Ces dernières semaines, plusieurs influenceurs algériens résidant en France ont été arrêtés pour avoir publié sur TikTok et d'autres réseaux des vidéos incitant à la violence ou proférant des menaces, en particulier à l'encontre des opposants au président algérien Abdelmadjid Tebboune. Ces vidéos appelaient à commettre des attentats en France et à agresser physiquement les détracteurs du gouvernement algérien, allant jusqu'à proférer des menaces de mort indirectes.
Inconnus avant ces incidents, les influenceurs Zazou Youssef, Imad Tintin et Sofia Benlemmane ont été placés en garde à vue à Lyon pour des propos haineux et des menaces de mort qu'ils avaient partagés en ligne. Les menaces qu'ils ont proférées et les arrestations qui ont suivi ne sont que la partie émergée de l'iceberg des relations actuelles entre la France et l'Algérie. Les relations diplomatiques entre les deux pays, qui sont loin d'être au beau fixe ces dernières années, se sont récemment détériorées à cause du Sahara occidental et de la détention en Algérie de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal.
Les autorités françaises ont réagi avec fermeté, soulignant que les réseaux sociaux n'étaient pas des espaces sans loi et que de tels appels à la violence étaient inacceptables. Malgré des relations tendues, le niveau d'animosité entre les deux pays situés de part et d'autre de la Méditerranée n'a jamais été aussi élevé au cours de la dernière décennie.
Il y a eu sans doute des maladresses du côté de la diplomatie française et des volte-face dans les relations pendant cette période, comme des pressions sans volonté ni capacité de les soutenir, puis une réouverture sans raison valable ou parce que les négociations sur un front lié étaient dans l'impasse. Bref, il n'y a pas eu de cohérence de la part de Paris dans ses relations avec l'Algérie. Et sur le sujet important de son colonialisme, la France a eu une politique peu claire, passant de reconnaissances en réfutations.
Le niveau d'animosité entre les deux pays n'a jamais été aussi élevé au cours de la dernière décennie
Khaled Abou Zahr
Les relations franco-algériennes ne peuvent être dissociées des liens plus larges entre la France et l'Afrique, qui se sont également dégradés. C'est pourquoi, malgré l'apaisement des relations, il est urgent de remettre les compteurs à zéro entre Paris et Alger. En outre, la focalisation constante sur l'énergie et les ressources naturelles n'aide pas.
Il ne fait aucun doute que l'orientation récente de la politique étrangère de l'Algérie diverge de celle du bloc occidental. Je ne sais pas s'il s'agit d'une véritable politique ou d'un cas de manœuvre alors que le monde se transforme dans le nouvel équilibre du XXIe siècle. Quoi qu'il en soit, la France doit initier une approche plus large de l'Algérie, y compris la proposition d'un véritable partenariat afin d'éviter que le détachement de l'Occident ne devienne une réalité. Il en va de même pour l'Afrique, dont la position géopolitique est en train de fondre comme un glaçon.
Trouver un terrain d'entente et favoriser la prospérité économique est le meilleur moyen de mettre de côté les conflits politiques. Une vision plus large et de nouveaux objectifs, avec l'avantage d'une croissance pour tous, valent mieux que n'importe quelle déclaration sur l'histoire de la colonisation. Au siècle dernier, la France et l'Allemagne, qui s'étaient affrontées pendant des centaines d'années, ont pu trouver un terrain d'entente et construire ensemble l'Union européenne, en commençant par la coopération économique. Cela peut constituer une excellente étude de cas.
Trouver un terrain d'entente et construire la prospérité économique est le meilleur moyen de mettre de côté les conflits politiques
Khaled Abou Zahr
Les récentes tensions sont apparues à la suite de la reconnaissance par la France de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. Et, si l'on veut dire les choses en toute transparence, les médias français semblaient dire: «Bien fait pour toi, Alger.»
Pourtant, malgré les tensions actuelles, une nouvelle approche devrait être proposée. Et puisque la France s'est positionnée dans un dossier Alger-Rabat, il devrait également y avoir une initiative positive autour de la recherche d'un accord entre ces deux voisins nord-africains. La France pourrait peut-être organiser un sommet pour proposer un accord de coopération économique sur la côte atlantique.
L'utilisation de la décision française sur le Sahara occidental pour tenter d'humilier l'Algérie est malheureuse et de mauvais goût. Les Algériens sont des gens fiers et ce n'est pas quelque chose qu'une politique française devrait essayer de faire. Mais la France devrait, sans hésitation, toujours prendre des mesures décisives et puissantes contre les menaces qui pèsent sur sa sécurité nationale.
À mon avis, la France a une occasion historique d'inverser la tendance, non seulement avec l'Algérie, mais aussi avec l'ensemble du continent africain. Plus qu'un mea culpa sur les années de colonialisme ou une position défensive hésitante, il faut un plan solide pour une collaboration future.
Khaled Abou Zahr est le fondateur de SpaceQuest Ventures, une plateforme d'investissement axée sur l'espace. Il est PDG d'EurabiaMedia et rédacteur en chef d'Al-Watan Al-Arabi.
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com