PARIS: Marwan Kheireddine, ex-ministre libanais et dirigeant de la banque privée al-Mawarid, a été mis en examen à Paris fin mars dans l'enquête judiciaire française sur le patrimoine européen de Riad Salamé, gouverneur de la banque centrale du Liban, a appris l'AFP vendredi de source proche du dossier.
Selon cette source, M. Kheireddine a été mis en examen pour association de malfaiteurs, notamment en vue de commettre des détournements de fonds publics par un agent public au préjudice de l'Etat du Liban, des abus de confiance aggravés, de la corruption active et passive d'agent public.
Cet homme de 55 ans, ministre au début des années 2010, déjà entendu par les enquêteurs européens au Liban en janvier, est aussi poursuivi pour blanchiment en bande organisée, avant d'être placé sous contrôle judiciaire.
M. Salamé, 72 ans, est soupçonné d'avoir été le bénéficiaire dans la banque al-Mawarid de comptes qui n'auraient pas été normalement contrôlés, en contrepartie d'avantages divers pour l'établissement de M. Kheireddine.
Sollicité, l'avocat de M. Kheireddine n'a pas répondu dans l'immédiat.
M. Salamé est visé par plusieurs enquêtes européennes et libanaise sur son riche patrimoine immobilier et bancaire en Europe, qui a fait l'objet de saisies importantes en mars 2022 car soupçonné d'avoir été acquis via un détournement massif de fonds publics libanais.
Il n'est pas mis en cause à ce stade dans l'enquête française, mais est convoqué pour un interrogatoire le 16 mai en France, selon une source judiciaire libanaise et la source proche du dossier.
D'après la source libanaise, le Liban ne peut pas forcer le gouverneur à se rendre en France, et il est toujours sous le coup d’une interdiction de voyage décidée par une juge, Ghada Aoun. Cette dernière peut cependant lever l'interdiction de voyage pour lui permettre de quitter le pays.
L'avocat de M. Salamé, Me Pierre-Olivier Sur, a indiqué "examiner la faisabilité" d'un tel interrogatoire, la procédure étant selon lui irrégulière.
Entendu mi-mars à Beyrouth par plusieurs juges européens enquêtant sur lui, dont la juge d'instruction française Aude Buresi, M. Salamé a clamé son innocence.
Cette mise en examen, la deuxième dans l'information judiciaire française ouverte en juillet 2021, "est une étape importante", a réagi Me William Bourdon, sollicité par l'AFP.
Cela souligne que "les opérations de blanchiment du clan Salamé n'ont été possibles que par le concours de banquiers en France et ailleurs", selon l'avocat de l'association Sherpa et du Collectif des victimes des pratiques frauduleuses et criminelles au Liban (CPVCL), parties civiles.