La guerre de Gaza touche à sa fin, et il est désormais temps de clore les débats à son sujet. Beaucoup de choses ont été dites, qu'elles relèvent de la vérité ou de l'inexactitude... Quelle est donc la raison de prolonger des discours déjà tenus ?
Peut-être que Gaza, à travers les horreurs endurées par sa population, peut devenir un tournant pour la cause palestinienne et pour la région. Il est impératif d’apporter notre soutien à cette terre éprouvée, afin de franchir cette étape cruciale. Un tel soutien agirait comme un catalyseur, ouvrant la voie à un avenir meilleur et permettant l’émergence d'une nouvelle phase, après les répercussions de Gaza et des développements à venir.
La guerre de Gaza a permis de réaliser l'inattendu : l'effondrement d'un système régional et l'émergence d'une réalité géopolitique différente. Sans elle, la Syrie, le Liban et la région auraient pu continuer à être dirigés par des autorités qui incitent au chaos et aux guerres pendant une autre décennie.
Les guerres les plus longues et les plus dures du conflit avec Israël ont pris fin, et il est temps d'apporter un soutien et une assistance humanitaires à deux millions de personnes.
L'une des principales leçons que nous enseigne Gaza est qu'aucune question ne peut être laissée sans réponse, sous prétexte de la confier à d'autres. Il ne peut y avoir de paix pour Israël sans paix pour ses voisins. La signature d'un accord de paix partiel est insuffisante, car elle ne fait que conduire à des guerres partielles. Même l'accord de paix le plus juste et le plus équitable ne pourra réussir s'il n'est pas accompagné d'un véritable effort de communication, face à l'hostilité culturelle et médiatique qui persiste.
La guerre de Gaza est peut-être terminée, même si l'on s'attend à ce que les tirs sporadiques et les affrontements cessent bientôt.
Gaza peut d'abord servir de porte d'entrée à la paix entre les Palestiniens eux-mêmes, en conduisant à un accord sur une autorité centrale et en mettant fin au fossé entre Gaza et Ramallah qui persiste depuis 2007. Ce pourrait être le point d'entrée pour initier la solution des deux États, un projet sur lequel l'Arabie saoudite s'est engagée à travailler, tandis qu'Israël a juré de l'empêcher. En effet, tout projet de paix commence par un rejet et se termine par une réconciliation et des poignées de main.
Ce qui s'est passé en octobre 2023 pourrait être similaire à la guerre d'octobre 1973. Cette victoire était limitée : l'Égypte a repris 20 kilomètres au-delà du canal de Suez pendant la guerre mais, grâce aux accords de Camp David, elle a récupéré l'ensemble du Sinaï, une région trois fois plus grande qu'Israël.
La guerre de Gaza a profondément transformé la région, en affaiblissant considérablement la puissance et le leadership du Hezbollah, en précipitant la chute du régime de Bachar al-Assad, et en mettant fin au rêve d'expansion et de domination de l'Iran sur le monde arabe oriental. Nous nous trouvons désormais face à une nouvelle opportunité véritable pour des initiatives de paix régionales et la fin des grandes menaces et des conflits.
Tous les regards sont tournés vers l'Iran, qui reste sous le choc des événements importants qu'il a subis et qu'il continue de subir. Ce qu'il a construit en quarante ans et acquis par la force - terre, influence et mandataires - s'est évaporé l'année dernière. Aujourd'hui, l'Iran se trouve dans une phase de réévaluation, qui se traduit par des discussions franches dans ses médias et probablement par des débats plus profonds dans des chambres closes sur ses prochaines étapes. Deux voies s'offrent à l'Iran : la première consiste à s'adapter à la nouvelle réalité en recherchant la paix et en coopérant avec les États arabes pour soutenir les Palestiniens dans leur projet de paix. Une telle implication soutiendrait la cause palestinienne et aiderait son peuple à réaliser ses aspirations sans qu'il soit nécessaire de recourir à l'effusion de sang, à la destruction et au gaspillage de milliards.
La seconde voie consiste à reconstruire ses capacités militaires et à engager des conflits dans toute la région pour récupérer la Syrie, le Liban et Gaza. Un tel scénario serait extrêmement coûteux, et Téhéran aurait des difficultés à obtenir le soutien de sa population, déjà lourdement affectée par les sanctions économiques, sanctions que le président élu Donald Trump et sa nouvelle administration ont promis d'intensifier. La survie même du régime pourrait alors être mise en péril.
Face à cette nouvelle situation, il est essentiel de faire preuve de réalisme. L'année a débuté sur une note positive : le Liban a adopté un nouveau système, la Syrie semble s'engager dans une direction différente, le Hamas devrait intégrer une Autorité palestinienne unifiée, et des signes indiquent que l'Irak cherche à contenir, voire à éliminer, les milices.
Ces changements ont eu un coût élevé, comme l'ont montré les événements à Gaza, au Liban et en Syrie au cours de ces deux décennies sanglantes. Mais ces sacrifices conduiront-ils à une récolte fondée sur la fin des troubles, du chaos et de l'occupation, tout en parvenant à un consensus régional ?
Avant la guerre de Gaza, un tel scénario semblait impensable. Aujourd'hui, il ne l'est plus.
Abdulrahman al-Rashed est un journaliste et intellectuel saoudien. Il est l’ancien directeur général de la chaîne d’information Al-Arabiya et l’ancien rédacteur en chef d’Asharq al-Awsat, où cet article a d’abord paru.
X: @aalrashed
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com