Il convient de s’attarder sur la politique de la Chine à l’égard du Moyen-Orient, qui s’est avérée fructueuse et productive pour plusieurs raisons essentielles.
Tout d’abord, la politique de la Chine au Moyen-Orient est multidimensionnelle et accorde une grande importance à la diplomatie. Cette politique renforce le soft power de Pékin dans la région et elle accroît son engagement et son empreinte au Moyen-Orient, en particulier dans la région du Golfe et, surtout, envers l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis (EAU).
Un pilier central du rôle diplomatique de la Chine au Moyen-Orient est le maintien et la promotion de la paix et de la stabilité en empêchant les conflits et les tensions de dégénérer et de conduire à une guerre à part entière.
La Chine tente également de se positionner comme pacificateur mondial, ce qui renforcera certainement sa légitimité, son prestige et son statut à l’échelle mondiale. Le ministre des Affaires étrangères, Qin Gang, a déclaré en avril que la Chine était prête à négocier des pourparlers de paix entre Israël et la Palestine dans le but de trouver une solution à leur conflit de longue date. «La Chine est disposée à renforcer la coordination et la coopération avec la Palestine pour promouvoir une solution rapide, globale, juste et durable à la question palestinienne», déclare le président chinois, Xi Jinping, au dirigeant palestinien, Mahmoud Abbas, lors de la visite de ce dernier en Chine en juin.
La Chine est également devenue l’un des premiers pays à s’engager dans le processus de reconstruction de la Syrie. Elle espère apporter la paix et la stabilité à l’État arabe après la signature d’un protocole d’accord l’année dernière entre l’ambassadeur de Chine et le chef du Conseil national syrien. La Syrie est un autre pays du Moyen-Orient qui a récemment rejoint l’initiative chinoise baptisée «nouvelle Route de la soie».
L’accent mis par la Chine sur le soft power, plutôt que la coercition et le hard power, fait partie de son initiative plus large «nouvelle Route de la soie» – une stratégie mondiale d’investissement qui vise à améliorer l’infrastructure de plus de cent cinquante pays. Ce projet important a été intégré à la Constitution du Parti communiste chinois en 2017.
Cette initiative comprend deux volets: la Ceinture économique de la Route de la soie et la Route de la soie maritime du XXIe siècle. Son objectif principal est d’établir «un grand marché unifié et de tirer pleinement parti des marchés internationaux et nationaux, au moyen d’échanges culturels et d’intégration, pour renforcer la compréhension et la confiance mutuelles entre les pays membres, aboutissant à un modèle innovant avec des entrées de capitaux, un vivier de talents et une base de données technologique».
Tout conflit entre les pays du Moyen-Orient a le potentiel de déclencher une conflagration régionale, qui ne servira ni les intérêts de la Chine ni ceux des nations de la région.
«La Chine tente de se positionner comme pacificateur mondial, ce qui renforcera certainement sa légitimité.»
Dr Majid Rafizadeh
Un autre exemple marquant de l’utilisation de la diplomatie par la Chine est l’accord historique qu’elle a négocié entre l’Arabie saoudite et l’Iran. Annoncé en mars, il est considéré par certains experts, universitaires et analystes politiques comme un signe de l’influence croissante de la Chine au Moyen-Orient. Cet accord constitue un développement essentiel non seulement en termes de rétablissement des liens entre deux puissances du Moyen-Orient – l’Arabie saoudite et l’Iran –, mais aussi pour réduire les tensions et renforcer la paix et la sécurité dans la région. La consolidation des liens entre Riyad et Téhéran pourrait donner lieu à des transformations majeures dans les équilibres géopolitiques et économiques de la région.
Le deuxième pilier de la politique chinoise à l’égard du Moyen-Orient est ancré non seulement dans le commerce traditionnel du pétrole et du gaz, mais également dans les investissements à long terme dans d’autres domaines, notamment les infrastructures, l’énergie propre et les technologies de l’information de certains pays du Moyen-Orient.
À titre d’exemple, Pékin s’est engagé à considérablement investir dans divers domaines en Iran. En 2021, la Chine et le gouvernement iranien ont signé un accord de partenariat stratégique sur vingt-cinq ans, qui en est désormais aux premières étapes de sa mise en œuvre. Selon le Tehran Times, «le ministre chinois des Affaires étrangères valide les idées de son homologue iranien exposées dans son article publié dans le Global Times chinois. Wang Yi (ancien ministre des Affaires étrangères chinois) déclare que les opinions du ministre iranien des Affaires étrangères mettent en lumière l’avenir prometteur des relations entre Téhéran et Pékin. Le chef de la diplomatie chinoise exprime la volonté de son pays d’élargir la coopération avec l’Iran dans les secteurs de la finance, de l’énergie, de la banque et de la culture.»
On trouve également des partenariats fructueux entre la Chine et les pays du Moyen-Orient dans d’autres domaines, notamment la lutte contre le changement climatique, les énergies renouvelables et l’industrie solaire. Ainsi, lors d’une visite d’État de Xi Jinping à Riyad en décembre dernier, l’Arabie saoudite et la Chine ont signé un protocole d’accord sur l’énergie basée sur l’hydrogène.
Au-delà de renforcer sa légitimité et son statut à l’échelle mondiale, il convient de noter que Pékin a un intérêt financier direct à mettre l’accent sur la diplomatie et à promouvoir la paix et la stabilité au Moyen-Orient. La Chine entretient de solides relations commerciales et économiques avec l’Arabie saoudite et d’autres pays de la région au-delà de ses importations de pétrole. Selon Deutsche Welle, la Chine «a cultivé de solides liens économiques et politiques avec Riyad et Téhéran ces dernières années. L’Arabie saoudite est le plus grand fournisseur de pétrole de la Chine, les échanges entre les deux pays s’élevant à 87 milliards de dollars (1 dollar = 0,90 euro) en 2021. Le commerce entre l’Iran et la Chine, quant à lui, s’élevait à plus de 16 milliards de dollars la même année. En effet, jusqu’à 30% du commerce extérieur de Téhéran dépend du géant asiatique».
En résumé, l’engagement de la Chine auprès du Moyen-Orient a été efficace et réussi grâce à une politique multidimensionnelle axée sur l’utilisation du soft power. Elle joue le rôle vital de pacificateur et de médiateur, réalisant des investissements à long terme non seulement dans les secteurs du pétrole et du gaz, mais aussi dans les énergies propres, les énergies renouvelables, les infrastructures et la technologie.
Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard.
Twitter: @Dr_Rafizadeh
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com