PAMANDZI : Le lieu est fréquenté et le séjour y est bref: le centre de rétention de Mayotte se prépare à retrouver une activité soutenue avec la reprise des expulsions de sans-papiers vers les Comores, permise par le rétablissement de la liaison maritime.
Pamandzi, en Petite-Terre, l'une des deux îles habitées du département français de l'océan Indien, abrite près de l'aéroport et non loin du port de Dzaoudzi le premier centre de rétention administrative (CRA) de France. Et de loin.
Doté de 136 places, il a accueilli quelque 26 000 personnes en 2022, soit plus de 60% des placements en rétention dans l'ensemble des 25 centres de métropole et d'outre-mer.
Vendredi, son responsable, le commandant de police Dominique Bezzina, organisait une visite des lieux ouverte à la presse lors de la venue de l'eurodéputé Nicolas Bay (Reconquête!) qui, comme parlementaire, dispose d'un droit d'accès aux CRA.
Chaque jour, en moyenne, une centaine de personnes sont débarquées ici avant leur renvoi du territoire français. Autant en partent. Parmi elles, 25 à 30 sont remises en liberté, les autres faisant l'objet d'une mesure d'éloignement.
"Notre record de personnes expulsées en une journée est de 189. Dans ces conditions, il ne faut pas qu'un grain de sable vienne perturber notre organisation", explique le chef du CRA, qui fonctionne 24h/24. A Mayotte, quatre lieux de rétention sont utilisés pour désengorger le site.
Comoriennes en grande majorité, les personnes retenues sont aussi Malgaches ou originaires de l'Afrique des Grands Lacs.
Au CRA, elles intègrent des dortoirs de six lits, dans trois zones distinctes pour les hommes, les femmes et les familles. "Leur séjour est bref", souligne Dominique Bezzina. En moyenne 1,2 jour, nuit comprise. Parfois moins.
"Il arrive que l'on intercepte des kwassas kwassas (embarcations de pêche à moteur sur lesquelles des Comoriens tentent de rallier Mayotte, NDLR) en mer pendant la nuit", raconte Frédéric Sautron, sous-préfet chargé de la lutte contre l'immigration clandestine.
"On s'assure que les personnes sont en bonne santé, et souvent elles repartent directement, par le Maria Galanta", le navire commercial qui assure la liaison entre Dzaoudzi et l'île comorienne d'Anjouan, précise le haut fonctionnaire.
Présence d'associations
Un départ express, c'est justement ce que redoute Djarati M'Bouri à l'entrée du CRA, où elle attend son fils interpellé dans la matinée. "Je suis venue avec les documents pour qu'il soit libéré", raconte-t-elle, inquiète. "Il a eu son bac mais il n'a pas encore de titre de séjour".
Au sein du centre, deux associations permettent aux personnes interpellées de faire valoir leurs droits. "Nous les aidons notamment à déposer des recours", précise la coordinatrice du pôle rétention de Solidarité Mayotte, qui souhaite rester anonyme.
En face, les bureaux de l'association Mlezi Maoré se concentrent sur les démarches pour les mineurs isolés. "Nous contactons les familles pour recevoir un acte de naissance ou tout document permettant de confirmer l'âge de la personne quand nous avons un doute", souligne une travailleuse sociale, préférant elle aussi garder l'anonymat.
Les expulsions vers Anjouan ont été bloquées pendant plus de trois semaines en raison de la suspension de la liaison entre Mayotte et les Comores, opposées à l'opération Wuambushu visant à déloger les sans-papiers des bidonvilles mahorais.
La reprise des rotations mercredi permet une relance progressive des reconduites de Comoriens dans l'archipel. Dix-neuf personnes ont été "éloignées" mercredi, selon la police nationale, avant 48 vendredi, transférées du CRA à bord du Maria Galanta.
Le gouvernement comorien assure qu'il n'accepte sur son sol que des personnes candidates au retour. Pourtant, vendredi, "les 48 personnes éloignées ont été interpellées par les forces de l'ordre, elles ne se sont pas portées volontaires", affirme le sous-préfet Sautron.