Dans la banlieue pauvre de Tunis, l'art pour échapper à la violence

Dans une petite chambre transformée en studio, au milieu de constructions anarchiques à Daouar Hicher, Mohamed Ali enregistre ses couplets, élaborés avec des amis du même quartier (Photo, AFP).
Dans une petite chambre transformée en studio, au milieu de constructions anarchiques à Daouar Hicher, Mohamed Ali enregistre ses couplets, élaborés avec des amis du même quartier (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 18 mars 2023

Dans la banlieue pauvre de Tunis, l'art pour échapper à la violence

  • L'échec de la classe politique à améliorer leur quotidien suscite chez ces jeunes une grande déception
  • Beaucoup pensent à l'immigration clandestine

DAOUAR HICHER: "Arrêtez de nous considérer comme des voyous!": dans plusieurs quartiers défavorisés de la banlieue de Tunis, des jeunes, privés d'opportunités et d'infrastructures, ont trouvé refuge et un début de notoriété dans la musique, le cinéma et la photo.

Stigmatisés socialement, les quartiers populaires de la capitale qui ont subi des décennies de pauvreté et d'érosion des services publics, ont la réputation d'abriter des délinquants et d'être des zones de non droit.

"Ces préjugés sont méprisants et nous compliquent la vie", déplore Mohamed Ali Ayari, de Douar Hicher, banlieue très pauvre et surpeuplée dans l'ouest de Tunis.

Ce jeune de 23 ans, qui travaille comme gardien de sécurité, a remporté récemment avec un morceau de rap une compétition organisée par International Alert, qui travaille sur l'inclusion.

"Je veux sortir à la lumière", chante Mohamed Ali dans son clip réalisé avec l'aide de cette ONG.

L'organisation a sélectionné des dizaines de jeunes de Daouar Hicher, Fouchana, Cité Ettahdhamen et Sidi Hssine, pour qu'ils s'expriment à leur manière, à travers la musique, un documentaire et des photos, sur la thématique de la violence.

"Il y a des gens qui vivent la violence au quotidien, certains la pratiquent et d'autres la subissent. C'est à partir de là, que nous avons pensé à la canaliser dans des activités culturelles", explique Houcem Ayari, coordinateur à International Alert.

«Parler de nous»

Dans une petite chambre transformée en studio, au milieu de constructions anarchiques à Daouar Hicher, Mohamed Ali enregistre ses couplets, élaborés avec des amis du même quartier.

En l'absence d'espaces culturels, une situation qui accroît, selon eux, le risque de sombrer dans la délinquance, ces jeunes ont équipé un studio, avec les moyens du bord.

"Nous avons choisi la musique pour parler de nous, de notre vie, de jeunes (qui se sont) perdus (en route) et d'autres qui veulent réussir, des policiers qui nous agressent verbalement et physiquement, de l'Etat qui nous marginalise et de la société qui nous stigmatise", lance Wassim Tayachi, 22 ans.

Selon lui, leur provenance de "quartiers difficiles" entrave leur recrutement sur le marché de l'emploi ou l'obtention de papiers officiels.

Ces jeunes, déçus de l'Etat dans un pays secoué par de vives tensions politiques et une crise socio-économique, ont trouvé dans le rap "une thérapie contre la dépression et les tentations interdites", renchérit Mohamed Ali qui veut devenir un grand rappeur mais doute de réaliser son rêve en Tunisie.

L'échec de la classe politique à améliorer leur quotidien suscite chez ces jeunes une grande déception. Beaucoup pensent à l'immigration clandestine.

"Un Etat qui n'écoute pas ses jeunes ne pourra rien leur donner", regrette Wassim.

«Volonté de réussir»

Mariem Chourabi, 24 ans, dotée d'un master en fiscalité et comptabilité, a ouvert un centre de soutien scolaire dans son quartier à Fouchana il y a un an et a participé à la réalisation d'un documentaire.

Il évoque l'injustice sociale et économique, le harcèlement sexuel, la dégradation des transports publics et des infrastructures et la déscolarisation.

Pourtant beaucoup de jeunes des quartiers populaires "ont la volonté de réussir plus que les autres parce que leurs conditions de vie les y poussent davantage", dit-elle.

A Sidi Hssine, Belhssan Jabri, 26 ans, ingénieur en génie civil au chômage, a choisi la photo pour dire aux autorités: "nous ne méritons pas la marginalisation!".

Dans ses clichés, il montre des espaces délaissés de son quartier "qui pourraient être des endroits pour des activités sportives, culturelles ou des jardins, au lieu d'être encombrés en permanence de bacs à ordures remplis à ras bord".

Dénonçant cette "violence environnementale", Belhassen espère voir émerger une "volonté réelle" des hauts responsables pour réaliser des changements.

"Il y a des médecins, des ingénieurs, des artistes et beaucoup de jeunes cultivés et diplômés issus de notre quartier, donc il ne faut pas regarder uniquement le côté négatif ni dévaloriser les jeunes venant des quartiers populaires", dit-il encore.


Le pianiste Igor Levit va donner un concert de plus de 16 heures à Londres

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
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  • Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance"
  • "Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée

LONDRES: Le pianiste Igor Levit va donner jeudi et vendredi à Londres un concert unique, prévu pour durer plus de 16 heures, en jouant en solo "Vexations" d'Erik Satie, sous la direction de l'artiste Marina Abramovic, connue pour ses performances radicales.

Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance".

"Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée. Elle se traduit ainsi par une performance durant entre 16 et 20 heures. Habituellement, plusieurs pianistes se succèdent pour jouer ce morceau sans interruption.

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19.

C'est la première fois qu'il va jouer ce morceau en intégralité en public.

Le public va être "témoin (d'un moment) de silence, d'endurance, d'immobilité et de contemplation, où le temps cesse d'exister", a commenté Marina Abramovic, artiste serbe de 78 ans. "Igor interprète +Vexations+ avec des répétitions infinies, mais une variation constante", a-t-elle ajouté.

Le rôle de Marina Abramovic, connue pour ses performances qui poussent les spectateurs dans leurs retranchements, est de "préparer le public à cette expérience unique".

Erik Satie avait lui écrit à propos du morceau à l'adresse des pianistes: "Pour jouer 840 fois de suite ce motif, il sera bon de se préparer au préalable, et dans le plus grand silence, par des immobilités sérieuses".

Dans une interview au quotidien britannique The Guardian, Igor Levit a encouragé son public à "se laisser aller". "C'est juste un espace vide, alors plongez dedans", a-t-il dit.

Les spectateurs pourront assister au concert soit pour une heure soit dans sa totalité. Il commencera jeudi à 10H00 (09H00 GMT).


Les Marionnettes enchantent Dubaï: une scène multilingue et inclusive pour les enfants

Les Marionnettes mise sur la créativité, l'inclusion et la découverte, loin des écrans. (Photo: fournie)
Les Marionnettes mise sur la créativité, l'inclusion et la découverte, loin des écrans. (Photo: fournie)
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  • Depuis son ouverture, Les Marionnettes propose des spectacles en anglais, français, arabe, et récemment en russe
  • «On veut que chaque enfant puisse s’identifier à ce qu’il voit sur scène, peu importe sa langue», explique Gabriella, la fondatrice

DUBAÏ: À Dubaï, dans un paysage dominé par les écrans et les technologies dernier cri, un petit théâtre de marionnettes attire l’attention des familles en quête d’activités culturelles pour leurs enfants. Fondé par Gabriella Skaff, Les Marionnettes propose une expérience ludique, éducative et multilingue qui séduit aussi bien les enfants que leurs parents.

Une idée née d’un besoin personnel

Gabriella Skaff, franco-libanaise et ancienne juriste en droit bancaire, a quitté les salles d’audience pour donner vie à un tout autre théâtre: celui des marionnettes.

«J’ai toujours rêvé de créer quelque chose qui me ressemble, mais je n’avais pas encore trouvé la bonne idée», confie-t-elle avec sincérité.

C’est lors de vacances en France que tout a commencé: «Nous emmenions souvent nos enfants voir des spectacles de marionnettes, et ils étaient fascinés. Mon fils n’avait même pas deux ans, mais il restait captivé du début à la fin. À Dubaï, rien de tel n’existait», raconte Gabriella.

De retour aux Émirats, elle décide alors de donner vie à ce manque. «Au départ, c’était une petite idée… Puis les choses se sont enchaînées: nous avons trouvé un local, pris contact avec des marionnettistes en France, et après plusieurs mois de préparation, le théâtre a ouvert ses portes en novembre 2024.»

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Les Marionnettes propose des spectacles interactifs pour enfants en plusieurs langues (français, anglais, arabe, russe…).

Une programmation multilingue et interactive

Depuis son ouverture, Les Marionnettes propose des spectacles en anglais, français, arabe, et récemment en russe. «On veut que chaque enfant puisse s’identifier à ce qu’il voit sur scène, peu importe sa langue», explique Gabriella.

Le théâtre offre deux formats principaux:

  • Les spectacles de marionnettes, qui durent environ une heure avec une pause au milieu.
  • Le storytelling, plus court (30 minutes), où un animateur lit un livre, parfois accompagné de marionnettes, suivi d’une activité créative comme du bricolage, du dessin ou la fabrication de masques.

«L’objectif, c’est de rendre la lecture vivante et de faire participer les enfants. On essaie aussi de varier les langues: italien, arabe, français, russe… bientôt l’espagnol.»

Une activité éducative qui séduit les écoles

Les écoles ont rapidement adhéré au concept. «Les retours sont extrêmement positifs, confie Gabriella. Les enseignants apprécient le fait que ce soit à la fois pédagogique et ludique. Les enfants participent activement, posent des questions, interagissent avec les marionnettes… et surtout, ils gagnent en confiance.»

La différence entre les visites scolaires et familiales est notable. «À l’école, les enfants sont plus calmes, attentifs, et respectent davantage les consignes. Lorsqu’ils viennent avec leurs parents, ils se montrent plus spontanés, plus libres… mais tout aussi enthousiastes. Ce sont deux énergies différentes, et chacune a son charme.»

Les enfants sont encouragés à s’exprimer pendant les spectacles. «Les marionnettes posent des questions, les enfants répondent. Même les plus timides finissent par participer.»

Un message fort autour de l’inclusion

Le 30 avril, Les Marionnettes lancera un spectacle inédit en partenariat avec Sanad Village, une organisation qui accompagne les enfants à besoins spécifiques. «C’est une histoire sur l’inclusion. Le but, c’est d’apprendre aux enfants à accepter les différences, à être gentils et ouverts aux autres», explique Gabriella.

Le spectacle sera présenté en anglais, en français et en arabe, et proposé aux écoles ainsi qu’au grand public.  C’est un sujet important. On veut que les enfants comprennent qu’il ne faut pas avoir peur de ce qui est différent.»

Une ambition régionale

L’objectif de Gabriella ne s’arrête pas à Dubaï. «On aimerait bien développer le concept dans d’autres pays de la région: Arabie saoudite, Bahreïn, Qatar, Liban. Il existe un véritable besoin pour ce type d’activité culturelle.»

Pour rendre le projet plus mobile, un théâtre itinérant est en préparation. «On pourra l’emmener dans les écoles, dans d’autres villes, et même l’utiliser pour des événements privés ou des anniversaires.»

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Gabriella Skaff - Fondatrice, Les Marionnettes. (photo: fournie)

Une programmation à découvrir en famille

Les spectacles ont lieu les week-ends – vendredi, samedi et dimanche – tandis que les séances de storytelling se déroulent en semaine. Une activité pour les tout-petits, appelée «Bright Minds», est aussi proposée le lundi matin.

«Le programme change chaque mois et on publie les détails chaque semaine sur notre site et nos réseaux sociaux. Les gens peuvent réserver en ligne ou acheter leurs billets sur place», précise Gabriella.

Prochaine étape: un club de lecture pour enfants, des ateliers théâtre et même des cours pour apprendre à créer ses propres marionnettes.


Les îles Farasan célèbrent l'arrivée annuelle du hareng

Le poisson haridé, ou poisson-perroquet, est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. (SPA)
Le poisson haridé, ou poisson-perroquet, est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. (SPA)
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  • Les côtes des îles Farasan sont chaque année le théâtre d'une arrivée massive de poissons harid qui voyagent pendant des mois de l'océan Indien à la mer Rouge, en passant par la mer d'Arabie.
  • Le harid, également appelé « poisson-perroquet », est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. 

RIYAD : Les côtes des îles Farasan sont chaque année le théâtre d'une arrivée massive de poissons harid qui voyagent pendant des mois de l'océan Indien à la mer Rouge, en passant par la mer d'Arabie.

Le harid, également appelé « poisson-perroquet », est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. 

Reconnaissable à son bec de perroquet et à ses couleurs vives, le harid prospère dans les habitats riches en coraux, avec plus de 90 espèces, chacune ayant des formes et des couleurs uniques.

Farasan, un groupe d'îles coralliennes situées à 40 km de la côte de Jazan, devient le site de cet événement naturel lorsque de vastes bancs de poissons harid se rassemblent, selon l'agence de presse saoudienne. 

Les habitants peuvent prédire l'arrivée du poisson grâce à une odeur distincte qui se dégage de la mer après le coucher du soleil, le 15^e jour du mois lunaire.

La pêche annuelle au harid, célébrée à la fin du mois d'avril, est une tradition qui reflète l'héritage culturel des îles et qui fait la joie des habitants des îles Farasan depuis des siècles.

Reconnaissant l'importance culturelle et touristique de cette pêche, le prince Mohammed bin Nasser, gouverneur de Jazan, a inauguré le premier festival du harid des îles Farasan en 2005.

La 21^e édition du festival a été lancée lundi, mettant en avant les îles comme une destination prometteuse pour les touristes et les investisseurs. 

Le festival met en avant les coutumes, les traditions, les jeux folkloriques, l'artisanat et les sites historiques uniques de Farasan, tout en présentant l'artisanat local, comme les pièges à pêche, le tissage de palmiers, la création de sacs et de tapis, ainsi que le tricotage de chapeaux. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com