Islam en France: la fin des imams détachés, un défi aux ramifications complexes

Le ministre français de l'Intérieur, Gerald Darmanin (à droite), rencontre des imams à son arrivée à la Grande Mosquée de Paris pour une cérémonie de dépôt de gerbes à la mémoire des soldats musulmans morts pour la France, à la Grande Mosquée de Paris, le 11 novembre 2023. (AFP).
Le ministre français de l'Intérieur, Gerald Darmanin (à droite), rencontre des imams à son arrivée à la Grande Mosquée de Paris pour une cérémonie de dépôt de gerbes à la mémoire des soldats musulmans morts pour la France, à la Grande Mosquée de Paris, le 11 novembre 2023. (AFP).
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Publié le Mercredi 31 janvier 2024

Islam en France: la fin des imams détachés, un défi aux ramifications complexes

  • La France, où l'islam et la deuxième religion, a passé depuis les années 1980 des accords bilatéraux autorisant trois pays à envoyer des imams pour une durée de quatre ans: Turquie (151), Algérie (120) et Maroc (30)
  • En 2020, Emmanuel Macron, pour lutter "contre les séparatismes", a promis la fin du dispositif d'ici 2024

PARIS: La fin du système des imams détachés, décidée pour stopper la venue de prédicateurs étrangers, est un défi qui soulève selon les spécialistes de nombreuses questions de financement et de formation, symptomatiques des difficultés à structurer l'islam en France.

Qui sont les imams détachés?

La France, où l'islam et la deuxième religion, a passé depuis les années 1980 des accords bilatéraux autorisant trois pays à envoyer des imams pour une durée de quatre ans: Turquie (151), Algérie (120) et Maroc (30). L'idée était alors de prévenir les dérives en accueillant des prédicateurs sélectionnés.

En 2020, Emmanuel Macron, pour lutter "contre les séparatismes", a promis la fin du dispositif d'ici 2024. Concrètement, plus aucun nouvel imam détaché ne peut arriver depuis le 1er janvier et ceux qui sont déjà en France ont jusqu'au 1er avril pour changer de statut administratif.

Où en est-on?

Côté marocain, Mohammed Moussaoui, président de l'Union des mosquées de France (UMF), estime ne plus être concerné depuis 2021: les imams marocains détachés "ont été embauchés par des associations" de l'UMF et ne touchent plus de financements de Rabat.

Côté turc, "il reste aujourd'hui 60" imams détachés, assure à l'AFP Ibrahim Alci, le président du Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF). "Une dizaine devraient rester" et "seront embauchés par l'association", ajoute-t-il.

Pour les imams algériens, le recteur de la Grande Mosquée de Paris (GMP) Chems-eddine Hafiz assure avoir "pris les devants depuis trois ans" et que sur les 120 imams, "seuls 4 souhaitent rentrer". Pour les autres, des conditions de maîtrise linguistique et de cursus universitaire sont en cours de vérification.

Quel financement?

Gérald Darmanin a prôné fin décembre "le recrutement d'imams sous statut salarié par les associations". Le pourront-elles? "Le financement sera extrêmement lourd", s'inquiète M. Hafiz, qui évoque l'idée de "convention".

L'idée de l'exécutif est de réduire ainsi l'influence des pays d'origine. Mais Franck Frégosi, directeur de recherche au CNRS, évoque une "parade" si certains Etats "versent une dotation à telle structure associative, qui salariera les imams".

On touche là un sujet dépassant selon lui les seuls imams détachés, qui ne représentent que 10% des effectifs totaux: "beaucoup d’associations n’ont pas les moyens de se payer un imam à plein temps", affirme-t-il. D'où un statut social précaire, mal assuré (notamment sans retraite), et suscitant peu de vocations.

La formation, question-clé

Gérald Darmanin a aussi souhaité qu'une "part croissante" des imams soient demain "au moins partiellement formés en France".

Il faut distinguer deux volets.

Côté profane, une trentaine de diplômes universitaires (DU) forment aujourd'hui aux enjeux de laïcité et de citoyenneté, assure-t-on à l'Intérieur. Dans un Etat laïque, "le législateur est légitimement au bout de ce qu'il peut faire", note la sénatrice centriste Nathalie Goulet, co-autrice en 2016 d'un rapport sur l'Islam en France.

Côte théologique, quelques centres dispensent des formations distinctes: Institut Al-Ghazali de la GMP, Institut Islamica de l'UMF à Strasbourg, ou encore Institut européen des sciences humaines (IESH) fondé par Musulmans de France (ex-UOIF, proche des Frères musulmans).

Mais l'imamat n'est pas conditionné à un diplôme unique. Pour Mme Goulet, "il faut que les musulmans s'organisent pour avoir un cursus, une labellisation et des enseignants comme le séminaire ou l'école rabbinique". Un défi, compte-tenu des querelles entre fédérations.

"Le corolaire immédiat est: comment on paie la formation?", ajoute la sénatrice. "On se retrouve sur le sujet classique du financement du culte musulman en France".

Quelle portée?

Sous couvert d'anonymat, un bon connaisseur du sujet estime que "ça ne va pas changer grand chose".

Franck Frégosi, du CNRS, pointe "un effet d’annonce, comme si l'Intérieur voulait rajouter une pression supplémentaire". Il note "les enjeux diplomatiques, géopolitiques, de contrôle des diasporas...". Mais "c'est une réponse très partielle" à un défi "plus vaste", selon lui.

"Le signal politique est courageux" mais "régler la question est un challenge qui ne dépend que des musulmans eux-mêmes", estime Mme Goulet.


Fusillade à Rennes: les quatre suspects mis en examen et écroués

Selon les investigations menées par la DCOS de Rennes sous l'autorité du parquet JIRS de Rennes, les quatre gardés à vue "sont impliqués dans le trafic de produits stupéfiants organisé par un réseau d'individus originaires de la région parisienne sur la dalle Kennedy (à Villejean), depuis le mois de janvier". (AFP)
Selon les investigations menées par la DCOS de Rennes sous l'autorité du parquet JIRS de Rennes, les quatre gardés à vue "sont impliqués dans le trafic de produits stupéfiants organisé par un réseau d'individus originaires de la région parisienne sur la dalle Kennedy (à Villejean), depuis le mois de janvier". (AFP)
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  • La fusillade avait fait trois blessés par balle et un quatrième homme avait été percuté par la voiture des tireurs. Le pronostic vital de cette dernière victime touchée par le véhicule n'est plus engagé
  • Les quatre hommes sont déjà connus pour de multiples délits

RENNES: Les quatre hommes, âgés de 21 à 23 ans, suspectés d'avoir tiré à plusieurs reprises en pleine journée dans un quartier populaire de Rennes le 17 avril pour "reconquérir" un point de deal, ont été mis en examen et écroués, a annoncé mardi le parquet de Rennes.

Trois ont été mis en examen des chefs d'association de malfaiteurs et tentative de meurtre en bande organisée et encourent "une peine de réclusion criminelle à perpétuité", a annoncé Frédéric Teillet, procureur de la République de Rennes dans un communiqué.

Le quatrième a été mis en cause pour trafic de stupéfiants et association de malfaiteurs, soit une peine encourue de dix ans d'emprisonnement.

La fusillade avait fait trois blessés par balle et un quatrième homme avait été percuté par la voiture des tireurs. Le pronostic vital de cette dernière victime touchée par le véhicule n'est plus engagé, a indiqué M. Teillet mardi matin.

Les quatre hommes sont déjà connus pour de multiples délits.

Selon les investigations menées par la DCOS de Rennes sous l'autorité du parquet JIRS de Rennes, les quatre gardés à vue "sont impliqués dans le trafic de produits stupéfiants organisé par un réseau d'individus originaires de la région parisienne sur la dalle Kennedy (à Villejean), depuis le mois de janvier", d'après le magistrat.

Le 14 avril, "après plusieurs jours d’assauts violents, ce clan a été évincé par le groupe des Villejeannais, qui a repris possession du terrain qu’il estimait être le sien", explique le magistrat.

C'est dans ce contexte "de règlement de compte lié au narcotrafic que des tirs d'arme à feu ont fait trois victimes et qu'une quatrième a été pourchassée en voiture, renversée violemment et laissée à terre, le 17 avril", poursuit M. Teillet.

Deux des mis en cause sont originaires de Tours, l'un de Marseille et le quatrième de la région parisienne.

"Leur équipement (armes, vêtements, voiture volée…) et leur mode opératoire ont démontré leur détermination extrême à reconquérir par tous les moyens le point de deal, à la demande de leurs commanditaires, en éliminant physiquement leurs concurrents et en prenant le risque de blesser, en plein après-midi, toute personne se trouvant à proximité", a dit M. Teillet.


Macron attendu à La Réunion sur le chikungunya et les dégâts du cyclone Garance

 Après Mayotte, Emmanuel Macron est attendu mardi à La Réunion, département d'outre-mer à la plus forte croissance économique, sur l'épidémie de chikungunya et les dégâts provoqués par le cyclone Garance. (AFP)
 Après Mayotte, Emmanuel Macron est attendu mardi à La Réunion, département d'outre-mer à la plus forte croissance économique, sur l'épidémie de chikungunya et les dégâts provoqués par le cyclone Garance. (AFP)
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  • A Mayotte, il a annoncé lundi une enveloppe de plus de trois milliards d'euros sur six ans pour financer le plan de "refondation" du département le plus pauvre de France, meurtri par le cyclone Chido en décembre
  • Autre défi pour La Réunion, le passage du cyclone Garance, le 28 février, a généré près de 250 millions d'euros de dégâts, dont 150 pour le seul secteur agricole, selon de premiers bilans

SAINT-DENIS DE LA REUNION: Après Mayotte, Emmanuel Macron est attendu mardi à La Réunion, département d'outre-mer à la plus forte croissance économique, sur l'épidémie de chikungunya et les dégâts provoqués par le cyclone Garance.

Le chef de l'Etat, arrivé lundi soir sur l'île en provenance du département voisin de Mayotte, va aussi réaffirmer le "rôle stratégique de La Réunion dans la zone indo-pacifique", où la France aspire à se poser en puissance régionale au côté des Etats-Unis, de la Chine ou l'Inde.

Le président poursuit ainsi une tournée de cinq jours dans le sud-ouest de l'océan Indien qui le mènera aussi à Madagascar mercredi et l'île Maurice vendredi.

A Mayotte, il a annoncé lundi une enveloppe de plus de trois milliards d'euros sur six ans pour financer le plan de "refondation" du département le plus pauvre de France, meurtri par le cyclone Chido en décembre.

La Réunion est secoué par une épidémie de chikungunya, une maladie infectieuse transmise par le moustique tigre, qui a fait six morts depuis le début de l'année et touché potentiellement 100.000 personnes, soit un habitant sur neuf.

Emmanuel Macron sera informé des derniers développements de l'épidémie, qui a atteint son pic ces derniers jours, lors d'un échange avec l'Agence régionale de la santé.

Engorgements 

Les difficultés sur ce front restent palpables. Le directeur général du centre hospitalier de La Réunion, Lionel Calenge, a demandé l'envoi de renforts médicaux face au risque de saturation des centres de santé.

"Tous les jours depuis plusieurs semaines, on accueille entre 30 et 40 patients atteints de +chik+ sur nos deux services d'urgence", ce qui génère "vraiment une grosse tension sur nos capacités", a-t-il alerté dimanche.

Début avril, le CHU avait déclenché le plan blanc, dispositif qui permet de déprogrammer certaines opérations ou de rappeler des personnels en congés dans les hôpitaux.

Une campagne de vaccination a aussi été lancée le 7 avril. Les 40.000 premières doses du vaccin Ixchiq, le premier ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché en Europe, sont destinées aux personnes de 65 ans et plus présentant des comorbidités. Elles peuvent se faire vacciner gratuitement.

Autre défi pour La Réunion, le passage du cyclone Garance, le 28 février, a généré près de 250 millions d'euros de dégâts, dont 150 pour le seul secteur agricole, selon de premiers bilans.

Déjà frappées par une sécheresse sévère, toutes les filières agricoles de l'île - la canne à sucre représentant 53% de la surface agricole - ont lourdement été impactées par les vents et les pluies de Garance, qui a fait cinq morts.

"Echelle régionale" 

A la même époque, l'an passé, le cyclone Bilal avait déjà mis à terre les productions de l'île, deux cyclones en deux ans qui témoignent de l'augmentation et de l'intensification de ces phénomènes météorologiques.

Le chef de l'Etat rencontrera dans la matinée des exploitants agricoles alors que l'île est autosuffisante aux trois-quarts.

La souveraineté alimentaire sera au coeur du cinquième sommet de la Commission de l'océan Indien jeudi à Madagascar.

La Réunion y est représentée au côté de Madagascar, Maurice, des Comores et des Seychelles mais pas Mayotte, les Comores s'opposant à l'intégration de l'archipel dans l'organisation en raison d'un contentieux colonial.

"Le président veut à travers cette visite illustrer le fait que l’échelle régionale c’est le moyen de mieux survivre, de mieux se préparer à affronter ces éléments climatiques", résume l'Elysée.

"Cet espace régional doit s’organiser avec l'ensemble de ses territoires et il y a un avenir commun à bâtir", assure la présidence française.

Emmanuel Macron fera aussi le point sur l'état de l'économie réunionnaise.

 


Macron présidera lundi un Conseil des ministres sur la « refondation » de l'archipel depuis Mayotte

(Photo AFP)
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  • Emmanuel Macron présentera un projet de loi programme très attendu sur la « refondation » de l'archipel, quatre mois après le passage dévastateur du cyclone Chido, a annoncé dimanche l'Élysée.
  • Ce texte, qui comprend un volet important de lutte contre l'immigration clandestine depuis les Comores, y sera présenté en vue d'une adoption par le Parlement d'ici l'été, a-t-on précisé.

PARIS : Emmanuel Macron présidera lundi un Conseil des ministres en visioconférence depuis Mayotte afin de présenter un projet de loi programme très attendu sur la « refondation » de l'archipel, quatre mois après le passage dévastateur du cyclone Chido, a annoncé dimanche l'Élysée.

Ce texte, qui comprend un volet important de lutte contre l'immigration clandestine depuis les Comores, y sera présenté en vue d'une adoption par le Parlement d'ici l'été, a-t-on précisé.

Une loi d'urgence, destinée à faciliter la reconstruction de Mayotte via des assouplissements des règles d'urbanisme et de commande publique, a déjà été adoptée en février.

La loi de refondation, beaucoup plus large, comprend des « mesures plus structurelles permettant le développement économique et social du territoire sur de nouvelles bases », selon le ministre des Outre-mer Manuel Valls.

Mayotte, le département le plus pauvre de France, est confronté à plusieurs défis majeurs : une forte pression migratoire, un habitat précaire avec de nombreux toits de tôle et bidonvilles, ainsi que des difficultés économiques et sociales.

Ce texte, attendu depuis plusieurs années par les élus mahorais, prévoit notamment un durcissement des conditions d'obtention du titre de séjour dans l'archipel, une aide au retour volontaire et la facilitation des évacuations d'habitats insalubres et illégaux.