LONDRES: Des milliers de femmes dans les pays arabes et musulmans risquent de mourir pendant l'accouchement et de maladies évitables en raison des récentes réductions de l'aide britannique, ont prévenu des responsables d'ONG à Arab News.
Une décision similaire a été rendue dans le cadre d'un examen interne des réductions du budget de l'aide britannique au développement d'outre-mer pour 2023-2024, mettant en garde les ministres contre les conséquences des coupes budgétaires.
L'évaluation qui a été publiée par la Commission du développement international, prévient qu'une réduction de l'aide à l'Afghanistan signifierait que le Bureau des affaires étrangères, du Commonwealth et du développement «ne sera pas en mesure de soutenir des services essentiels pour les femmes et les filles».
L’évaluation a ajouté : «Depuis leur retour au pouvoir, les talibans ont imposé des restrictions aux femmes et aux jeunes filles, les empêchant de jouir de leurs droits fondamentaux et les écartant systématiquement de l'espace public.
«Par conséquent, la réduction du financement risque de priver de services essentiels certaines des femmes et des filles les plus vulnérables au monde», a-t-elle précisé.
En outre, 500 000 femmes et enfants au Yémen n'auront pas accès à des soins de santé essentiels à cause de ces coupes budgétaires, a averti l’évaluation.
Katy Chakrabortty, responsable de la politique et du plaidoyer d'Oxfam, a déclaré à Arab News : «Le formulaire d'évaluation de l'impact du bureau des Affaires étrangères et du Commonwealth (FCDO) est difficile à lire. Il était clair que toute réduction de l'aide du Royaume-Uni au cours des dernières années aurait un impact sur les plus vulnérables, mais cette évaluation dresse un tableau dévastateur.»
Elle a qualifié la réduction de l'aide au Yémen de «coup terrible pour un pays qui a été touché par huit années de conflit».
Lutte contre la violence
Le Soudan et la Somalie seront également confrontés à d'importantes contraintes budgétaires, l'examen interne avertissant qu'un programme visant à mettre fin aux mutilations génitales féminines dans ce dernier pays pourrait être interrompu en raison des pertes d'aide.
Les campagnes de lutte contre la famine seront aussi touchées dans toute l'Afrique de l'Est, a signalé Chakrabortty : «Les réductions de l'aide britannique ont rendu des millions de personnes en Afrique de l'Est vulnérables à la famine. Toutes les vingt-huit secondes, une personne meurt en Éthiopie, au Kenya, en Somalie et au Sud-Soudan des suites d'une grave famine.»
«Le Royaume-Uni doit augmenter son soutien aux communautés et aux pays dès maintenant, avant que des millions de personnes supplémentaires ne soient contraintes de faire face aux conséquences», a-t-elle ajouté.
Ces coupes budgétaires font suite à l'engagement du gouvernement britannique en 2020 de réduire l'aide au développement à l'étranger de 0,7% à 0,5% en proportion du revenu national brut.
Bien que le dernier budget biennal signale une augmentation marginale du financement et s'engage à une augmentation de 12% pour 2024-2025, les chiffres de l'aide sont toujours proportionnellement inférieurs aux niveaux d'avant 2020.
Les programmes de lutte contre la violence à l'égard des femmes et des filles en Somalie et au Sud-Soudan ne bénéficieront pas non plus d'une «attention et d'une réponse adéquates» suite à ces coupes budgétaires, a prévenu l'évaluation interne.
Le ministre des Affaires étrangères, Andrew Mitchell, a déclaré que le rapport avait constitué un «élément clé de la prise de décision en matière d'attribution de ces aides».
Il a ajouté que l'OCFD avait apporté des ajustements au budget pour tenir compte des considérations de l'examen, en veillant à ce que «l'aide parvienne aux plus vulnérables».
Gwen Hines, directrice générale de Save the Children UK, a déclaré à Arab News : «Les réductions de l'aide britannique sont une condamnation à mort pour les enfants qui vivent déjà dans certaines des régions les plus dangereuses du monde, comme le confirme l'étude d'impact publiée aujourd'hui.»
«Il est répréhensible que les ministres aient décidé de réduire le budget de l'aide – et de le vider de sa substance en dépensant de grandes quantités d'aide publique au développement au Royaume-Uni – alors qu'ils savaient que cela coûterait la vie à des enfants.»
«Ces réductions vont à l'encontre des engagements pris par le gouvernement de «ne laisser personne de côté. Nous leur demandons instamment de rétablir le budget d'aide du Royaume-Uni à 0,7% du RNB», a-t-elle insisté.
La publication de l'évaluation interne constitue une rare violation à la tradition de l'OCFD, les évaluations réalisées par les gouvernements précédents étant restées confidentielles.
La réaffectation d'un quart du budget de l'aide au ministère de l'Intérieur britannique pour les dépenses liées au logement des réfugiés a également joué un rôle dans les changements budgétaires.
En Afrique, le nombre d'avortements pratiqués dans des conditions dangereuses devrait être multiplié par trois à cause de ces réductions, tandis que le nombre de décès maternels évités passerait «de 2 531 à un peu plus de 1 000», selon l'étude, qui a signalé que le secteur de la santé du Yémen pourrait subir «des dommages durables si d'autres donateurs ne sont pas en mesure de le financer».
Un porte-parole du FCDO a déclaré : «Les dépenses d'aide du Royaume-Uni devraient passer à 8,3 milliards de livres sterling (1 livre sterling = 1,16 euro) l'année prochaine et se concentreront sur des programmes visant à résoudre les crises humanitaires, à protéger les femmes et les filles et à soutenir les plus vulnérables du monde, tout en optimisant l'argent des contribuables.
«Si le budget destiné aux pays à faible revenu a dû être réduit à court terme pour atteindre notre objectif d'économies, il devrait presque doubler pour ces pays l'année suivante, surtout en Afrique, où l'aide passera de 646 millions de livres sterling à 1,36 milliard de livres sterling», a soutenu le porte-parole.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com