ethniques du Darfour se sont soulevés contre le gouvernement islamiste du dictateur Omar al-Bachir, qui a répondu en recrutant et en armant une milice à domination arabe connue sous le nom de «Janjawid.»

Depuis le renversement d’Omar al-Bachir en avril 2019 à la suite de manifestations à grande échelle contre son gouvernement, le Soudan connaît une transition fragile. La justice pour le peuple du Darfour a été un cri de ralliement essentiel pour les groupes civils qui ont soutenu la destitution de Bachir après près de trois décennies au pouvoir.

Le Conseil militaire de transition qui l'a remplacé a transféré le pouvoir exécutif en septembre 2019 à un Conseil mixte de souveraineté civilo-militaire et à un Premier ministre civil, Abdallah Hamdok.

Omar al-Bachir, désormais poursuivi par la Cour pénale internationale pour génocide et crimes de guerre présumés, est actuellement détenu et jugé à Khartoum. Mais comme le montre la dernière flambée de violence au Darfour, les blessures de la guerre mettront du temps à cicatriser.

«En théorie, l'accord de paix de Juba est la principale issue pour sortir de ce type de violence», a déclaré Jonas Horner à Arab News, ajoutant qu'il ne peut y avoir de solution militaire à un conflit dont les racines résident dans des différends sur le partage des terres, de l'eau et des ressources.

«Le gouvernement soudanais a dépêché une délégation de haut niveau à Al-Geneina et dans ses environs, qui comprendra principalement des militaires. C’est encore une fois une solution militaire, qui, à mon avis, ne sera pas une réponse durable au problème.» 

Jonas Horner, analyste à l'International Crisis Group

«Il est nécessaire de faire appel aux dirigeants de l'administration locale, qui seront très désireux de mettre fin à la violence. Il est vrai cependant que certaines milices reconnues sont impliquées dans les derniers combats et seront beaucoup moins susceptibles de recevoir des ordres des dirigeants des administrations locales.»

Compte tenu de l’abondante bonne volonté actuelle envers le Soudan, les pays étrangers pourraient-ils jouer un rôle dans le désamorçage de la situation au Darfour? «Du point de vue de la sécurité, il est probablement trop tard pour que la communauté internationale intervienne», précise Jonas Horner. «Le Conseil de sécurité a mis fin au mandat de la Minuad», déclare-t-il, ajoutant que la nouvelle Mission intégrée des nations unies pour l'assistance à la transition au Soudan (Minuats) couvre tout le pays, pas seulement le Darfour.

«Minuats relève du chapitre 6 de la mission de l'ONU, ce qui signifie qu'il n'inclut pas de présence armée. Il reste des soldats de la Minuad afin d’assurer la supervision et la mission de protection pendant la période de retrait, mais je ne pense pas qu’ils seraient utilisés pour soutenir une opération de maintien ou de rétablissement de la paix à Al-Geneina ou au Darfour Sud.»

Dans l’ensemble, le gouvernement Hamdok a été salué pour avoir pris des mesures audacieuses afin d’ouvrir la voie à la reprise politique et économique du Soudan. Le récent retrait du Soudan par les États-Unis de sa liste des États soutenant le terrorisme permettra au pays d'avoir accès aux fonds et investissements internationaux, y compris le Fonds monétaire international.

Des problèmes et des conflits du type de ceux qui ont conduit au nouveau carnage au Darfour ont toutefois le potentiel d'annuler bon nombre de progrès réalisés depuis l'éviction d’Omar al-Bachir.

Twitter: @jumanaaltamimi

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les États-Unis annoncent réduire de moitié leurs effectifs militaires en Syrie

Les États-Unis ont commencé à retirer des centaines de soldats du nord-est de la Syrie, a rapporté le New York Times jeudi. (AFP/File)
Les États-Unis ont commencé à retirer des centaines de soldats du nord-est de la Syrie, a rapporté le New York Times jeudi. (AFP/File)
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  • Cette décision intervient près de trois mois après l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, qui est défavorable depuis longtemps à la présence américaine sur place et prône un retour à une politique isolationniste des États-Unis.
  • La présence américaine en Syrie va être ramenée « à moins d'un millier de soldats dans les mois prochains », sur environ 2 000 actuellement, a déclaré Sean Parnell, le porte-parole du Pentagone, dans un communiqué.

WASHINGTON : Les États-Unis ont annoncé vendredi qu'ils allaient réduire de moitié leur présence militaire en Syrie, estimant avoir lutté avec « succès » contre le groupe État islamique (EI), même si des groupes djihadistes demeurent actifs dans un pays encore fragile.

Cette décision intervient près de trois mois après l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, qui est défavorable depuis longtemps à la présence américaine sur place et prône un retour à une politique isolationniste des États-Unis.

Les États-Unis sont présents sur le sol syrien depuis des années, notamment dans le cadre de la coalition internationale contre l'EI.

La présence américaine en Syrie va être ramenée « à moins d'un millier de soldats dans les mois prochains », sur environ 2 000 actuellement, a déclaré Sean Parnell, le porte-parole du Pentagone, dans un communiqué.

« Cette consolidation démontre les progrès considérables réalisés pour réduire l'attrait et les capacités opérationnelles du groupe Etat islamique, tant dans la région que dans le monde », a-t-il dit, évoquant plus globalement « le succès des États-Unis contre l'EI ».

Arrivé au pouvoir à Washington le 20 janvier, Donald Trump est depuis longtemps sceptique sur la présence militaire en Syrie. Et la chute fin décembre de Bachar al-Assad, remplacé à la tête du pays par une coalition menée par des islamistes, n'a pas changé la donne.

La prise de contrôle de pans entiers de la Syrie et de l'Irak par l'EI à partir de 2014 a déclenché l'intervention d'une coalition internationale menée par les États-Unis, dont l'objectif principal était de soutenir les unités de l'armée irakienne et les Kurdes qui combattaient l'EI au sol par les airs.

Mais Washington a alors aussi déployé des milliers de ses soldats pour soutenir ces troupes locales et mener ses propres opérations militaires.
« L'armée américaine va rester prête à mener des frappes contre ce qu'il reste de l'EI en Syrie », a déclaré vendredi le porte-parole du Pentagone, qui dit maintenir « des capacités importantes dans la région ».

Les États-Unis disposent actuellement d'environ 2 500 soldats en Irak, un chiffre appelé à diminuer.

La sécurité en Syrie reste précaire depuis la chute de Bachar al-Assad, après près de 14 ans d'une guerre déclenchée par la répression violente de manifestations antigouvernementales en 2011.

À la tête de forces de sécurité dominées par d'anciens rebelles islamistes, les autorités syriennes de transition ont la lourde tâche de maintenir la sécurité dans un pays multiethnique et multiconfessionnel où de nombreux groupes armés, parmi lesquels des djihadistes, sont encore présents.
 


L'Arabie saoudite et la France renforcent leur partenariat stratégique dans le domaine de la santé

Le ministre saoudien de la santé, Fahd ben Abdulrahman Al-Jalajel, a rencontré vendredi à Paris des responsables français de la santé afin de réaffirmer et d'approfondir la coopération entre les deux pays dans le domaine de la santé. (SPA)
Le ministre saoudien de la santé, Fahd ben Abdulrahman Al-Jalajel, a rencontré vendredi à Paris des responsables français de la santé afin de réaffirmer et d'approfondir la coopération entre les deux pays dans le domaine de la santé. (SPA)
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  • Fahd ben Abdulrahmane Al-Jalajel en visite en France

PARIS : Le ministre saoudien de la Santé, Fahd ben Abdulrahmane Al-Jalajel, a rencontré vendredi à Paris des responsables français dans le domaine de la santé pour réaffirmer et approfondir la coopération entre les deux pays dans ce secteur, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

Les entretiens entre M. Al-Jalajel, Catherine Vautrin et Yannick Nodder ont porté sur la construction d'un partenariat stratégique mettant l'accent sur la politique de santé publique, le développement des systèmes de santé, la prévention des maladies et la réponse aux situations d'urgence, selon l’agence.

Les deux parties ont fait l'éloge des réformes ambitieuses du secteur de la santé de l'Arabie saoudite dans le cadre de Vision 2030, notamment en matière de santé numérique, de biotechnologie et d'innovation.

Les ministres se sont félicités de la quasi-finalisation d'un accord majeur visant à formaliser la collaboration en matière de soins de santé et ont assisté à la signature de plusieurs protocoles d'accord entre l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et l'Autorité saoudienne du Croissant-Rouge.

Ces accords visent à stimuler la recherche scientifique, l'innovation et les services d'urgence préhospitaliers.

Ils se sont également engagés à renforcer la coopération sur les questions de santé mondiale, notamment la résistance aux antimicrobiens, et ont souligné l'importance de collaborer avec des institutions internationales telles que l'Académie de l'Organisation mondiale de la santé et le Centre international de recherche sur le cancer.

Au cours de sa visite, M. Al-Jalajel a également rencontré des responsables français de haut niveau, notamment Clara Chappaz, ministre de l'Intelligence artificielle et du Numérique, et Laurent Saint-Martin, ministre du Commerce extérieur et de la diaspora française.

Il a également assisté au forum du Conseil d'affaires franco-saoudien, au cours duquel des accords stratégiques ont été signés dans les domaines de la santé numérique, de l'oncologie, de la médecine d'urgence et de la biotechnologie, à l'appui des objectifs de la Vision 2030.

Les deux pays se sont engagés à maintenir un dialogue régulier et à activer des canaux d'action conjoints pour assurer la mise en œuvre efficace de leur partenariat en matière de santé.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Tunisie: entre 13 et 66 ans de prison pour des opposants jugés pour "complot"

Dalila Ben Mbarek (C), avocate et membre du comité de défense des détenus accusés de « complot contre la sécurité de l'État », brandit le signe de la victoire devant le palais de justice de Tunis. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Dalila Ben Mbarek (C), avocate et membre du comité de défense des détenus accusés de « complot contre la sécurité de l'État », brandit le signe de la victoire devant le palais de justice de Tunis. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Vendredi soir, lors de la troisième et dernière audience, plusieurs avocats de la défense ont dénoncé une « mascarade » quand le juge a mis sa décision en délibéré sans réquisitoire ni plaidoiries. 
  • Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, par lequel il s'est octroyé les pleins pouvoirs, défenseurs des droits et opposants dénoncent une régression des libertés en Tunisie, pays qui avait lancé le Printemps arabe en 2011.

TUNIS, TINISIE : Le tribunal de première instance de Tunis a prononcé des peines de prison allant de 13 à 66 ans à l'issue d'un procès pour « complot » contre le président Kais Saied. Les prévenus ont été jugés coupables de « complot contre la sûreté de l'État » et d' « adhésion à un groupe terroriste ».

Parmi les condamnés, des personnalités de l'opposition, des avocats et des hommes d'affaires. Certains étaient déjà emprisonnés, d'autres en liberté ou en exil.

Vendredi soir, lors de la troisième et dernière audience, plusieurs avocats de la défense ont dénoncé une « mascarade » quand le juge a mis sa décision en délibéré sans réquisitoire ni plaidoiries. 

Contrairement aux deux précédentes, l'audience, à laquelle les journalistes internationaux et les diplomates étrangers n'étaient pas conviés, a été particulièrement houleuse et surveillée par la police. Plusieurs accusés étaient accusés de contacts suspects avec certaines ambassades.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, par lequel il s'est octroyé les pleins pouvoirs, défenseurs des droits et opposants dénoncent une régression des libertés en Tunisie, pays qui avait lancé le Printemps arabe en 2011.

À partir du printemps 2023, des dizaines de responsables politiques, avocats, militants des droits, notamment des migrants, et chroniqueurs connus ont été arrêtés en vertu d'un décret réprimant la diffusion de fausses nouvelles, contesté comme prêtant à une interprétation trop large.

Le procès dit « du complot » a commencé le 4 mars. Les accusés sont en détention et doivent s'exprimer en visioconférence. Leurs avocats ont exigé leur présence au tribunal, sans succès. Au moins six d'entre eux ont observé une grève de la faim pour faire valoir ce « droit élémentaire ».

La défense a critiqué le dossier, tandis que l'ONG Human Rights Watch a affirmé que le procès se tenait dans « un contexte répressif ».

En février, le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme avait dénoncé la « persécution des opposants » en Tunisie.

Le gouvernement a répondu en exprimant sa « profonde stupéfaction ».