PARIS: L'Assurance maladie a annoncé vendredi le déconventionnement de treize centres de santé du groupe Alliance Vision, une mesure de lutte contre la fraude que le réseau mis en cause veut contester en justice.
"Après le déconventionnement de cinq centres de santé début 2023, l'Assurance Maladie engage pour la première fois une procédure de déconventionnement de grande ampleur, à l'encontre de 13 centres de santé d'un même réseau, implanté dans neuf régions", a indiqué la Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam) dans un communiqué.
Le préjudice pourrait dépasser les 20 millions d'euros.
Concrètement, à compter du déconventionnement effectif, la Sécu ne remboursera les soins pratiqués dans ces centres que sur une base très faible appelée le "tarif d'autorité", soit par exemple pour une consultation d'ophtalmologie à 30 euros un remboursement de 1,22 euro, explique l'Assurance-Maladie. Ces déconventionnements prendront effet le 21 août 2023.
La Cnam reproche aux centres ophtalmologiques et dentaires du groupe Alliance Vision des "facturations d'actes fictifs et le non-respect, de manière répétée, des règles de cotation et de facturation des actes".
Alliance Vision conteste "vigoureusement" les reproches et la sanction dont il est l'objet et saisit "dès à présent les juridictions administratives compétentes afin d'obtenir la suspension de l'exécution des décisions" de l'Assurance maladie, selon un communiqué de son avocat Patrick Atlan, transmis à l'AFP.
Les 15 centres de santé Alliance Vision — dont 13, donc, sont dans le viseur de la Sécu — sont gérés par des associations, a précisé l'avocat, ajoutant que la société agissait en tant que fournisseur de contrats de prestation de service.
"Il revient désormais à la justice de se prononcer sur la pertinence de cette mesure non seulement au regard des faits, mais également de l'ensemble des enjeux de santé publique", écrit Me Atlan dans le communiqué.
Blanchiment
La Cnam rappelle que des actions pénales visant les centres de ce réseau sont en cours, après le dépôt de 27 plaintes par les Caisses primaires d'assurance maladie depuis juin 2021.
Une enquête s'en était suivie: ouverte le 6 juillet 2021, elle a été confiée à un juge d'instruction le 17 février 2023, a précisé une source judiciaire à l'AFP, qui évalue le préjudice à plus de 21,5 millions d'euros.
Sept personnes ont été mises en examen le 22 juin dernier pour escroquerie en bande organisée, blanchiment et exercice illégale de la médecine, a ajouté cette source, confirmant une information du Point.
"Le préjudice financier chiffré par l'Assurance-Maladie s'élève à 7,8 millions d'euros dans le cadre des plaintes déposées et pourrait être réévalué au total pour l'ensemble du réseau à près de 21 millions d'euros, selon les éléments de l’enquête", indiquait la Cnam dans son communiqué.
L'Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) est chargé des investigations.
"Ces déconventionnements simultanés de plus d'une dizaine de centres de santé, d'un même réseau, envoient un signal fort", a réagi le directeur général de l'Assurance maladie Thomas Fatôme.
Dans la foulée, Doctolib, poids lourd français de la prise de rendez-vous médicaux et de la téléconsultation, a annoncé avoir décidé "au vu de la gravité des faits", de "suspendre immédiatement l’ensemble des services en ligne de ces centres et de les déréférencer de ses services".