PARIS: Le président français Emmanuel Macron a reçu discrètement lundi soir son homologue comorien Azali Assoumani sur fond de tensions diplomatiques engendrées par l'opération "Wuambushu" menée par les autorités françaises à Mayotte pour déloger des bidonvilles des sans-papiers en grande majorité venus des îles voisines des Comores.
La rencontre, qui n'avait pas été annoncée, a été confirmée mardi à l'AFP par Hamada Madi, conseiller diplomatique du chef de l'Etat comorien. Elle a duré une quarantaine de minutes, a-t-il dit.
Interrogé par l'AFP, l'Elysée s'est ensuite borné à confirmer à son tour la réunion.
A la suite de ce tête-à-tête dont rien n'a filtré, les ministres des Affaires étrangères et de l'Intérieur des deux pays devaient déjeuner mardi ensemble au Quai d'Orsay, selon Hamada Madi et une source diplomatique française.
Le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin a lancé une série d'opérations, regroupées sous le nom de "Wuambushu" ("reprise" en mahorais), visant à déloger les migrants en situation irrégulière, pour la plupart venus des Comores voisines, des bidonvilles insalubres de Mayotte.
Sur les 350 000 habitants estimés de Mayotte, la moitié ne possède pas la nationalité française.
"Wuambushu" est dénoncée comme une opération "brutale", "anti-pauvres" et violant les droits des migrants par nombre d'associations, mais elle est soutenue par les élus et de nombreux habitants de l'archipel, qui dénoncent la hausse de l'insécurité.
Dans un entretien publié mardi par le quotidien français Le Monde, le président comorien affirme avoir dit début 2023 à Emmanuel Macron son opposition à "cette opération qui consiste à appeler la presse du monde entier pour clamer: 'Regardez, on va rapatrier les Comoriens qui sont à Mayotte!'".
"Cela aurait pu être plus discret et efficace. Il y a un vol et un bateau entre Mayotte et Anjouan", une île comorienne, "tous les jours", déplore-t-il.
Azali Assoumani explique qu'il "demande la levée" du visa imposé par la France "qui fait que les Mohéliens, les Grand-Comoriens et les Anjouanais ne sont pas libres d'aller et venir à Mayotte, pour voir leur famille par exemple".
Mais selon lui, le gouvernement français n'osera pas le lever "parce qu'il a peur de l'extrême droite". "Le problème est là. D'ailleurs, à Mayotte, (la cheffe de file de l'extrême droite) Marine Le Pen obtient de meilleurs scores que M. Macron", relève-t-il.
Faisant géographiquement partie de l'archipel comorien, Mayotte s'est séparée des Comores en 1974, à la suite d'un référendum où les trois autres îles ont choisi l'indépendance. Elle est devenue département français en 2011, mais les Comores refusent d'y reconnaître la souveraineté de la France.