TERRITOIRES PALESTINIENS: Des centaines de personnes, poussées par la faim, fuient dimanche le nord de la bande Gaza, alors que des discussions sur une trêve entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas se déroulent au Qatar, après des négociations en France et en Egypte.
La situation humanitaire ne cesse d'empirer dans le territoire palestinien où 2,2 millions de personnes, soit l'immense majorité de la population, sont menacées d'une "famine de masse", selon l'ONU.
L'aide, qui entre au compte-gouttes par le terminal de Rafah, à l'extrême sud de Gaza, est soumise au feu vert d'Israël et son acheminement vers le nord est presque impossible en raison des destructions et des combats.
Les affrontements se sont poursuivis dans la nuit à Khan Younès (sud) mais aussi à Beit Lahia et Zeitoun (nord), et c'est le manque de nourriture qui pousse également la population au départ, un correspondant de l'AFP faisant état dimanche de centaines de personnes quittant le nord, où 300.000 personnes risquent la famine selon l'ONU, vers le centre de la bande de Gaza.
Parmi elles, Samir AbdRabbo, 27 ans, est arrivé à Nousseirat (centre) dimanche matin avec sa fille d'un an et demi.
«Dieu, notre seul espoir»
"Je suis venu à pied (...) Je ne peux décrire le genre de famine qui se répand là-bas (...) Il n'y a pas de lait (pour ma fille). J'essaie de lui donner du pain que je prépare à partir de fourrage mais elle ne le digère pas (...) Notre seul espoir est l'aide de Dieu", dit-il à l'AFP.
"Tuer notre peuple en l'affamant est un crime de génocide qui menace tout le processus de négociations", a affirmé à l'AFP sous couvert d'anonymat un responsable du Hamas dans le nord de la bande de Gaza.
Le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Volker Türk, avait fustigé vendredi le "siège imposé à Gaza" par Israël pouvant "représenter une utilisation de la famine comme méthode de guerre" qui est, a-t-il rappelé, un "crime de guerre".
A Jabaliya (nord), des dizaines d'habitants se pressaient et s'invectivaient samedi pour obtenir de la nourriture. "C'est fini", crie un homme chargé de la distribution de ce qui semble être une soupe, selon des images de l'AFP.
"Que le monde voit où on en est arrivé", lance un homme.
La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent menée en Israël par des commandos du Hamas infiltrés depuis la bande de Gaza, qui a entraîné la mort d'au moins 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.
Durant l'attaque, quelque 250 personnes ont en outre été enlevées et emmenées à Gaza. Selon Israël, 130 otages --dont 30 seraient morts-- y sont encore retenus après la libération d'une centaine lors d'une trêve fin novembre, en échange de prisonniers palestiniens.
En représailles, Israël a juré d'anéantir le Hamas qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007 et qu'il considère, à l'instar des Etats-Unis et de l'Union européenne, comme une organisation terroriste.
L'offensive militaire israélienne a fait 29.692 morts à Gaza, en grande majorité des civils, depuis le 7 octobre, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du mouvement islamiste palestinien.
Le ministère fait état quotidiennement d'une centaine de morts dans la bande de Gaza, dans ce qui est l'offensive la plus vaste de l'histoire d'Israël.
Discussions à Doha
Des technocrates égyptiens, qataris, américains, israéliens et des cadres du Hamas ont repris dimanche à Doha les négociations pour une trêve à Gaza, selon une télévision proche du renseignement égyptien.
Ces discussions "seront suivies de réunions au Caire" où s'étaient rencontrés le 13 février les directeurs des renseignements égyptien, américain et israélien et le Premier ministre qatari, a indiqué AlQahera News.
Selon elle, ces pourparlers "assurent le suivi de ce qui a été discuté à Paris", où s'était rendu vendredi le chef du Mossad (services de renseignement extérieurs israéliens), David Barnea.
D'après une source du Hamas, un plan discuté en janvier à Paris prévoyait une pause de six semaines et la libération de 200 à 300 prisonniers palestiniens détenus par Israël en échange de 35 à 40 otages.
Pour conclure un accord, Israël exige au préalable "la libération de tous les otages, à commencer par toutes les femmes", a indiqué samedi soir Tzachi Hanegbi, conseiller à la sécurité nationale du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu.
"Un tel accord ne signifie pas la fin de la guerre", a-t-il toutefois prévenu.
Le Hamas réclame, lui, un "cessez-le-feu complet" et le retrait des troupes israéliennes de Gaza.
Pendant ce temps, l'inquiétude grandit aussi à Rafah, à la frontière fermée avec l'Egypte, où se massent dans des conditions précaires au moins 1,4 million de personnes, des déplacés pour la plupart, qui sont menacées d'une opération militaire terrestre d'envergure.
«Le plus vite possible»
M. Netanyahu a affirmé samedi qu'il convoquerait "en début de semaine le cabinet pour approuver les plans opérationnels d'action à Rafah, y compris l'évacuation de la population civile".
Selon un journaliste de l'AFP, au moins six raids aériens ont été menés samedi soir sur la ville.
L'armée israélienne a annoncé dimanche poursuivre notamment des opérations à Khan Younès (sud) affirmant qu'une unité spéciale "avait éliminé des dizaines de terroristes et localisé des armes".
En Israël, des milliers de personnes se sont rassemblées une nouvelle fois samedi soir à Tel-Aviv sur la "place des otages" pour réclamer leur libération.
"Nous pensons tout le temps à eux, nous voulons qu'ils nous reviennent vivants et le plus vite possible", a dit à l'AFP Orna Tal, 60 ans, dont un ami fait partie des 130 otages.