Plus d'un an s'est écoulé depuis l'apparition de la maladie du coronavirus (Covid-19), et la pandémie fait toujours des ravages dans le monde entier. Les menaces biologiques ne résident pas seulement dans les situations de crise que traverse la santé publique: elles ont également le pouvoir de paralyser des nations entières à travers des récessions économiques, des baisses de productivité, des craintes au niveau de la sécurité internationale et intérieure, des pertes de vies humaines et des souffrances sociales. Il est donc impératif que les dirigeants mondiaux travaillent ensemble pour améliorer les mesures de sécurité sanitaire dans le but de contrer les poussées de cette maladie infectieuse.
Ces dernières années, les épidémies ont servi de signaux d'alarme aux nations. L'épidémie de SRAS de 2003 s'est propagée dans une vingtaine de pays d'Asie, d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Amérique du Sud avant d'être maîtrisée. Le SRAS avait alors contaminé plus de 8 000 personnes et il en avait tué environ 800.
En 2014, l'épidémie du virus Ebola en Afrique de l'Ouest est devenue, dans son genre, la plus importante de l'histoire. Les pays d'Afrique de l'Ouest étaient, à l'époque, mal préparés pour faire face à cette maladie inconnue, disposant de systèmes de détection faibles et de professionnels de la santé qui n’étaient pas formés à la gestion d'une telle maladie; sans parler des bouleversements sociaux et économiques qui ont accompagné l'épidémie. Ces facteurs ont permis à la maladie de se propager largement auprès des populations, jusqu'à ce que des efforts au niveau mondial arrivent à la contrôler.
Poussés par ces menaces biologiques récentes, de nombreux gouvernements ont pris des mesures pour améliorer la sécurité sanitaire nationale dans le but de prévenir, de détecter les menaces graves et d’y apporter une réponse. À titre d’exemple, le gouvernement de Singapour a créé en 2019 le Centre national des maladies infectieuses afin de renforcer ses capacités en termes de prévention et de gestion des maladies infectieuses. Ses travaux se concentrent sur des analyses à long terme et sur une évaluation des risques, ainsi que sur la formation, au niveau de la gestion des épidémies, de la recherche épidémiologique, de la manière de se préparer et de la réponse à apporter aux épidémies.
Ailleurs encore, le gouvernement sud-coréen a investi massivement dans les technologies de santé numériques pour surveiller les maladies infectieuses et gérer les épidémies. Le tableau de bord détaillé des données épidémiologiques a permis au gouvernement de réduire avec succès les taux de contamination de Covid-19 en suivant les patients, en identifiant les zones de contamination et en alertant les citoyens.
La notion de sécurité sanitaire fait essentiellement référence à la capacité d'un pays à prévenir l'émergence de pandémies, à détecter et à signaler les menaces biologiques, à garantir des réponses rapides, à gérer un solide système de santé doté d’une infrastructure suffisante et de professionnels de santé bien formés, à se conformer aux normes sanitaires internationales et à mesurer sa vulnérabilité par rapport aux menaces biologiques. L'évaluation la plus complète des capacités de sécurité sanitaire se trouve dans l'indice de sécurité sanitaire mondiale (Global Health Security Index), qui analyse dans ce domaine cent quatre-vingt-quinze pays. Il est publié par le Johns Hopkins Center for Health Security, l'Economist Intelligence Unit et la Nuclear Threat Initiative.
Son rapport de 2019 a révélé qu'aucun pays n'était parfaitement équipé face aux épidémies ou aux pandémies, en raison de lacunes majeures dans leurs systèmes de santé publique. À titre d’exemple, moins de 7% des pays se classent dans le groupe de tête quand est évaluée leur capacité à empêcher l'émergence de pandémies. En outre, seuls 20% des pays ont obtenu de bons résultats en matière de surveillance, de détection et de suivi de l’émergence des épidémies, tandis que moins de 5% disposaient de systèmes de santé publique et de gouvernance capables de réagir rapidement aux épidémies et à limiter leur propagation.
Le classement a également mis en évidence les niveaux de sécurité sanitaire dans les pays arabes, l'Arabie saoudite se trouvant en tête de la région en termes de capacité, suivie des Émirats arabes unis et du Koweït. Malheureusement, les chiffres de nombreux autres États arabes les classent parmi les pays les moins préparés, d’importantes lacunes rendant leur équipement peu efficace pour faire face aux épidémies.
Il est clair que les gouvernements du monde entier doivent s'engager sérieusement à améliorer leur sécurité sanitaire. Cela peut être fait, tout d'abord, en créant une agence spécialisée qui serait responsable du suivi et de la gestion des épidémies de maladies infectieuses, en plus du fait de mener des recherches épidémiologiques indispensables, de rassembler de nouvelles connaissances sur les diagnostics médicaux et les traitements liés aux maladies infectieuses, de former le personnel médical, d’assurer une coordination avec les organismes publics, de s'engager auprès des communautés, et de concevoir des opérations efficaces en matière de santé publique.
Les gouvernements devraient veiller à ce que les systèmes de santé soient entièrement équipés d’appareils médicaux et d'équipements individuels de protection et à mettre en place des pratiques de contrôle des infections. Un nombre suffisant de professionnels de la santé devrait également être disponible et avoir accès à une formation spécialisée pour prévenir la maladie, s’occuper des patients atteints de maladies infectieuses et les traiter, en particulier pendant les épidémies ou les pandémies. Par ailleurs, il est important de disposer d'une équipe multifonctionnelle et qualifiée, composée de médecins, d'infirmières, d'épidémiologistes, de responsables de la santé publique, de personnel de laboratoire, de travailleurs de santé communautaires, ainsi que de travailleurs sociaux, qui collaborant pour mettre en œuvre une stratégie globale de gestion des épidémies. En parallèle, une couverture sanitaire universelle devrait être disponible pour les citoyens et les résidents, afin d'atténuer la propagation des maladies infectieuses.
Davantage d'investissements devraient être consacrés à la recherche dans ce domaine afin d’étudier les stratégies efficaces de gestion des épidémies ou des pandémies sous différents angles, tels que l'industrie et le commerce, les relations internationales, l'immigration, la sécurité et les services sociaux. Les gouvernements et les entreprises du secteur privé devraient être encouragés à investir dans une recherche axée sur le développement de vaccins, la gestion des cas et les programmes de soin, la création de dispositifs médicaux vitaux et de médicaments efficaces.
En outre, il est important d’investir dans les technologies de santé numériques – c’est-à-dire les tableaux de bord de données de santé en temps réel, et la recherche épidémiologique –, qui peuvent donner aux décideurs des informations sur la gestion des épidémies.
Enfin, il est impératif que les pays travaillent en étroite collaboration pour renforcer la sécurité sanitaire nationale et fournir des données de «biosurveillance» mondiale en temps réel, des recherches sanitaires actualisées, des conseils techniques et des systèmes d'intervention d'urgence. Il faudrait également tendre la main au secteur privé et à la société civile à cet égard, car ils ont grandement contribué à atténuer les épidémies par le passé. Par exemple, pendant la pandémie de Covid-19, ils ont participé aux efforts de santé mondiaux, investi dans des innovations technologiques, fourni des produits et des services essentiels aux communautés touchées, et permis aux employés de travailler à distance.
En abordant ces mesures de sécurité sanitaire essentielles, les pays peuvent renforcer leurs capacités afin de mieux faire face à la pandémie actuelle de la Covid-19 et prévenir également de futures épidémies.
Sara al-Mulla est une fonctionnaire émiratie qui s’intéresse à la politique de développement humain et à la littérature pour enfants. Elle peut être contactée sur www.amorelicious.com.
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Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com