LA GACILLY: Rassuré sur son avenir, le festival de La Gacilly, dans l'ouest de la France, célèbre avec éclat tout l'été ses vingt ans à travers l'oeil d'une vingtaine de photographes qui emportent par leur travail les visiteurs dans les beautés et les tourments de la nature et des hommes.
Dès l'arrivée, le regard est accroché par les images sous-marines géantes dont le photographe américain David Doubilet s'est fait une spécialité. "La planète, ce n'est pas la terre, c'est la mer (...) c'est un univers incroyable", assure le photographe de 77 ans qui, dit-il, a publié "81 reportages" dans le célèbre magazine américain National Geographic.
Au fil des murs ou des prairies de cette commune de 4 000 habitants, dans la région de Bretagne, le visiteur passe ainsi du cauchemar de Paradise, cette ville de Californie ravagée par les incendies où le photographe Maxime Riché rend compte du traumatisme vécu par ses habitants, à la fragilité du Pentanal, cette immense réserve naturelle brésilienne à la faune sans pareil, saisie par le Sud-Africain Brent Stirton.
Femmes photographes
Les femmes photographes occupent une place de choix. Ainsi, la Française Nadia Ferroukhi raconte ces communautés de par le monde "dont les femmes sont le pilier, la colonne vertébrale".
Dans une des deux séries qu'elle présente, l'Ivoirienne Joana Choumali crée ce qui s'apparente à des tableaux, en superposant sur ses photographies des broderies, collages ou photomontages, le tout dans une atmosphère onirique.
Exposée en noir et blanc, l'Américaine Beth Moon traque depuis des années des arbres hors du commun par leur taille, leur forme, leur âge ou leur histoire. Quant à la Russe Evgenia Arbugaeva, elle fait découvrir les nuits de l'Arctique, dans une Sibérie aux lumières fantasmatiques où la communauté tchouktche s'efforce de préserver son mode de vie.
Partenaire de ce festival gratuit et en plein air, l'AFP présente une sélection d'un de ses photographes, le Japonais Yasuyoshi Chiba, actuellement basé à Nairobi, au Kenya.
Parmi ses nombreuses photos exposées, celle qui lui a valu en 2020 l'une des plus prestigieuses récompenses photographiques au monde, le World Press, dont la résonance est encore plus forte aujourd'hui quand les canons tonnent à Khartoum dans une lutte fratricide entre généraux: au milieu de la foule, un étudiant soudanais, dont le visage est éclairé par les lumières des téléphones portables, récite un poème, symbole de l'espoir d'une jeunesse qui pensait enfin être débarrassée des régimes militaires, omniprésents depuis l'indépendance du pays en 1956. Une photo prise après la chute en 2019 d'Omar el-Bechir, arrivé au pouvoir par un coup d'Etat en 1989.
Le visiteur retrouve également le long du parcours le travail du Brésilien de naissance Sebastiao Salgado avec notamment une série sur les peuples indigènes ou encore le photojournaliste Pascal Maitre qui consacre une série, intitulée Métropolis, à 12 villes dans le monde. Pas les grandes métropoles occidentales, mais ces villes d'un autre monde, en Afrique, en Asie, en Amérique latine. Il y présente entre autres La Rinconada qui culmine au Pérou, avec ses 50 000 habitants, à plus de 5 000 mètres d'altitude dans des conditions extrêmement difficiles.
Proche avenir assuré
Ces derniers mois, suite au Covid et aux difficultés économiques, y compris celle du Groupe Rocher (ex-groupe Yves Rocher, né à La Gacilly) qui a soutenu l'initiative dès ses débuts, le festival a craint pour son avenir, malgré plus de 300 000 visiteurs qui s'y pressent chaque année.
Les organisateurs se demandaient même si l'édition 2024 pourrait se tenir. Il manquait 200 000 euros pour boucler le budget d'un million, parmi lesquels 60% de fonds privés et "entre 16 et 20% de fonds publics", selon le président du festival, Auguste Coudray.
Mais, bonne nouvelle, le vent a tourné dans le bon sens et "les trois prochaines années sont assurées", a affirmé à l'AFP M. Coudray.
"Nous avons fait connaître nos difficultés et le soutien que nous attendions est venu. Nous sommes désormais sereins", s'est-il réjoui en résumant ce qui, à ses yeux, fait "la mission" du festival: "émouvoir, sensibiliser et partager notre espoir".