DUBAÏ: L’artiste tunisienne Safia Farhat était non seulement une créatrice de tapisseries dynamique, mais aussi une céramiste, une éducatrice, une militante des droits de la femme et une pionnière dans le domaine de l’édition. Cette femme a accumulé des premières historiques au cours de sa vie.
Elle a contribué à l’essor de la culture visuelle dans la Tunisie indépendante, sous la direction progressiste du président Habib Bourguiba. Farhat a conçu des timbres nationaux, a exposé son art textile dans les banques, les hôtels et les écoles du pays, et a travaillé avec des tisserands et des artisans experts dans son studio.
Farhat est née dans la ville portuaire de Radès en 1924 et a été élevée dans une famille aisée. C’est sa tante maternelle, qui savait tricoter et faire du crochet, qui a cultivé sa passion pour l’art. Elle a ensuite étudié à l’Institut supérieur des Beaux-arts de Tunis, où elle aurait été la troisième femme tunisienne à s’inscrire.
Elle est ensuite devenue la première femme directrice de l’institut en 1966, poste qu’elle a occupé pendant plus de dix ans. Elle a encouragé les étudiantes à participer à la programmation de l’institut. Farhat a également fondé le premier magazine féminin de Tunisie, intitulé «Faïza», qui traite du féminisme et de la décolonisation, et d’autres questions sociales.
Ses tapisseries colorées aux lignes épaisses représentent des animaux, des plantes, ainsi que des hommes et des femmes portant des vêtements traditionnels. «Lorsque j’ai vu son travail, j’ai été vraiment fascinée par les éléments sculpturaux, la couleur, les différentes techniques utilisées, et les histoires de ses œuvres», confie à Arab News Jessica Gerschultz, professeur d’études africaines à l’université du Kansas.
«Elle semble vraiment jouer sur l’autoréférence», poursuit-elle. «Ses œuvres renvoient à d’autres, et l’on trouve donc de nombreux symboles – beaucoup de triangles et de zigzags – intégrés dans ses tissages et dans d’autres œuvres qu’elle a réalisées en céramique et en fer.»
Farhat, qui est décédée en 2004, est un nom encore connu par certaines personnes âgées dans son pays d’origine, mais les jeunes étudiants en art de Tunisie ne la connaissent généralement pas, ce qui est ironique. «À l’institut, les étudiants connaissent peut-être son nom, mais ils ne la connaissent pas très bien, voire pas du tout», constate Gerschultz.
Toutefois, Farhat a suscité un intérêt international renouvelé l’année dernière à la suite de l’exposition de ses œuvres à la Biennale de Venise. «Il est merveilleux de voir que ses contributions sont aujourd’hui plus largement appréciées», affirme Gerschultz.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com