RAMALLAH: Une chanteuse tunisienne, Emel Mathlouthi, a annoncé mercredi l'annulation d'un concert qu'elle devait donner dans son pays, au festival d'Hammamet, affirmant avoir été accusée de "normalisation" avec Israël à la suite d'une série de concerts dans les Territoires palestiniens occupés.
En juillet, Emel Mathlouthi a donné des concerts à Jérusalem-est, occupé et annexé par Israël, ainsi qu'à Ramallah, en Cisjordanie occupée. Elle n'avait en revanche pas donné de concert en Israël.
La chanteuse, âgée de 41 ans, était devenue célèbre pendant la révolution tunisienne en 2011, avec sa chanson "Kelmti Horra" qu'elle avait interprétée au concert du Prix Nobel de la Paix en 2015, attribué au quartette du dialogue national tunisien.
Elle devait se produire la semaine prochaine au Festival international d'Hammamet. Mais les spectateurs qui avaient déjà acheté leur billet ont été informés que le concert était annulé.
"Je suis désolée d'annoncer que notre concert tant attendu à Hammamet a été annulé sans raison officielle", a déclaré la chanteuse sur Instagram. "Nous pensons que notre dernière tournée dans la belle Palestine a provoqué une controverse injustifiée m'accusant de normalisation".
"Nous tenons à souligner que ces concerts ont été organisés par des Palestiniens pour un public palestinien. Ils ne contreviennent pas aux directives" du mouvement international pro-palestinien BDS (Boycott, désinvestissement, sanctions) et de la Campagne palestinienne pour le boycott académique et culturel d'Israël (PACBI).
«Attaque personnelle»
Dans une déclaration à l'AFP, la chanteuse a affirmé avoir été l'objet "d'une grande campagne de désinformation".
Elle a assuré ne pas avoir agi en violation des directives du BDS en donnant des concerts dans les Territoires palestiniens occupés, et devant des publics très majoritairement palestiniens.
"Je ne me suis produite qu'avec des Palestiniens, pour des Palestiniens", a-t-elle dit. Elle a ajouté ne pas avoir été personnellement informée de l'annulation de son concert en Tunisie, dont les organisateurs n'ont pas donné publiquement la raison.
Les artistes qui se produisent en Israël se heurtent souvent à une opposition farouche du BDS, qui appelle au boycott d'Israël.
Le mouvement a apporté mercredi son soutien à la chanteuse, affirmant faire "la distinction entre les artistes qui divertissent les oppresseurs et ceux qui se tiennent aux côtés des opprimés". "Les artistes arabes qui respectent les directives pertinentes du BDS (...) contribuent à notre résistance culturelle", ajoute la déclaration.
Selon un correspondant de l'AFP présent au concert de Ramallah, Emel Mathlouthi a chanté à la fin de la représentation la ballade palestinienne "Wein a Ramallah" et agité un drapeau palestinien.
"C'est clairement une attaque personnelle contre moi", a-t-elle dit.
"Tout le monde m'a beaucoup soutenu ici parce que les Palestiniens ne veulent pas être isolés, ils veulent voir des artistes comme moi qui viennent d'autres pays arabes et qui parlent arabe", a ajouté la chanteuse, qui était entrée en Israël via l'aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv avec un passeport américain.
Les organisateurs du festival d'Hammamet, sollicités par l'AFP, n'ont pas fait de commentaire.