TUNISIE: Les Tunisiens ont largement boudé dimanche le deuxième tour d'élections locales boycottées par l'opposition et organisées pour parachever le projet politique du président Kais Saied, qui s'est emparé des pleins pouvoirs depuis deux ans et demi.
Le taux de participation dans les bureaux en ballotage a atteint 12,44% avec 4,2 millions d'électeurs convoqués aux urnes (sur une population de 12 millions d'habitants), après une participation de 11,66% au premier tour le 24 décembre, a annoncé l'autorité électorale Isie.
Spécialiste de la Constitution, élu démocratiquement en octobre 2019 pour un mandat de cinq ans, M. Saied s'est octroyé les pleins pouvoirs le 25 juillet 2021, en limogeant son Premier ministre et gelant le Parlement.
La Constitution qu'il a faite modifier par référendum à l'été 2022 a institué un nouveau système de deux chambres aux pouvoirs très limités: l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) et un Conseil national des régions et des districts.
Cette révision constitutionnelle a fait passer la Tunisie d'un régime parlementaire à un système ultra-présidentialiste.
L'ARP a pris ses fonctions au printemps 2023 après des législatives boycottées par l'opposition et massivement boudées par les électeurs (11% de participation).
L'investiture de la deuxième chambre est prévue en avril 2024, au terme d'un processus complexe de votes et tirages au sort.
Ce Conseil se prononcera essentiellement sur le budget de l'Etat et des projets de développement régional mais des experts redoutent des conflits entre les deux chambres en l'absence de textes organisant leur collaboration.
Aux 2.155 conseillers locaux élus, s'ajouteront 279 porteurs de handicap tirés au sort sur un millier de candidats.
A l'étape suivante, des conseillers régionaux seront désignés par tirage au sort parmi les élus locaux, puis voteront en leur sein pour désigner des conseillers de districts. Les conseillers régionaux et de districts voteront ensuite pour choisir les 77 membres de la deuxième chambre.
L'opposition a appelé à boycotter un vote "illégal" et "imposé", selon elle, par le président Saied pour parachever son processus "autoritaire".
Depuis le printemps 2023, les principaux opposants ont été emprisonnés, notamment le chef du parti islamo-conservateur Rached Ghannouchi et la présidente du Parti destourien libre, Abir Moussi, nostalgique des dictatures du héros de l'indépendance Habib Bourguiba et de Zine El Abidine Ben Ali, renversé lors du printemps arabe en janvier 2011.