Avec sa géographie variée et ses conditions climatiques uniques, l’Iran est particulièrement vulnérable aux effets néfastes du changement climatique. Ces dernières années, le pays a été confronté à de nombreux problèmes liés au climat, allant des sécheresses prolongées et de la pénurie d'eau aux phénomènes météorologiques extrêmes et à la dégradation des écosystèmes. Il est très important d’examiner les raisons profondes qui accentuent ces difficultés et de proposer des solutions concrètes pour en atténuer l’impact.
Selon un rapport publié par la World Weather Attribution, la sécheresse qu'a connue l'Iran entre 2019 et 2023 représente, dans les conditions climatiques actuelles, un phénomène qui se produit une fois tous les cinq ans. Cependant, en l’absence de l’impact du changement climatique, il s’agirait d’un phénomène rare qui ne se produirait qu’une fois tous les quatre-vingts ans.
Des vagues de chaleur sans précédent, des périodes de sécheresse et l’épuisement progressif des volumes d’eau obligent chaque année des dizaines de milliers d’Iraniens à rechercher de nouveaux habitats. Parmi ces migrants climatiques se trouvent des personnes issues de milieux agricoles, ouvriers et pêcheurs, ainsi que leurs familles, quittant massivement les régions rurales pour les centres urbains iraniens à la recherche de nouvelles sources de subsistance.
La situation géographique de l’Iran et sa diversité climatique le rendent vulnérable à un large éventail de risques liés au climat. L’une des conséquences les plus importantes du changement climatique en Iran est l’aggravation de la pénurie d’eau et des sécheresses. Avec une grande partie de son territoire déjà classée aride ou semi-aride, l’Iran dépend fortement de ses ressources en eau limitées pour l’agriculture, l’industrie et la consommation domestique. Cependant, la hausse des températures et une pluviométrie irrégulière ont entraîné une diminution des précipitations, une réduction de l’enneigement dans les régions montagneuses, et une augmentation des taux d’évaporation, aggravant ainsi la raréfaction de l’eau dans tout le pays.
«L’une des conséquences les plus importantes du changement climatique en Iran est l’aggravation de la pénurie d’eau.»
Dr Majid Rafizadeh
Plus fondamentalement, le secteur agricole, qui constitue l’épine dorsale de l’économie iranienne et emploie une partie importante de sa population, est particulièrement vulnérable aux effets du changement climatique. Les sécheresses et la pénurie d'eau ont entraîné une diminution des rendements agricoles, une perte de terres arables et une désertification accrue, menaçant la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance. En outre, les périodes de chaleur extrême et les changements climatiques ont perturbé les pratiques agricoles traditionnelles, obligeant certains agriculteurs à s’adapter à de nouvelles techniques agricoles ou à subir d’importantes pertes économiques.
Il est important de souligner qu’outre la pénurie d’eau et son impact sur l’agriculture, l’Iran est également confronté à des phénomènes météorologiques extrêmes plus fréquents et plus graves, notamment des vagues de chaleur, des tempêtes et des crues soudaines. Ces phénomènes présentent non seulement des risques immédiats pour les vies humaines et les infrastructures, mais ils ont également des conséquences à long terme sur la santé publique, la stabilité économique et la durabilité environnementale. Par ailleurs, le changement climatique contribue à la dégradation des écosystèmes uniques de l’Iran, notamment ses forêts, ses zones marécageuses et ses habitats marins, réduisant davantage encore la biodiversité et les services écosystémiques.
Même si le changement climatique est un phénomène mondial provoqué principalement par les activités humaines, certains facteurs aggravent ses conséquences en Iran. Le premier problème est lié à la mauvaise gestion de l’eau. Des pratiques de gestion de l’eau inefficaces, des infrastructures obsolètes, et la surexploitation des ressources en eaux souterraines ont contribué à la rareté et à l’épuisement de l’eau en Iran. De plus, des techniques d’irrigation improductives et un manque d’investissement dans les mesures de conservation de l’eau ont encore mis à rude épreuve les ressources en eau, aggravant ainsi les effets du changement climatique.
Il est également essentiel de noter que l’économie iranienne dépend fortement des combustibles fossiles, en particulier du pétrole et du gaz naturel, qui contribuent largement aux émissions de gaz à effet de serre. La dépendance du pays à l’égard des revenus des combustibles fossiles a entravé les efforts de transition vers des sources d’énergie plus propres et plus durables, maintenant ainsi son économie à forte intensité de carbone et aggravant le changement climatique.
Le troisième problème est que la croissance rapide de la population et l’urbanisation galopante de l’Iran ont exercé une pression supplémentaire sur les ressources naturelles et les infrastructures, accentuant ainsi la dégradation de l’environnement du pays et sa vulnérabilité aux risques liés au climat. L’expansion urbaine non planifiée, les infrastructures inadéquates et un mauvais aménagement du territoire ont également fait en sorte que la population se trouve de plus en plus exposée aux aléas climatiques, tels que les inondations, les glissements de terrain et les vagues de chaleur.
«Afin de lutter contre le changement climatique en Iran, une approche globale et multidimensionnelle est nécessaire.»
Dr Majid Rafizadeh
Afin de lutter contre le changement climatique en Iran, une approche globale et multidimensionnelle est nécessaire. Une approche qui s’attaque aux raisons profondes de la vulnérabilité et renforce la résistance face à ses impacts. Un exemple serait d’établir des stratégies de gestion durable de l’eau. Adopter des technologies permettant d'économiser l'eau, promouvoir des pratiques d’irrigation efficaces, investir dans la modernisation des infrastructures relatives à l’eau et appliquer des réglementations visant à empêcher la surexploitation des ressources en eaux souterraines, toutes ces initiatives contribueraient à réduire la pénurie d’eau et à améliorer la sécurité hydrique en Iran.
En outre, il est nécessaire de passer aux énergies renouvelables. Accélérer la transition vers des sources d’énergie renouvelable, telles que l’énergie solaire, éolienne et hydroélectrique peut réduire la dépendance de l’Iran aux combustibles fossiles, diminuer les émissions de gaz à effet de serre et promouvoir l’indépendance énergétique et la durabilité.
La promotion de pratiques agricoles intelligentes face au climat, telles que des variétés de cultures résistantes à la sécheresse, des techniques de conservation des sols et des systèmes d’irrigation économes en eau peut renforcer la résistance du secteur agricole iranien face aux effets du changement climatique. Investir dans la recherche agricole et les services d’encadrement, offrir des motivations financières pour encourager les pratiques agricoles durables et renforcer les régimes d’assurance agricole sont des solutions qui peuvent soutenir les efforts d’adaptation.
Plus important encore, la protection et la restauration des écosystèmes naturels de l’Iran, notamment les forêts, les zones marécageuses et les zones côtières peuvent améliorer la biodiversité, les services écosystémiques et la résistance aux effets du changement climatique. Cela signifie que la mise en œuvre de plans de gestion des zones protégées, l’application des réglementations environnementales et la promotion d’initiatives de conservation communautaires peuvent contribuer à préserver le précieux patrimoine naturel de l’Iran.
Enfin, le renforcement des structures de gouvernance climatique, l’amélioration des capacités des institutions et la promotion de la participation des parties intéressées peuvent renforcer les mesures efficaces d’adaptation et d’atténuation du changement climatique en Iran.
En bref, le changement climatique pose des défis importants à la société iranienne, aggravant la pénurie d’eau, les phénomènes météorologiques extrêmes et la dégradation des écosystèmes, influant tous sur l’agriculture de la région. Relever ces défis nécessite des efforts concertés pour atténuer les émissions de gaz à effet de serre, renforcer la résistance face aux effets climatiques et promouvoir des pratiques de développement durable.
Afin d'atténuer l'impact du changement climatique et de construire un avenir plus durable et plus résistant pour le peuple iranien et la planète, il est nécessaire de mettre en œuvre des stratégies de gestion durable de l'eau, de passer à des sources d'énergie renouvelables, de promouvoir une agriculture résistante au climat, de conserver et rétablir les écosystèmes, et de renforcer la gouvernance et les capacités climatiques.
Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard.
X: @Dr_Rafizadeh
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement le point de vue d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com