Les politiciens américains accordent plus d'importance à Israël qu'aux Américains sinistrés

Israël est le plus grand bénéficiaire de l'aide étrangère des États-Unis. Il a reçu plus de 310 milliards de dollars (1 dollar = 0,91 euro, réajustés en fonction de l'inflation) depuis sa création en 1948. Ce financement a permis à Israël d'armer et d'entraîner ses forces pour mener des guerres et imposer un régime militaire sur les territoires qu'il occupe.

En réalité, Israël «utilise des armes de fabrication américaine» pour mener ses guerres «depuis des décennies», selon le Council on Foreign Relations. «Le flux extraordinaire d'aide a inclus des munitions de chars et d'artillerie, des bombes, des roquettes et des armes légères», a déclaré le Conseil dans un rapport publié cette année.

Au cours des années précédant le 7 octobre 2023, chaque fois que le Hamas attaquait Israël, il répondait par des frappes répétées utilisant des armes américaines, ciblant et tuant des centaines de milliers de Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie. Il a toujours été convaincu qu'il n'aurait jamais à craindre de manquer de bombes, de missiles, de chars, de blindés ou de balles. Au cours de la dernière décennie, par exemple, l'Amérique a versé à Israël une somme annuelle de 3,8 milliards de dollars.

Chaque fois que les victimes de la violence israélienne répondent par la violence, elles sont qualifiées de «terroristes», ce qui déclenche une situation d'urgence. L'Amérique procède alors à l'octroi d'une aide militaire encore plus importante à Israël. Depuis l'attaque du Hamas le 7 octobre, par exemple, l'Amérique a approuvé des dizaines de milliards de dollars de financement supplémentaire pour Israël.

Les responsables américains n'ont jamais hésité à assurer un financement à Israël parce qu'il leur permet de gagner des voix

                                                  Ray Hanania

Les présidents, les membres du Congrès et de nombreux responsables locaux qui reçoivent des dons massifs pour leur campagne et des voyages en Israël entièrement ou partiellement payés par des comités d'action politique pro-israéliens n'ont jamais hésité à soutenir le financement d'Israël parce qu'il leur permet de gagner des voix. Malheureusement, ces responsables américains n'ont pas toujours la même préoccupation pour leurs propres citoyens, surtout lorsqu'il s'agit de financement.

Par exemple, tous les Américains âgés d'au moins 62 ans reçoivent des prestations mensuelles de la sécurité sociale, qui leur restituent une partie des impôts qu'ils ont versés à leur gouvernement lorsqu'ils ont travaillé pendant la période de référence de 45 ans. Le système de sécurité sociale est au bord de l'effondrement mais, plutôt que de lui donner les 100 milliards de dollars nécessaires pour le renforcer et assurer sa continuité, les membres du Congrès suggèrent de vouloir le «réorganiser».

Le mois dernier, les habitants de nombreux États du Sud, dont la Floride, la Géorgie, la Caroline du Sud et la Caroline du Nord, ont été frappés de terreur par l'ouragan Hélène – le plus meurtrier à frapper le continent américain depuis Katrina en 2005. Hélène a causé des dégâts catastrophiques, tuant plus de 220 personnes, détruisant des villes et des communautés entières et privant des dizaines de milliers d'Américains d'électricité et d'eau potable.

Le montant total des dégâts et des pertes économiques causés par ledit ouragan est estimé à plus de 250 milliards de dollars, sans compter l'argent nécessaire pour aider les milliers de familles qui ont besoin d'un abri immédiat, de nourriture, de vêtements et de soutien.

Pourtant, les membres du Congrès, républicains et démocrates, qui se sont ralliés sans s'engager dans un débat politique pour accélérer l'octroi de fonds à Israël, sont aujourd'hui engagés dans une querelle publique embarrassante au sujet de l'aide aux victimes de l'ouragan Hélène.

Contrairement à Israël, qui peut faire appel à la Maison Blanche ou au Congrès chaque fois qu'il a besoin d'argent pour brutaliser les Arabes et les musulmans, les Américains doivent passer par une agence gouvernementale bureaucratique, la Federal Emergency Management Agency (Agence fédérale de gestion des situations d'urgence).

La Fema est censée venir en aide aux Américains victimes de tragédie, généralement à la suite de catastrophes naturelles. Malheureusement, elle n'a pas les moyens de s'occuper des victimes de l'ouragan Hélène, ce qui a créé un fossé entre les opportunistes politiques qui utilisent ce manque à gagner pour saper les chances électorales de leurs rivaux.

Hélène a frappé les côtes américaines le 26 septembre avant de passer du statut d'ouragan à celui de tempête tropicale le lendemain. Ce n'est que le 2 octobre que le président Joe Biden s'est rendu en Caroline du Nord pour constater les dégâts. Après la visite en hélicoptère du président, la Maison Blanche et la Fema ont annoncé qu'elles ne débloquaient que 20 millions de dollars pour venir en aide aux victimes.

Le lendemain, le président républicain de la Chambre des représentants, Mike Johnson, a dénoncé le manque d'efforts de M. Biden et de la Fema. Biden a alors augmenté le financement à 45 millions de dollars. Ironiquement, Mike Johnson et nombre de ses collègues républicains avaient voté, le 25 septembre, contre l'octroi de 20 milliards de dollars supplémentaires à la Fema, mais le projet de loi a tout de même été adopté.

Les membres du Congrès sont aujourd'hui engagés dans une querelle publique embarrassante au sujet de l'aide aux victimes de l'ouragan Hélène.

                                                    Ray Hanania

Le secrétaire à la sécurité intérieure, Alejandro Mayorkas, a déclaré que la Fema serait encore à court d'argent bien avant la fin de la saison des ouragans, qui se poursuivra tout au long du mois de novembre.

Les Américains obtiendront-ils les fonds nécessaires pour lutter contre les ravages catastrophique causés par l'ouragan Hélène – et l'ouragan Milton qui devrait frapper la Floride mercredi – aussi rapidement qu'Israël obtient l'argent nécessaire pour poursuivre son génocide à Gaza, ses attaques contre le Hezbollah au Liban et sa menace de guerre nucléaire contre l'Iran?

Si vous écoutez le débat politique aux États-Unis aujourd'hui, les Américains qui ont besoin d'aide doivent se préparer à une lutte longue et interminable pour survivre. Le Congrès est actuellement en vacances et ne se réunira qu'après les élections du 5 novembre, il est donc peu probable que des fonds supplémentaires soient approuvés.

Toutefois, il n'est pas nécessaire que le Congrès soit en session pour que la Maison Blanche accorde une aide d'urgence supplémentaire à Israël. Il ne fait aucun doute qu'en cas de demande, les fonds destinés à Israël seraient acheminés plus rapidement que l'aide aux Américains dans le besoin.

Il faut parfois des mois pour obtenir de l'argent de la Fema. Lorsque ma propre maison a été inondée en 1997, il m'a fallu trois mois pour obtenir 50 000 dollars pour la réparer. J'ai dû faire appel à des proches pour réparer les dégâts jusqu'à ce que l'argent de la Fema me parvienne.

Je doute qu'Israël doive un jour patienter avant d'obtenir de l'argent américain afin d'alimenter ses guerres et ses frappes sur des cibles arabes et musulmanes.

Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur primé de la mairie de Chicago. Il peut être joint sur son site Web personnel à l’adresse suivante: www.Hanania.com.

X: @RayHanania

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com