En Turquie, 903 mineurs condamnés pour «avoir insulté» Erdogan

Une femme tient des photos des législatrices emprisonnées Figen Yuksekdag, à gauche, accusé d'avoir insulté le président turc, et Selma Irmak à Ankara (Photo, AP).
Une femme tient des photos des législatrices emprisonnées Figen Yuksekdag, à gauche, accusé d'avoir insulté le président turc, et Selma Irmak à Ankara (Photo, AP).
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Publié le Samedi 19 décembre 2020

En Turquie, 903 mineurs condamnés pour «avoir insulté» Erdogan

  • Etrangers et des entités juridiques ont été poursuivis pour des accusations en lien avec leurs publications sur les réseaux sociaux
  • Au début des années 1990, Turgut Ozal avait installé des caricatures critiques sur les murs de sa résidence pour encourager les critiques

ANKARA: De nouvelles statistiques publiées par le ministère turc de la Justice montrent qu'un nombre record de personnes, pour la plupart des mineurs, ont été poursuivies pour avoir insulté le président Recep Tayyip Erdogan.

Au total, 128 872 enquêtes judiciaires ont été lancées en Turquie au cours des six dernières années pour insulte au président, dont 9 556 ont abouti à l'emprisonnement. Des poursuites pénales ont été engagées pour 27 717 de dossiers.

Au cours de cette période, 903 mineurs - âgés de 12 à 17 ans - ont été jugés pour la même accusation, dont 264 étaient âgés de 12 à 14 ans.

Les personnes reconnues coupables d'avoir insulté le président peuvent être emprisonnées pour une période d'un à quatre ans. La peine est susceptible d'être allongée pour une sixième année si l'acte est commis de façon explicite.

Les statistiques montrent également que des étrangers et des entités juridiques ont été poursuivis en raison de leurs publications sur les réseaux sociaux. Au cours de la même période, 234 étrangers et huit entités juridiques ont été poursuivis. Neuf étrangers ont même été condamnés à des peines d’emprisonnement.

Le nombre de cas «d'insultes» contre le président était plus faible dans la période pré-Erdogan en Turquie. Au début des années 1990, Turgut Ozal avait même installé des caricatures critiques sur les murs de sa propre résidence pour encourager les critiques.

«Ceux qui ont fait l'objet d'une enquête pour avoir insulté le président pourraient facilement diriger un parti politique ensemble et passer le seuil électoral avec le soutien de leurs proches», a tweeté l'avocat Ali Gul.

En septembre, l'ancienne coprésidente du Parti des régions démocratiques (DBP) Sebahat Tuncel a été condamnée à 11 mois de prison pour insulte au président, après avoir declaré qu'Erdogan était surtout «un ennemi des femmes et des Kurdes».

Selon la décision de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), dont la Turquie est membre fondateur, un discours doit être interprété dans son ensemble mais le fait de se concentrer sur seulement quelques mots dans le but de fonder un crime d'insulte doit être évité à tout prix.

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QUELQUES FAITS
  • Les personnes reconnues coupables d'avoir insulté le président peuvent être emprisonnées pour une période d'un à quatre an
  • La peine est susceptible d'être allongée pour une sixième année si l'acte est commis de façon explicite
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Cependant, l'article 299 du Code pénal turc, valable en raison des préoccupations de l'institution de l’Etat de «protéger l'ordre public et la société démocratique», est principalement utilisé de manière sélective.

L'article 299 est durement critiqué par l'opposition et les défenseurs des droits car il est perçu comme une moyen de répression des critiques dans le pays et de création d’une atmosphère de peur.

En 2014, la police turque a arrêté un garçon de 16 ans pour avoir insulté Erdogan lors d'un discours durant une manifestation étudiante. L'élève a été retiré de sa classe par la police - une décision qui allait à l'encontre de la charte des Nations Unies sur les droits de l'enfant.

Un an plus tard, en 2015, deux enfants, âgés de 12 et 13 ans, ont été envoyés en prison pour avoir insulté le président après avoir déchiré des affiches portant sa photo dans la province de Diyarbakir au sud-est du pays.

Les deux mineurs ont affirmé qu'ils essayaient simplement de vendre le papier aux recycleurs pour gagner de l'argent sans regarder attentivement les images.

En janvier, Erdogan a gracié deux enfants turcs après un procès pour l’avoir insulté ainsi que son gouvernement sur les réseaux sociaux, à condition qu'ils s'excusent auprès de lui et apprennent par cœur des poèmes nationalistes.

Récemment, le journaliste dissident turc Ender Imrek a été innocenté d'avoir «insulté» l'épouse d'Erdogan, Emine Erdogan, à la suite d'un article qu'il avait écrit l'année dernière pour critiquer «l'extravagance» de la première dame lorsqu'elle apparaissait en public avec un sac à main d'une valeur de 50 000 $ tandis que les gens dans le pays souffrent gravement de la faim et du chômage.

L'acte d'accusation indiquait qu'Imrek avait insulté la Première Dame car «il ne l’a pas louée».

Par ailleurs, le géant du streaming vidéo YouTube a accepté la nomination d'un représentant turc conformément à la récente réglementation des médias sociaux du pays - une décision légale susceptible de déclencher une censure généralisée à l’égard de l'expression en ligne et d'ouvrir ainsi la voie à davantage de poursuites pour insultes.

Toutefois, d'autres hommes politiques en Turquie sont constamment insultés et menacés au détriment d’une impunité totale pour les auteurs.

Le chef de la mafia notoire Alaattin Cakici, politiquement affilié au partenaire de la coalition du gouvernement, le Parti du mouvement nationaliste (MHP), a attaqué le principal parti d'opposition le Parti républicain du peuple (CHP) et son chef Kemal Kilicdaroglu à plusieurs reprises au cours du mois dernier avec des lettres pleines d’insultes et même des menaces de mort.

Le chef adjoint du MHP, Semih Yalcin, a récemment insulté le Parti démocratique du peuple pro-kurde (HDP), en le qualifiant d’une « colonie d’insectes qui mérite d’être tuée» - ce qui a également suscité des craintes d’incitation au génocide.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Finul: quatre soldats italiens blessés, Rome accuse le Hezbollah

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  • Dans un communiqué, le ministère italien de la Défense indique que "quatre soldats italiens ont été légèrement blessés après l'explosion de deux roquettes de 122 mm ayant frappé la base UNP 2-3 de Chamaa dans le sud du Liban
  • Selon un porte-parole de la Finul, la force onusienne a recensé plus de 30 incidents en octobre ayant entraîné des dommages matériels ou des blessures pour les Casques bleus

ROME: Quatre soldats italiens ont été légèrement blessés lors d'une nouvelle "attaque" contre la mission de maintien de la paix de l'ONU au Liban, la Finul, a indiqué vendredi le gouvernement italien, qui en a attribué la responsabilité au Hezbollah.

"J'ai appris avec profonde indignation et inquiétude que de nouvelles attaques avaient visé le QG italien de la Finul dans le sud du Liban (et) blessé des soldats italiens", a indiqué dans un communiqué la Première ministre Giorgia Meloni.

"De telles attaques sont inacceptables et je renouvelle mon appel pour que les parties en présence garantissent à tout moment la sécurité des soldats de la Finul et collaborent pour identifier rapidement les responsables", a-t-elle affirmé.

Mme Meloni n'a pas désigné le responsable de cette attaque, mais son ministre des Affaires étrangères Antonio Tajani a pointé du doigt le Hezbollah: "Ce devraient être deux missiles (...) lancés par le Hezbollah, encore une fois", a-t-il déclaré là la presse à Turin (nord-ouest).

Un porte-parole du ministère des Affaires étrangères a indiqué à l'AFP que Rome attendrait une enquête de la Finul.

Dans un communiqué, le ministère italien de la Défense indique que "quatre soldats italiens ont été légèrement blessés après l'explosion de deux roquettes de 122 mm ayant frappé la base UNP 2-3 de Chamaa dans le sud du Liban, qui abrite le contingent italien et le commandement du secteur ouest de la Finul".

"J'essayerai de parler avec le nouveau ministre israélien de la Défense (Israël Katz, ndlr), ce qui a été impossible depuis sa prise de fonction, pour lui demander d'éviter d'utiliser les bases de la Finul comme bouclier", a affirmé le ministre de la Défense Guido Crosetto, cité par le communiqué.

Selon un porte-parole de la Finul, la force onusienne a recensé plus de 30 incidents en octobre ayant entraîné des dommages matériels ou des blessures pour les Casques bleus, dont une vingtaine dus à des tirs ou des actions israéliennes.

Plus de 10.000 Casques bleus sont stationnés dans le sud du Liban, où la Finul est déployée depuis 1978 pour faire tampon avec Israël. Ils sont chargés notamment de surveiller la Ligne bleue, démarcation fixée par l'ONU entre les deux pays.

L'Italie en est le principal contributeur européen (1.068 soldats, selon l'ONU), devant l'Espagne (676), la France (673) et l'Irlande (370).


Syrie: le bilan des frappes israéliennes sur Palmyre s'élève à 92 morts

Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan. (AFP)
Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan. (AFP)
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  • Un dépôt d'armes proche de la zone industrielle de Palmyre a aussi été visé, selon l'OSDH, ONG basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie
  • Le bilan s'élève à "92 morts", a déclaré l'OSDH, parmi lesquels 61 combattants syriens pro-iraniens dont onze travaillant pour le Hezbollah libanais, "27 ressortissants étrangers" pour la plupart d'Al-Noujaba, et quatre membres du Hezbollah

BEYROUTH: Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan.

Mercredi, trois frappes israéliennes ont ciblé la ville moderne attenante aux ruines gréco-romaines de la cité millénaire de Palmyre. Une d'entre elles a touché une réunion de membres de groupes pro-iraniens avec des responsables des mouvements irakien d'Al-Noujaba et libanais Hezbollah, selon l'Observatoire.

Un dépôt d'armes proche de la zone industrielle de Palmyre a aussi été visé, selon l'OSDH, ONG basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie.

Le bilan s'élève à "92 morts", a déclaré l'OSDH, parmi lesquels 61 combattants syriens pro-iraniens dont onze travaillant pour le Hezbollah libanais, "27 ressortissants étrangers" pour la plupart d'Al-Noujaba, et quatre membres du Hezbollah.

L'ONG avait fait état la veille de 82 morts.

Ces frappes israéliennes sont "probablement les plus meurtrières" ayant visé la Syrie à ce jour, a déclaré jeudi devant le Conseil de sécurité Najat Rochdi, adjointe de l'envoyé spécial de l'ONU en Syrie.

Depuis le 23 septembre, Israël a intensifié ses frappes contre le Hezbollah au Liban mais également sur le territoire syrien, où le puissant mouvement libanais soutient le régime de Damas.

Depuis le début de la guerre civile en Syrie, Israël a mené des centaines de frappes contre le pays voisin, visant l'armée syrienne et des groupes soutenus par Téhéran, son ennemi juré. L'armée israélienne confirme rarement ces frappes.

Le conflit en Syrie a éclaté après la répression d'un soulèvement populaire qui a dégénéré en guerre civile. Il a fait plus d'un demi-million de morts, ravagé les infrastructures et déplacé des millions de personnes.

Située dans le désert syrien et classée au patrimoine mondial de l'Unesco, Palmyre abrite des temples gréco-romains millénaires.

 


Israël annonce mettre fin à un régime de garde à vue illimitée pour les colons de Cisjordanie

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  • Quelque 770 Palestiniens y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, selon des données de l'Autorité palestinienne
  • Dans le même temps, selon des données officielles israéliennes, 24 Israéliens, civils ou militaires, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a annoncé vendredi que le régime dit de la détention administrative, équivalent d'une garde à vue quasi illimitée, ne serait désormais plus applicable aux colons israéliens en Cisjordanie.

Alors que "les colonies juives [en Cisjordanie] sont soumises à de graves menaces terroristes palestiniennes [...] et que des sanctions internationales injustifiées sont prises contre des colons [ou des entreprises oeuvrant à la colonisation], il n'est pas approprié que l'Etat d'Israël applique une mesure aussi sévère [la détention administrative, NDLR] contre des colons", déclare M. Katz dans un communiqué.

Israël occupe la Cisjordanie depuis 1967 et les violences ont explosé dans ce territoire palestinien depuis le début de la guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas à Gaza, le 7 octobre 2023.

Quelque 770 Palestiniens y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, selon des données de l'Autorité palestinienne. Dans le même temps, selon des données officielles israéliennes, 24 Israéliens, civils ou militaires, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens.

Face à la montée des actes de violences commis par des colons armés, plusieurs pays occidentaux (Etats-Unis, Union européenne, Royaume-Uni et Canada notamment) ont au cours des douze derniers mois pris des sanctions (gel des avoirs, interdiction de voyager) contre plusieurs colons qualifiés d'"extrémistes".

Il y a quelques jours, les Etats-Unis ont sanctionné pour la première fois une entreprise israélienne de BTP active dans la construction de colonies en Cisjordanie.

La détention administrative est une procédure héritée de l'arsenal juridique de la période du Mandat britannique sur la Palestine (1920-1948), avant la création d'Israël. Elle permet aux autorités de maintenir un suspect en détention sans avoir à l'inculper, pendant des périodes pouvant aller jusqu'à plusieurs mois, et pouvant être renouvelées pratiquement à l'infini.

Selon le Club des prisonniers palestiniens, ONG de défense des Palestiniens détenus par Israël, plus de 3.430 Palestiniens se trouvaient en détention administrative fin août. Par comparaison, seuls huit colons juifs sont détenus sous ce régime à ce jour, selon le quotidien israélien de gauche Haaretz vendredi.

L'annonce de la fin de la détention administrative pour les colons survient au lendemain de l'émission par la Cour pénale internationale (CPI) de mandats d'arrêts internationaux contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, et son ex-ministre de la Défense Yoav Gallant recherchés par la justice internationale pour des "crimes de guerres" et "crimes contre l'humanité".

M. Netanyahu a rejeté catégoriquement la décision de la Cour comme une "faillite morale" et une mesure animée par "la haine antisémite à l'égard d'Israël".