ARCACHON, FRANCE: "Il faut qu'on arrive à créer le chaos pour relancer les négociations": les médecins libéraux du syndicat CSMF, réputé modéré, sont déterminés à donner un impact maximum à la grève des médecins libéraux qui commencera en fin de semaine prochaine, pour obtenir une hausse des tarifs de consultation.
La petite phrase sur le "chaos" circulait avec insistance au congrès de la CSMF, l'un des principaux syndicats de médecins libéraux (généralistes et spécialistes), qui organise ce week-end à à Arcachon ses universités annuelles.
"Il faut qu'on se planque" pendant la grève "pour que les gens aillent aux Urgences et qu'on comprenne tous combien on a besoin des médecins libéraux", résumait une généraliste du département du Nord. Elle espère que le mouvement dure "quatre ou cinq jours au moins".
Le docteur Bruno Perrouty, président de la partie "spécialistes" de la CSMF, appelle de ses voeux "une grève reconductible avec un +black-out+ des nouveaux rendez-vous". "Seul moyen de faire comprendre qu'il y a un réel problème", dit-il à l'AFP.
"J'ai fermé tous mes rendez-vous du 13 au 30" octobre, et "je suis en train de mettre en place la grève de la permanence des soins" (gardes), indique Luc Duquesnel, président de la partie "généralistes" du syndicat.
Tous les syndicats de médecins libéraux ont appelé à cette grève, prévue pour démarrer vendredi. Les praticiens espèrent créer un rapport de force favorable, avant la reprise des négociations tarifaires avec l'Assurance maladie, d'ici quelques semaines.
Les négociations avaient échoué l'hiver dernier, amenant à une revalorisation non négociée de 1,5 euro que toutes les parties, y compris le gouvernement, estiment insuffisante, et qu'elle ne peut être qu'une "étape".
«Une erreur»
A Arcachon, le ministre de la Santé Aurélien Rousseau et le directeur général de la Sécurité sociale Thomas Fatôme ont levé un coin du voile sur les propositions qu'ils pourraient faire aux médecins libéraux pour réussir à sceller l'accord impossible à trouver il y a quelques mois.
Aurélien Rousseau a scellé l'abandon du "contrat d'engagement territorial", un contrat individuel entre le médecin et l'Assurance maladie qui permettait d'obtenir une revalorisation plus forte de la consultation (30 euros pour les généralistes par exemple), si le praticien acceptait un assortiment de contraintes, dont travailler parfois le samedi, augmenter sa patientèle, des gardes plus nombreuses et l'embauche d'un assistant médical.
L'introduction d'une "forme de conditionnalité", de la revalorisation de la consultation à l'engagement local du médecin, "était une erreur", a déclaré vendredi le ministre de la Santé.
Il a aussi indiqué ne pas vouloir aller plus loin dans le développement de l'accès direct --sans ordonnance-- des patients à certains paramédicaux (kinés, infirmières en pratique avancée etc.), qui hérisse le poil de beaucoup de médecins.
"Penser que c'est l'accès direct qui nous sortira des difficultés, c'est une fausse promesse, c’est un miracle, et je ne poursuivrai pas sur le chemin de ce miracle", a déclaré Aurélien Rousseau.
Mais il n'a pas saisi la perche que lui tendait le président de la CSMF, Franck Devulder: élargir les possibilités de dépassement d'honoraires, y compris aux généralistes, en impliquant les complémentaires santé pour éviter que l'usager ne se retrouve avec un reste à charge trop important.
"Je suis très réservé" sur la capacité de cette proposition à résoudre le problème de sous-valorisation des actes dont se plaignent les médecins, a déclaré le ministre.
L'Assurance maladie garde "un énorme attachement aux tarifs opposables" (tarif unique applicable à tous les patients quels qu'ils soient), a souligné son directeur général Thomas Fatôme.