«On l'a fait»: une famille de réfugiés irakiens enfin chez elle, aux Pays-Bas

Les réfugiés irakiens Ahmad et Alia partagent une blague alors qu'ils sont assis dans un café à Leeuwarden, aux Pays-Bas, le 8 décembre 2015. Après qu'Ahmad et Alia ont survécu à un attentat à la bombe à Bagdad en 2014, ils ont décidé de tout risquer et ont traversé la mer Égée cet été. (EMMANUEL DUNAND / AFP)
Les réfugiés irakiens Ahmad et Alia partagent une blague alors qu'ils sont assis dans un café à Leeuwarden, aux Pays-Bas, le 8 décembre 2015. Après qu'Ahmad et Alia ont survécu à un attentat à la bombe à Bagdad en 2014, ils ont décidé de tout risquer et ont traversé la mer Égée cet été. (EMMANUEL DUNAND / AFP)
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Publié le Jeudi 17 décembre 2020

«On l'a fait»: une famille de réfugiés irakiens enfin chez elle, aux Pays-Bas

  • A l'automne 2015, leur petit Adam de quatre mois dans un porte-bébé, Ahmed et Alia, aujourd'hui 32 et 31 ans, ont fui l'Irak pour rejoindre le million de migrants qui s'embarquent alors vers les côtes européennes en quête d'une vie meilleure.
  • Pendant cinq ans, une équipe texte, photo, vidéo les a suivis pas à pas, sur les rails, sur la route guidés par des trafiquants, dans un centre d'hébergement lugubre, jusqu'à l'aube de leur nouvelle vie à Duiven

DUIVEN: Il cherchait la sécurité, elle voulait la liberté. Des rêves pour lesquels ils ont tout risqué.    

À l'automne 2015, leur petit Adam de quatre mois dans un porte-bébé, Ahmed et Alia, aujourd'hui 32 et 31 ans, ont fui l'Irak pour rejoindre le million de migrants qui s'embarquent alors vers les côtes européennes en quête d'une vie meilleure.

Ils ont frôlé la mort en mer, eu la sensation de perdre leur dignité sur la route des Balkans, vécu en clandestins, souffert la torturante attente du droit d'asile aux Pays-Bas, le nouveau pays qu'ils se sont choisi. Jusqu'au jour où ils ont glissé dans la serrure les clés de leur propre foyer.

Une famille parmi tant d'autres, rencontrée par une journée ensoleillée de septembre 2015 à Guevgueliya, frontière endormie de la Macédoine du Nord avec la Grèce. Ce jour-là, avec des centaines de Syriens, d'Afghans, d'Irakiens, hommes, femmes, enfants, vieillards, blessés, amputés, ils s'engouffrent dans le train qui leur fera traverser la Serbie, direction l'Union européenne. 

Pendant cinq ans, une équipe texte, photo, vidéo de l'AFP les a suivis pas à pas, sur les rails, sur la route guidés par des trafiquants, dans un centre d'hébergement lugubre, jusqu'à l'aube de leur nouvelle vie à Duiven, petite ville de l'est des Pays-Bas.

Voici l'histoire d'Ahmed et Alia – qui préfèrent garder l'anonymat pour raisons de sécurité – depuis le soir où ils ont décidé de quitter ensemble Bagdad, après avoir survécu à un attentat.

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La photo du haut prise le 15 décembre 2020, montre Alia, 26 ans, réfugiée irakienne, tenant dans ses bras son bébé Adam, alors âgé de quatre mois, alors qu'ils voyagent en train de la Macédoine du Nord à la Serbie le 30 août 2015. Pour la photo du bas : Alia quitte sa maison pour aller à l'école dans la ville de Duiven, aux Pays-Bas, le 24 septembre 2020.
(ARIS MESSINIS / AFP)

Ce jour d'août 2019, le téléphone sonne, Alia décroche et la nouvelle tombe: elle vient d'obtenir le statut de réfugiée aux Pays-Bas. Au bout du fil, l'avocat qui l'assiste dans ses démarches, confirme: dans la foulée, son mari et son fils auront automatiquement le droit d'asile.

Le rêve devient réalité

Pour toujours leur vie vient de changer. Le couple s'enlace, s'embrasse, Alia crie, pleure, rit en même temps. "C'était un moment de joie encore plus intense que notre mariage", se souvient la jeune femme aux yeux noisettes.

Les semaines qui suivent, la famille obtient ses cartes de séjour, permis de voyager. Ils ne sont plus illégaux. Ils ont le droit d'avoir un foyer, de gagner de l'argent, de respirer.

"Enfin on a pu avoir tout ce que l'on désirait", dit Ahmed, cheveux bruns gominés. "Une vie normale comme n'importe quelle autre famille aux Pays-Bas."

"J'ai vu la mort" 

Partir. Cela s'est décidé après leur premier rendez-vous amoureux depuis leurs fiançailles en 2014. Ahmed a invité Alia à dîner dans un restaurant de Bagdad, Mr Chicken.

Quand soudain la bombe a explosé. Autour d'eux des clients sont tués, Alia blessée au visage en gardera des cicatrices.

"Ce jour-là, j'ai vu la mort. Si nous avions été assis à une autre table, nous n'aurions peut-être pas survécu", dit Ahmed.

A Bagdad, ils mènent la vie classique d'un jeune couple de la classe moyenne. Il tient un magasin de vêtements haut de gamme, elle est la fille d'un professeur de chimie à l'université, ils sont proches de leur famille, ont leur groupe d'amis.

"J'adore mon pays", dit le jeune homme en regardant des images de sa ville sur Snapchat. Mais "en Irak, quand tu pars travailler le matin, tu ne sais jamais si tu rentreras vivant le soir."

La naissance d'Adam en 2015 donne le départ. Ahmed vend sa boutique et les parts d'une propriété reçues en héritage pour financer "le voyage".

Ce n'est pas son premier exil. En 2006, au pic de la guerre civile en Irak, sa famille s'est réfugiée en Syrie. Ils sont revenus à Bagdad quand leur pays d'accueil a plongé à son tour dans la violence.

Ensuite, "année après année, la situation en Irak n'a cessé d'empirer, la corruption, les milices ont pris le pouvoir", dit-il. Puis l'Etat islamique, qui s'y est implanté en 2014, entraînant une nouvelle vague d'émigration.

Près de 89 000 Irakiens ont traversé la mer vers la Grèce et l'Italie en 2015, selon le Haut-commissariat de l'ONU aux réfugiés (HCR). L'année dernière, ils étaient plus de 238 000 réfugiés en Europe.

"On a été forcés d'émigrer, on n'a jamais eu le choix", dit Ahmed.

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Dans la photo du haut : Le réfugié irakien Ahmad (à gauche) et sa famille alors qu'ils se reposent sur une ligne de chemin de fer alors qu'ils tentent de traverser la Serbie pour se rendre à la frontière hongroise à Horgos le 1er septembre 2015, et (en bas) : Ahmad (à gauche) et son fils Adam, âgé de cinq ans, assis dans un parc de la ville de Duiven, aux Pays-Bas, le 24 septembre 2020.
(ARIS MESSINIS / AFP)

Aujourd'hui, Alia, Ahmed et Adam vivent dans une petite maison de trois pièces aux tuiles de briques brunes avec un jardin, dans la ville arborée de Duiven, près de la frontière avec l'Allemagne.

"A la maison" 

Ils ont repeint les murs en blanc, suspendu des rideaux roses et planté des tomates. A l'entrée, sur le paillasson, il est écrit: "A la maison".

"On l'a fait", sourit Ahmed, jean et veste en cuir, en sirotant un café au lait concentré sous les rayons du soleil automnal qui filtrent au travers des larges fenêtres du salon.

Depuis qu'ils ont le statut de réfugiés, ils perçoivent une allocation mensuelle de 1.400 euros et ont obtenu un prêt de 3.500 euros de la municipalité de Duiven pour arranger leur maisonnette. Désormais, ils paient un loyer, la sécurité sociale, l'assurance, l'électricité. 

Deux fois par semaine, les parents prennent des cours de néerlandais. Le niveau de Ahmed reste basique, Alia se débrouille même si elle passe à l'anglais pour les longues conversations.

Leur fils aux boucles brunes se sent comme un poisson dans l'eau. A bientôt cinq ans, il jongle naturellement entre le néerlandais, l'arabe et l'anglais. Il dit qu'il est "moitié irakien, moitié néerlandais".

Tous les matins, il part à bicyclette vers l'école et quand le temps le permet, il tape le ballon dans un parc voisin. Ici, pas de bombes, les enfants peuvent jouer seuls.

Sa petite enfance est loin d'être conventionnelle mais il va bien, estime la directrice de son école Marike Ketelaars. "Adam est un enfant comme les autres. Il veut jouer dehors et se faire des copains."

Une fois le petit au lit, les parents regardent des séries sur Netflix comme "Game of Thrones" - en néerlandais, sous-titré arabe.

Des plaisirs simples qui, jusqu'à il y a peu, semblaient hors d'atteinte.

Tourments et douche froide 

L'angoisse, la fatigue, la crainte d'être renvoyés à la case départ, jamais ils n'oublieront les tourments de leur odyssée pour arriver là.

Une fois arrivés en Grèce par la mer, les épreuves se sont enchaînées, à commencer par le passage de la frontière serbo-hongroise pour pénétrer dans l'UE. En cet automne 2015, la Hongrie y a érigé des barbelés pour contenir le flux ininterrompu de migrants arrivés par les Balkans. S'ils sont attrapés, ils seront parqués dans un camp de rétention.

Alia et Ahmed doivent mettre leur sort entre les mains d'un passeur qui, dans la nuit, les entraîne avec d'autres au milieu d'un champ où ils doivent échapper aux détrousseurs de migrants et aux policiers hongrois.

Dans l'avancée en silence, femmes et bébé au milieu du groupe, ils échappent de justesse à une embuscade, constate alors l'AFP qui les accompagne: émergés de l'ombre, des hommes en tenue de police se tiennent prêts à les attaquer. Des migrants brandissent des branches en guise de défense, les autres s'éparpillent. Alia est pétrifiée de peur. Les assaillants finalement disparaissent dans le noir. Sans doute des voleurs. 

Les premiers pas dans cette UE qui les faisait rêver les désarçonnent. A Budapest, ni un hôtel ni même un bordel n'accepte de louer une chambre aux migrants qu'ils sont. Las, ils doivent faire dormir le bébé dans la rue.

En une semaine, leurs économies se sont évaporées.

L'arrivée aux Pays-Bas est un soulagement. Mais il ne dure pas.

Ils ont décidé d'y tenter leur chance sur la route, à la dernière minute, parce qu'ils y avaient de la famille. Mais l'accueil de leurs proches n'est pas à la hauteur de leurs attentes. Une "trahison" pour Ahmed qui se sent abandonné. 

Il préfère ne pas s'étendre mais, dit-il, "cela a été la pilule la plus dure à avaler".

C'est le début d'une errance de quatre ans, pendant lesquels ils sont ballottés de camp en camp dont une ancienne prison pour femmes, d'une région à l'autre, perdus dans un labyrinthe de procédures administratives interminables.

En décembre 2015, quand l'AFP les retrouve, la famille vit dans un centre d'exposition reconverti en centre d'hébergement à Leeuwarden, dans le nord. Il habitent dans un box en contreplaqué sans porte ni plafond. "Ce n'est pas la vie, comment expliquer cela?", dit alors Ahmed. "C'est comme être un oiseau dans une cage."

Leur vie ne tient qu'au fil de l'espoir de se voir accorder le droit d'asile, sans quoi ils ne peuvent travailler, louer une maison, se projeter.

Mais deux fois on le leur refuse. Parce que, leur dit-on, Ahmed est revenu en Irak après son exil en Syrie, ce qui contredit les déclarations selon lesquelles il n'est pas en sécurité dans son pays. A chaque fois ils font appel, en vain.

Et ils touchent le fond. Pendant une année ils vivent dans la clandestinité, sans documents, contraints de mendier un lit chez des connaissances, avec le sentiment d'avoir perdu toute dignité

"Je ne pouvais rien faire qui implique de montrer ses papiers", raconte Ahmed. "On me regardait de haut, je valais moins que quiconque."

L'angoisse est telle qu'Alia en perd ses cheveux. "Par moments, c'était plus que je ne pouvais supporter", dit-elle.

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Dans la photo du haut : Les réfugiés irakiens Ahmad et Alia et leur bébé Adam, alors âgé de quatre mois, debout près d'une ligne de chemin de fer, alors qu'ils tentent de traverser la Serbie pour se rendre à la frontière hongroise à Horgos le 1er septembre 2015. EN BAS : Ahmad (C) avec sa femme Alia (L) et leur fils Adam, âgé de cinq ans, alors qu'ils marchent dans la ville d'Arnhem, aux Pays-Bas, le 23 septembre 2020.

Ahmed adore les Pays-Bas et le climat humide qui y règne. "C'est un pays verdoyant magnifique", s'enthousiasme-t-il en tirant sur une cigarette dans son jardin sous le crachin.

"En sécurité"

Peu à peu, le couple s'est approprié les codes du pays. Les courses dans un supermarché abordable du quartier, le pain et les épices arabes dans la ville voisine d'Arnhem.

En Irak, Alia laissait sa mère cuisiner pour toute la famille. Ici, elle apprend sur des tutos de Youtube à préparer des plats irakiens et néerlandais.

Malgré la pandémie de Covid-19 et l'isolement qui l'accompagne, le couple, plutôt sociable, a déjà noué des liens avec les parents d'élèves de l'école qu'ils saluent tous les matins d'un souriant "Goedemorgen" (bonjour).

Depuis leur installation aux Pays-Bas, ils ont bien essuyé des remarques racistes - du type "On fait peut-être ça chez vous mais pas chez nous". Mais "globalement les Néerlandais nous ont accueillis avec chaleur", dit Ahmed.

Encore ébahi de sa nouvelle vie dans ce pays, qui en 2015 a reçu 58.880 demandes d'asile selon le Service néerlandais de l'immigration et des naturalisations (IND), il lui arrive parfois de s'interroger. Cela valait-il vraiment la peine de se mettre en danger pour cet exil en Europe ? "C'est ici que nous avons décidé d'être chez nous", tranche-t-il. 

"Libérée" 

Aujourd'hui, Alia est une femme transformée, dynamique, sûre d'elle et de son avenir. Plus rien à voir avec celle qui doutait de leur choix de partir, qui se retranchait inquiète derrière son mari lorsque l'AFP l'a rencontrée sur la route des Balkans.

C'est elle qui finalement a obtenu le droit d'asile pour la famille. Contrairement à son mari, elle n'a jamais quitté l'Irak et à Bagdad elle a dû abandonner le lycée après avoir été menacée par des islamistes. Sa demande, appuyée par un avocat, a été acceptée.

Le moral perdu dans les premières années d'exil est revenu avec la rencontre d'un groupe de demandeurs d'asile vénézuéliens et d'une Polonaise. "Nous avons tout traversé ensemble, le pire et le meilleur", dit-elle. "Ils sont devenus ma nouvelle famille." 

Avec eux, elle a commencé à voir le pays autrement, à sortir, à danser en discothèque, à s'amuser pour la première fois depuis longtemps. 

Plus elle s'intègre dans le pays, plus la jeune femme, fan de pop arabe et de reggae latino, déploie ses ailes. Le contrat de location est à son nom, comme le compte en banque.

Souvent en jean, sweat et baskets, les cheveux bruns décolorés à la mode "tie and dye", elle savoure sa nouvelle vie dans un pays où les droits des femmes sont respectés, elle qui n'a jamais adopté les moeurs traditionnelles du Moyen-Orient.

"Ici, je suis libérée de tout cela." 

"Tout est possible"

La nostalgie du pays la gagne parfois. Quand elle évoque sa famille en Irak elle a les larmes aux yeux. Mais aujourd'hui elle "n'a plus aucun regret" d'être partie.

Ce qui ne l'empêche pas de tenir à ses racines irakiennes et de vouloir les transmettre à son fils en lui susurrant des histoires de là-bas, en arabe. "Il va grandir ici mais il doit savoir d'où il vient."

Pour la suite, Ahmed veut passer son permis de conduire et ambitionne de lancer sa propre affaire, peut-être dans les transports. Dans quatre ans, dès qu'il y sera éligible, il fera une demande de nationalité néerlandaise. "Pour pouvoir exercer mes droits et responsabilités dans le pays qui nous a adoptés."

"La route est encore longue mais le pire est dernière nous", dit-il. "Maintenant, tout est possible."

Alia attend leur deuxième enfant. Un jour, comme ses parents, il deviendra un citoyen européen. 


Manipulation médiatique et instrumentalisation de Forbes France au service de la propagande royale du Maroc

Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
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  • Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime marocain.
  • Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante.

RIYAD : L’enquête explosive menée par Marianne, complétée par les révélations incisives d’Africa Intelligence, lève le voile sur un système d’influence sophistiqué dans lequel le Maroc, sous couvert de soft power, orchestre une propagande méthodique via des relais médiatiques internationaux.

Forbes France, autrefois symbole d’excellence journalistique, apparaît aujourd’hui comme un instrument docile entre les mains des autorités marocaines.

Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime de Mohammed VI.

Ces textes déguisés en journalisme peignent un portrait idyllique du royaume, occultant sciemment la répression des libertés individuelles, les inégalités criantes et les réalités économiques sombres du pays. Il s'agit d'une véritable mascarade qui sape l’intégrité journalistique et trompe délibérément les lecteurs.

Forbes France : un média au service de la propagande royale

Plus qu’un simple complice passif, le magazine semble s’être vendu au plus offrant, troquant son indépendance contre des millions d’euros provenant des cercles de pouvoir marocains.

Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante. Pire, selon des sources internes, le Maroc achète régulièrement des articles pour redorer l’image de son régime monarchique, tout en évitant toute transparence sur les financements réels.

Abdelmalek Alaoui, présenté comme un analyste ou un économiste, mais qui n'est en réalité qu'un agent de la Direction générale des études et de la documentation (DGED), est identifié comme un rouage clé de cette machinerie propagandiste.

Des courriels internes obtenus par Marianne montrent comment Alaoui et d’autres agents influencent directement la ligne éditoriale de ces articles en faveur de la monarchie marocaine. Forbes France ne serait rien d’autre qu’un outil au service de cette désinformation orchestrée depuis Rabat.

Un documentaire sous influence : glorification du règne de Mohammed VI

Les tentacules de cette stratégie de manipulation s’étendent bien au-delà de la presse écrite. Africa Intelligence révèle qu’un documentaire diffusé sur Public Sénat à l’approche d’une visite officielle d’Emmanuel Macron au Maroc a été conçu comme une véritable opération de communication. 

Réalisé par des proches de l’élite politique marocaine et française, ce film, présenté comme un travail journalistique, n’est rien d’autre qu’une glorification du roi Mohammed VI.

Tout en vantant les prétendus succès du roi, notamment en matière de condition féminine et de développement économique, le documentaire escamote les critiques concernant les inégalités sociales et la répression des libertés. Il s'agit là d'une manipulation éhontée, à peine voilée, où les consignes éditoriales semblent avoir été dictées par Rabat pour protéger l’image royale.

Le Maroc : un État stratège du mensonge médiatique

Ce qui se dévoile ici est bien plus qu’un simple scandale médiatique. Il s’agit d’une stratégie délibérée et agressive de soft power, dans laquelle le Maroc utilise des moyens financiers considérables pour infiltrer et manipuler les récits médiatiques internationaux.

En contrôlant la narration sur des plateformes influentes telles que Forbes France, le royaume impose une version réécrite et aseptisée de la réalité, tout en muselant les voix dissidentes.

Ces pratiques immorales révèlent la complicité choquante de médias qui, en échange d'avantages financiers, renoncent à leur devoir d'informer honnêtement. Ce brouillage systématique de la frontière entre journalisme et propagande constitue une attaque directe contre l’intégrité de l’information.

Un appel urgent à l’éthique journalistique

Les révélations de Marianne et d’Africa Intelligence mettent en lumière le manque de diligence de la part d'acteurs tels que Forbes France.

Il est désormais impératif de mener une enquête indépendante sur ces pratiques. En effet, tant que des médias accepteront de se vendre au plus offrant, les citoyens continueront à être trompés par des récits soigneusement fabriqués pour servir des intérêts politiques. 

L’intégrité de la presse n’est pas à vendre, il est temps de le rappeler.


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
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  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).