Gaza: départ du Hamas ou déplacement de ses habitants?

Des Palestiniens passent devant un tas d'ordures dans la ville de Gaza, le mercredi 12 février 2025. (Poto AP)
Des Palestiniens passent devant un tas d'ordures dans la ville de Gaza, le mercredi 12 février 2025. (Poto AP)
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Publié le Vendredi 14 février 2025

Gaza: départ du Hamas ou déplacement de ses habitants?

Gaza: départ du Hamas ou déplacement de ses habitants?
  • Le Hamas aura alors une nouvelle occasion de corriger ses erreurs passées et de prendre une décision responsable dans l'intérêt de deux millions de personnes 
  • Malgré les déclarations de victoire, les habitants de Gaza connaissent la vérité mieux que quiconque

Comment les défis auxquels fait face Gaza sont-ils passés si rapidement de l'élimination du Hamas au déplacement forcé de l'ensemble de sa population?

Le Hamas a une fois de plus mal calculé les développements futurs, notamment en ce qui concerne le retour de Donald Trump à la présidence des États-Unis. Le groupe a bloqué ou retardé les négociations pendant près de neuf mois avant de parvenir à une résolution. Cependant, avec le changement de leadership à Washington, les chances du Hamas ont diminué, tandis que les souffrances des habitants de Gaza se poursuivent.

Le président Trump ne ressemble pas à son prédécesseur, Joe Biden. Il a décidé de défaire tout ce que son prédécesseur avait tenté de réaliser. Un exemple clair de cela est qu'au lieu de se concentrer sur l'élimination du Hamas, il a introduit l'idée de déplacer la population de Gaza.

Certes, le projet de Trump d'expulser deux millions de personnes est irréaliste, viole le droit international et manque de soutien, même au sein de sa propre administration et du Congrès. Toutefois, cela ne signifie pas nécessairement qu'il sera dissuadé de tenter de le mettre en œuvre, à moins que les dirigeants arabes, lors de leurs prochaines réunions avec lui, ne parviennent à le persuader d'abandonner cette idée.

Au départ, il s'agissait d'arrêter la destruction de Gaza et de la libérer à la fois d'Israël et du Hamas. Mais aujourd'hui, la situation a dégénéré en une autre crise qui menace Gaza, la Cisjordanie, l'Égypte et la Jordanie. Même si Trump revient finalement sur sa proposition, tout conflit avec l'Égypte et la Jordanie aurait de graves répercussions sur ces deux pays et sur l'ensemble de la région.

Avec la transition présidentielle aux États-Unis et les efforts fructueux de Benjamin Netanyahou pour rétablir ses relations avec Trump, je crains que Gaza ne doive faire face à un deuxième cycle de guerre. Le Hamas refuse de partir, tandis qu'Israël a toujours le désir et la capacité militaire de continuer à se battre pendant une année supplémentaire.

En fin de compte, Israël parviendra à éliminer ce qui reste du Hamas, ayant déjà détruit ou tué une grande partie de ce qui restait dans la bande de Gaza.

Le Hamas aura alors une nouvelle occasion de corriger ses erreurs passées et de prendre une décision responsable dans l'intérêt des deux millions de personnes qui ont enduré d'immenses souffrances à la suite de son attaque du 7 octobre 2023. Malgré les déclarations de victoire, les habitants de Gaza connaissent la vérité mieux que quiconque. L'Autorité palestinienne a repris le contrôle de Gaza en 2005 et, en vertu d'un accord, les colonies ont été démantelées et tous les colons ont été expulsés.
Après les destructions subies par Gaza, le Hamas a la capacité de contrecarrer les efforts de déplacement massif de sa population. Il peut négocier son propre départ en échange de l'arrêt du plan de Trump. Le choix est donc soit le Hamas, soit deux millions de Palestiniens.

Le Hamas s'est encore une fois trompé dans ses calculs, notamment en ce qui concerne le retour de Donald Trump à la présidence américaine.

                                                  Abdulrahman Al-Rashed

Les Israéliens considèrent le mouvement armé comme une vulnérabilité qu'ils peuvent exploiter pour faire avancer leur agenda. Dans le même temps, ils cherchent à empêcher tout renforcement de l'Autorité palestinienne ou la mise en place d'une gouvernance non israélienne à Gaza, ainsi que tout progrès vers une solution à deux États. Le Hamas, ou du moins son talon d'Achille – son entêtement – aidera en fin de compte Netanyahou à obtenir le soutien dont il a besoin de la part de Trump pour ses projets militaires et ses changements politiques, qu'il pourrait toujours souhaiter poursuivre.

Le Hamas privilégiera-t-il la responsabilité plutôt que le populisme et prendra-t-il les mesures nécessaires pour faire passer le plan de Trump du déplacement à la reconstruction?

En outre, il n'y aura pas de financement pour la reconstruction de Gaza, quelles que soient les promesses faites, tant que les donateurs internationaux et arabes croiront que la possibilité d'une nouvelle guerre reste ouverte. Dans le passé, des centaines de millions de dollars ont été dépensés pour reconstruire Gaza, mais les conflits avec Israël ont détruit tout ce qui avait été construit.

Abdulrahman Al-Rashed est un journaliste et un intellectuel saoudien. Il est l'ancien directeur général de la chaîne d'information Al-Arabiya et l'ancien rédacteur en chef d'Asharq Al-Awsat, où cet article a été initialement publié. 

X: @aalrashed

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com