PARIS : Pierre Moscovici, le Premier président de la Cour des comptes, a menacé mercredi de refuser de certifier les comptes de l'État si ses recommandations ne sont pas mieux écoutées, tout en reconnaissant que le budget de 2025 s'annonçait mieux que celui de 2024.
« J’aimerais vous faire part, non pas de ma mauvaise humeur, mais de ma très mauvaise humeur concernant les suites ou plutôt l'absence systématique de suites données à l'acte de certification que nous publions annuellement », a lancé M. Moscovici devant la presse, puis à l'Assemblée nationale, en présentant divers documents dont la certification des comptes de l'État pour 2024.
« J'imagine la situation d'une entreprise dans laquelle le commissaire aux comptes certifierait les comptes avec de fortes réserves ou ne les certifierait pas, et où le conseil d'administration dirait : "On s'en fiche" », a assuré M. Moscovici.
« Les réserves formulées par la Cour ne sauraient être prises à la légère ou contestées, mais devraient au contraire faire l’objet de toute l’attention de l’administration pour être levées », a-t-il estimé.
Or, « pour la 19^e année consécutive, les comptes de l’État ne sont pas en mesure d’être certifiés sans des réserves très significatives », a-t-il souligné.
« En l'absence de progrès significatifs en 2025, la Cour pourrait être amenée à ne pas certifier les comptes », a affirmé M. Moscovici, qui a écrit en ce sens à Bercy cette semaine.
Le Premier président a une nouvelle fois exprimé de vives critiques à l'encontre du budget 2024, élaboré à l'automne 2023 avec des prévisions qui se sont avérées trop optimistes, sous la direction de Bruno Le Maire. Le déficit public annoncé à l'époque était de 4,4 % du PIB, mais il a finalement atteint 5,8 %.
M. Moscovici a regretté l'absence d'une loi de finances rectificative début 2024, pour prendre en compte les dérapages déjà constatés en 2023. Il a dénoncé « la gestion erratique, le pilotage à vue, la succession de reports, gels, surgels, coups de rabot » qui ont émaillé l'année dernière.
Il a reconnu que la situation était « un peu mieux » pour 2025, même s'il a noté que « nous observons encore soit de légers biais optimistes, soit des risques qui ne sont pas tout à fait évalués ».
« Néanmoins, a-t-il salué, la prévision de croissance actuelle à 0,7 % n'est pas hors d'atteinte, même si les risques liés à la conjoncture internationale et à l'incertitude géopolitique sont élevés. »