Après le choc des retraites, la drôle de guerre à l'Assemblée

Depuis lundi, durant une semaine transpartisane, les unanimités se sont multipliées pour des textes consensuels, comme celui sur le financement du permis de conduire. (AFP)
Depuis lundi, durant une semaine transpartisane, les unanimités se sont multipliées pour des textes consensuels, comme celui sur le financement du permis de conduire. (AFP)
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Publié le Vendredi 31 mars 2023

Après le choc des retraites, la drôle de guerre à l'Assemblée

  • 14 avril: les parlementaires ont tous coché dans leur agenda la date à laquelle le Conseil constitutionnel se prononcera sur la réforme des retraites, adoptée au forceps avec le recours au 49.3
  • Les chefs des groupes parlementaires et des partis sont aussi censés se rendre chez Elisabeth Borne à partir de la semaine prochaine pour évoquer l'après

PARIS: Après le tumulte des retraites, une ambiance étrange règne à l'Assemblée nationale, où d'autres textes sont votés sans difficulté mais où les députés se demandent à quoi vont ressembler les semaines qui viennent.

14 avril: les parlementaires ont tous coché dans leur agenda la date à laquelle le Conseil constitutionnel se prononcera sur la très controversée réforme des retraites, adoptée au forceps avec le recours au 49.3.

En attendant, c'est la drôle de guerre au Palais Bourbon, où chaque camp prévoit "séminaire" et autres réunions la semaine prochaine pour resserrer les rangs.

A gauche, l'ensemble des députés de la coalition Nupes ont rendez-vous mardi soir à l'Assemblée pour discuter stratégie et cohésion. Au programme, selon la cheffe du groupe écolo Cyrielle Chatelain, un échange sur la "continuité du combat sur les retraites".

A l'initiative des communistes, les parlementaires de gauche ont prévu dans la matinée mardi un "cortège républicain" de l'Assemblée à l'Elysée, pour demander à Emmanuel Macron le retrait des 64 ans.

Pour conjurer un "étiolement de la lutte", le leader de LFI Jean-Luc Mélenchon réclame quant à lui une "grève générale" le 6 avril lors de la prochaine journée de mobilisation.

Dans le camp d'en face, ce sont les députés Renaissance qui se retrouveront mercredi en "séminaire" pour "travailler ensemble sur l'agenda des réformes et la méthode de travail".

"On temporise, on calme le jeu. De toute façon, on n'est pas audible", glisse un cadre du groupe macroniste. "Il faut profiter" de la période pour "montrer que nos institutions tiennent", insiste-t-il, même s'il ne voit "pas comment on fera l'économie d'un remaniement" ministériel, après la séquence des retraites.

Et dans la majorité présidentielle, les alliés MoDem et Horizons appellent à "rebondir". "Cette législature ne va pas s'arrêter avec cette réforme des retraites", souligne Jean-Paul Mattei, le patron du groupe MoDem, qui voudrait "se recentrer sur des textes importants pour notre société", sur le "logement", par exemple.

Les chefs des groupes parlementaires et des partis sont aussi censés se rendre chez Elisabeth Borne à partir de la semaine prochaine pour évoquer l'après.

«Ecouter le peuple»

La France Insoumise, qui réclame le retrait de la réforme, un référendum ou une dissolution de l'Assemblée, a déjà fait savoir qu'elle boycotterait cette réunion à Matignon.

Les communistes en ont fait autant. "C'est à l'Elysée que tout se décide malheureusement", a commenté le secrétaire national, Fabien Roussel.

Au Rassemblement national, "on ira. Mais pour demander le retrait de la réforme et d'écouter le peuple", martèle le groupe de Marine Le Pen.

Malgré ce bras de fer, des textes continuent à être examinés à l'Assemblée et à être votés, parfois très largement.

C'est le cas de la relance du nucléaire, adoptée par 402 voix contre 130 le 21 mars en première lecture, avec le soutien de LR, du RN et de communistes. Et de la loi sur les Jeux olympiques et son vaste volet sécurité, très confortablement validée mardi, avec l'appui de la droite et de l'extrême droite.

Autant de scrutins aussitôt salués par le gouvernement, qui répète que la "co-construction" n'est pas impossible, malgré le contexte social électrique.

Depuis lundi, durant une semaine transpartisane, les unanimités se sont multipliées pour des textes consensuels, comme celui sur le financement du permis de conduire.

Dans une ambiance parfois décontractée, comme quand la présidente de séance et députée insoumise Caroline Fiat a salué au perchoir le départ à la retraite de "Philippe, plongeur de la buvette, qui fait son dernier jour aujourd'hui", sous les applaudissements d'élus de plusieurs bancs.

Mais quid des prochaines semaines ? L'agenda parlementaire est aussi incertain que dégagé, après le report sine die du projet de loi immigration, et son saucissonnage en "plusieurs textes" à un horizon encore inconnu.

"Textes plus courts", "majorité de projets": voici le mantra des macronistes qui promettent une fois de plus une "nouvelle méthode", comme ils le faisaient en juin après les législatives, faute de majorité absolue dans l'hémicycle.


Sophie Binet (CGT) a déclaré que le travail le 1er mai était « hors de question »

La secrétaire générale de la Confédération générale du travail (CGT) Sophie Binet assiste à une manifestation de travailleurs du groupe de distribution français Auchan près de l'Assemblée nationale à Paris, le 22 janvier 2025. (Photo Sebastien DUPUY / AFP)
La secrétaire générale de la Confédération générale du travail (CGT) Sophie Binet assiste à une manifestation de travailleurs du groupe de distribution français Auchan près de l'Assemblée nationale à Paris, le 22 janvier 2025. (Photo Sebastien DUPUY / AFP)
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  • Sophie Binet, la leader de la CGT, s'est dite opposée au travail le 1(er) mai, en réaction à une proposition de loi visant à autoriser les établissements déjà autorisés à ouvrir le dimanche à le faire également le 1(er) mai
  • « C'est une conquête sociale et nous sommes là pour la préserver », a-t-elle insisté, faisant référence à la journée de mobilisation du 1er mai.

PARIS : Sophie Binet, la leader de la CGT, s'est dite opposée au travail le 1(er) mai, en réaction à une proposition de loi visant à autoriser les établissements déjà autorisés à ouvrir le dimanche à le faire également le 1(er) mai, notamment les boulangers et les fleuristes.

« Pas question. Il y a 364 autres jours pour ouvrir », a-t-elle réagi sur LCI. « C'est une conquête sociale et nous sommes là pour la préserver », a-t-elle insisté, faisant référence à la journée de mobilisation du 1er mai.

Une proposition de loi de sénateurs centristes, soutenue par le gouvernement, a été déposée afin que les salariés des établissements et services « dont le fonctionnement ou l'ouverture est rendu nécessaire par les contraintes de la production, de l'activité ou les besoins du public » puissent travailler le 1(er) mai. 

Cette initiative vise à répondre à la polémique de ces derniers jours concernant les boulangers, dont certains avaient subi des contrôles inopinés de l'inspection du Travail le jour de la Pentecôte l'an passé.

« Je rappelle que le 1er mai, les patrons peuvent travailler s'ils le souhaitent, mais pour les travailleurs et les travailleuses, c'est férié, chômé, et c'est un acquis de la lutte », a souligné Mme Binet.

La représentante syndicale a réfuté l'argument selon lequel les salariés seraient volontaires : « C'était exactement ce qu'on nous disait le dimanche en nous disant que, de toute manière, le dimanche était payé double, donc il fallait laisser les salariés qui le souhaitent travailler le dimanche ». 

« Le résultat, c'est qu'on a complètement libéralisé le travail du dimanche. Il y a de plus en plus d'entreprises qui appliquent des majorations de 10 % ou qui n'accordent aucune majoration du tout, et qui n'ont même pas l'air de vouloir recourir au volontariat », a-t-elle défendu.

À l'inverse, le député RN Julien Odoul a déclaré qu'il fallait « bien évidemment changer la loi parce qu'aujourd'hui on a besoin de libérer le travail, d'inciter les gens à travailler ».

« Le 1er mai, c’est la fête du travail, pas la fête de l'oisiveté ou de l'assistanat. La CGT veut nous renvoyer au XIX^e siècle, c'est une autre histoire », a-t-il souligné.


Le gouvernement français promet de procéder à un grand « ménage » au sein des agences de l'État

La ministre française en charge des comptes publics, Amélie de Montchalin, s'exprime lors d'une conférence de presse après une réunion hebdomadaire du cabinet au palais présidentiel de l'Elysée à Paris, le 16 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
La ministre française en charge des comptes publics, Amélie de Montchalin, s'exprime lors d'une conférence de presse après une réunion hebdomadaire du cabinet au palais présidentiel de l'Elysée à Paris, le 16 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • « L'État (...) va faire du ménage dans notre organisation, parce que les Français le demandent », a-t-elle avancé.
  • « Aujourd'hui, on compte 180 000 personnes qui travaillent dans les agences et les opérateurs, plus que de gendarmes dans le pays », a-t-elle rappelé.

PARIS : La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a annoncé dimanche que « d'ici la fin de l'année », « un tiers des agences et des opérateurs » de l'État « qui ne sont pas des universités » allaient être « fusionnés ou supprimés ».

« C'est 2 à 3 milliards d'euros d'économies à la clé », a-t-elle indiqué sur CNews/Europe 1, précisant notamment que cela impliquerait « moins d'emplois publics ».

« L'État (...) va faire du ménage dans notre organisation, parce que les Français le demandent », a-t-elle avancé.

« Aujourd'hui, on compte 180 000 personnes qui travaillent dans les agences et les opérateurs, plus que de gendarmes dans le pays », a-t-elle rappelé.

« Ces 180 000 personnes ont toutes un métier, une mission. Notre rôle est de considérer que les choses ne sont pas immuables », a-t-elle ajouté.

La ministre des Comptes publics n'a pas spécifié quelles agences et opérateurs allaient être fusionnés ou supprimés, si ce n'est que ces fusions et suppressions n'incluaient pas les universités. 

En début d'année, plusieurs agences étaient dans le collimateur du gouvernement et de la droite, notamment l'Agence bio, menacée un temps de disparition après le vote, mi-janvier au Sénat, d'un amendement auquel la ministre de l'Agriculture, Annie Genevard, ne s'était pas opposée.

Interrogée sur la façon dont les suppressions d'emplois publics pourraient se faire, Amélie de Montchalin a répondu : « Vous avez des gens qui partent à la retraite, vous avez des gens que vous pouvez mettre ensemble, on a plein de moyens sans faire dans la casse sociale. »

« Je serai auditionnée mi-mai par une commission du Sénat, je ferai des annonces à ce moment-là », a ajouté Amélie de Montchalin.

En 2024, le déficit public s'est creusé pour atteindre 5,8 % du produit intérieur brut (PIB). Le gouvernement espère le ramener à 5,4 % cette année, au prix d'un effort budgétaire d'une cinquantaine de milliards d'euros, renforcé récemment par 5 milliards supplémentaires.

Il entend ensuite le réduire à 4,6 % en 2026 grâce à un nouvel effort chiffré à 40 milliards d'euros. 


Le gouvernement annule 3 milliards d'euros de crédits dans le cadre de l'effort budgétaire

La ministre française en charge des comptes publics Amélie de Montchalin (G) et le ministre français de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique Eric Lombard tiennent une conférence de presse après une réunion hebdomadaire du cabinet au palais présidentiel de l'Elysée à Paris, le 16 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
La ministre française en charge des comptes publics Amélie de Montchalin (G) et le ministre français de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique Eric Lombard tiennent une conférence de presse après une réunion hebdomadaire du cabinet au palais présidentiel de l'Elysée à Paris, le 16 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, avait alors expliqué que ces 5 milliards d'euros devaient permettre de respecter les objectifs de déficit public cette année, dans un contexte de croissance moindre.
  • « Ces 5 milliards d'euros que nous allons soit annuler, soit reporter, soit réorienter, c'est notre réponse à un monde instable. C'est la manière de faire face quoi qu'il arrive à ce monde instable », avait-elle déclaré.

PARIS : Le gouvernement a acté dans le Journal officiel des annulations de crédits à hauteur de 3,1 milliards, dans le cadre de l'effort supplémentaire de 5 milliards d'euros déjà annoncé par Bercy début avril.

La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, avait alors expliqué que ces 5 milliards d'euros devaient permettre de respecter les objectifs de déficit public cette année, dans un contexte de croissance moindre.

« Ces 5 milliards d'euros que nous allons soit annuler, soit reporter, soit réorienter, c'est notre réponse à un monde instable. C'est la manière de faire face quoi qu'il arrive à ce monde instable », avait-elle déclaré.

Une partie de cette somme a été concrétisée par le décret publié au Journal officiel.

« Afin de prévenir une détérioration de l'équilibre budgétaire sur le budget de l'État », selon le Journal officiel, « le présent décret porte des annulations de crédits à hauteur de 3,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement ». 

« Cet effort porte essentiellement sur les crédits hors masse salariale mis en réserve en début d'année », est-il précisé, « ces annulations ne devraient ainsi pas remettre en cause de façon significative la capacité d'exécution des politiques publiques, selon les termes de la loi de finances initiale pour 2025 ».

Parmi les annulations de crédits, sont concernées la mission « écologie, développement et mobilité durable » (549,6 millions d'euros), la mission « économie » (517,7 millions d'euros), la mission « recherche et enseignement supérieur » (493,3 millions d'euros) ou encore la mission « agriculture, alimentation et affaires rurales » (140 millions d'euros).

« La dégradation récente des perspectives macroéconomiques conduit à anticiper de moindres recettes publiques, en lien notamment avec une révision à la baisse de la prévision de croissance à 0,7 %. Ces risques sont également renforcés par le contexte géopolitique incertain », souligne le décret.

« Dans ce cadre, un effort supplémentaire de maîtrise de la dépense est nécessaire pour respecter la trajectoire de redressement des comptes publics sur laquelle le gouvernement s'est engagé », ajoute le décret.