LE CAIRE: Les dirigeants politiques palestiniens ont décidé dimanche en Egypte de former un comité censé mettre fin à la division des Territoires occupés qui dure depuis 17 ans, une décision qui reflète leur "peu de sérieux" pour les experts.
Le président palestinien Mahmoud Abbas, chef du Fatah, et le chef du Hamas rival, au pouvoir à Gaza, Ismail Haniyeh, qui se rencontrent très rarement, avaient fait le déplacement à El-Alamein, sur la côte nord égyptienne.
Autour d'eux, les dirigeants de toutes les factions palestiniennes étaient là pour discuter de l'avenir de la question palestinienne alors qu'Israël est désormais dirigé par le gouvernement le plus à droite de son histoire.
Seuls le Djihad islamique et deux micro-partis ne se sont pas présentés, pour protester contre les "arrestations politiques" de l'Autorité palestinienne de M. Abbas, qui siège à Ramallah en Cisjordanie, territoire occupé depuis 1967 par Israël.
M. Haniyeh, dont le mouvement islamiste dirige la bande de Gaza sous blocus israélien, a interpellé son rival: il faut, a-t-il dit, mettre "fin à la coopération sécuritaire" avec Israël et aux "arrestations politiques" en Cisjordanie.
Face à lui, M. Abbas a dénoncé les sanglants affrontements qui ont suivi en 2007 les élections de 2006, remportées par le Hamas mais dont les résultats n'ont jamais été reconnus ni par le Fatah ni par la communauté internationale, le président palestinien évoquant un "coup d'Etat".
Dix-sept ans plus tard, "la division (...) doit cesser immédiatement", a lancé M. Abbas. "Il faut revenir à un seul Etat, un seul système, une seule loi et une seule armée légitime."
Pour cela, a-t-il dit à l'issue d'une réunion de quelques heures, il faut "former un comité pour poursuivre le dialogue (...) pour en finir avec la division et parvenir à l'unité nationale palestinienne".
Il a encore dit espérer "une réunion prochaine en Egypte pour annoncer la fin de la division".
«Peu de sérieux»
Mais pour le politologue gazaoui Moukhaimer Abou Saada, la formation d'un comité n'est "pas rassurante et montre le peu de sérieux" des participants.
"Si vous voulez tuer quelque chose, formez un comité", affirme-t-il à l'AFP.
"Former un comité ne met pas fin à la division et ne donne pas de date pour des élections", poursuit-il encore. "Face à un gouvernement israélien d'extrême droite, les factions n'ont pas pris de mesures concrètes".
Les Palestiniens, eux, ont une nouvelle fois réclamé de leurs dirigeants un front uni.
Des centaines de Gazaouis ont manifesté en divers endroits de la petite langue de terre surpeuplée et ravagée par la pauvreté pour réclamer la "fin de la division", ont constaté des journalistes de l'AFP.
Sur les réseaux sociaux, d'autres tournaient en dérision la réunion d'El-Alamein, dont le nom signifie en arabe "les deux drapeaux".
Le choix de cette ville "montre bien que le Fatah et le Hamas ont chacun un drapeau différent", ironise un internaute gazaoui.
Le Hamas, lui, a réclamé des élections générales, jusqu'ici sans cesse repoussées.
«Redessiner l'OLP»
"Il faut redessiner l'Organisation de libération de la Palestine (OLP)", l'ombrelle qui chapeaute l'ensemble des factions palestiniennes à l'exception du Hamas et du Djihad islamique, et "former un nouveau Parlement inclusif sur la base d'élections démocratiques libres", a affirmé M. Haniyeh à l'ouverture de la réunion.
L'OLP est "l'unique représentant légitime du peuple palestinien", a répondu M. Abbas, exhortant à "la résistance populaire pacifique" alors que le Hamas appelle à "la résistance totale".
L'un des dirigeants du Djihad islamique, Khaled al-Batch, a affirmé avoir "espéré une réaction de Mahmoud Abbas aux doléances et aux appels à la libération" des membres de plusieurs factions arrêtés en Cisjordanie.
Mais, a-t-il poursuivi, "nous avons été surpris par les incursions sécuritaires inédites" des forces palestiniennes contre les militants du Djihad.
Les violences liées au conflit israélo-palestinien ont fait plus de 230 morts depuis janvier - au moins 203 Palestiniens, 27 Israéliens, une Ukrainienne et un Italien, selon un décompte de l'AFP établi à partir de sources officielles.
Au Liban, cinq militaires du Fatah et un islamiste ont été tués samedi et dimanche dans des affrontements dans le plus grand camp palestinien, Aïn el-Héloué, qui échappe à l'autorité du gouvernement.
Le Premier ministre libanais Najib Mikati a estimé cette flambée de violence "suspecte dans le contexte régional et international actuel". Les dirigeants palestiniens à El-Alamein n'ont toutefois pas commenté ces événements.