La République islamique peut se servir du pacte irano-saoudien annoncé la semaine dernière comme d'une incitation à apporter des changements fondamentaux à sa politique régionale, ce qui offrirait plusieurs avantages à la nation iranienne.
Tout d'abord, lorsque l'Iran établit des relations amicales avec les États arabes, notamment l'Arabie saoudite, le Koweït, les Émirats arabes unis et le Bahreïn, et qu'il respecte leur souveraineté et leurs intérêts nationaux, la position de Téhéran au sein de ces nations s'en trouve incontestablement renforcée, de même que sa légitimité au Moyen-Orient.
L'absence de dialogue et de relations diplomatiques entre les pays peut avoir des conséquences inattendues, telles que l'exacerbation de la méfiance et l'apparition de malentendus, de tensions, de conflits, voire de guerres. Selon FutureLearn, le rôle principal de la diplomatie est de «garantir des relations pacifiques entre les pays. Il peut s'agir de négocier des accords commerciaux, de discuter de problèmes mutuels, de mettre en œuvre de nouvelles politiques et de régler des différends. Les conséquences de l'absence de relations diplomatiques peuvent être très graves: conflits, violences, voire guerres».
Les avantages économiques liés à l'établissement de bonnes relations et de liens diplomatiques avec d’autres pays, en particulier les pays voisins, sont innombrables. Par exemple, en ce qui concerne l'industrie du tourisme, la République islamique pourrait attirer davantage de visiteurs, ce qui contribuerait de manière significative à son développement économique et fournirait des revenus aux citoyens ordinaires en Iran, ainsi qu'aux petites entreprises.
L'Iran abrite 21 sites classés au patrimoine mondial de l’Unesco et occupe par conséquent le neuvième rang mondial. Un rapport de 2019 de l'ILIA Corporation indique ce qui suit:«L'Iran, le pays des quatre saisons, de l'histoire et de la culture, des souvenirs et de l'authenticité avec des montagnes et des déserts, des forêts, des plaines et des mers, des cultures et des traditions a un immense potentiel pour attirer les touristes internationaux. Les voyages et le tourisme constituent une activité économique importante dans la plupart des pays. L'Iran a été reconnu comme la destination de voyage la plus compétitive par le Forum économique mondial en raison des faibles prix du carburant et des chambres d'hôtel bon marché, qui sont les raisons les plus courantes.»
Si l'Iran entretenait des relations amicales avec d'autres pays de la région, les États-Unis pourraient juger opportun de lever les sanctions contre Téhéran.
Majid Rafizadeh
Si l'Iran entretenait des relations amicales avec d'autres pays de la région – et s'il n'était plus considéré comme une menace mais plutôt comme un acteur constructif –, les États-Unis pourraient juger opportun de lever les sanctions contre Téhéran. Les sanctions américaines sur des dizaines de secteurs autres que le pétrole et le gaz, tels que les métaux et l'or, pourraient également être levées.
L'Iran possède le plus grand marché émergent inexploité au monde, d'une valeur de plus de 1 000 milliards de dollars. Des opportunités existent dans presque tous les secteurs et l'économie a désespérément besoin de nouveaux capitaux. L'assouplissement des sanctions renforcerait la légitimité mondiale du pays et les entreprises étrangères seraient autorisées à y opérer. L'Iran réintégrerait la communauté internationale, les systèmes bancaires et financiers internationaux et le marché libre du pétrole. Cela aiderait le pays à réaliser son potentiel économique en tant que deuxième nation la plus peuplée du Moyen-Orient. Il dispose d'une classe moyenne importante, éduquée et avisée, ainsi que des deuxième et quatrième réserves mondiales de gaz et de pétrole, respectivement.
Le monde occidental a déjà salué l'accord entre l'Arabie saoudite et l'Iran. Peter Stano, principal porte-parole de l'Union européenne (UE) pour les affaires extérieures, a déclaré:«L'Union européenne se félicite de l'accord annoncé sur la reprise des relations diplomatiques entre le royaume d'Arabie saoudite et la République islamique d'Iran, et attend avec impatience sa mise en œuvre [...]. [L'UE] reste prête à s'engager avec tous les acteurs de la région dans une approche progressive et inclusive, et en toute transparence.»
En outre, lorsque le gouvernement iranien instaurera la confiance et établira de véritables liens diplomatiques avec ses voisins arabes, il ne verra plus aucune raison de soutenir ses mandataires. Imaginez la somme d'argent que la République islamique économiserait si elle cessait de soutenir ses mandataires au Moyen-Orient. Par ailleurs, si ces acteurs et groupes non étatiques ne recevaient plus de soutien financier et d'armes, leur capacité à créer des troubles et des conflits dans la région diminuerait considérablement. La stabilité et la sécurité du Moyen-Orient s'en trouveraient renforcées et la région deviendrait plus sûre et plus prospère pour toutes les nations.
L'Iran serait également en mesure de réorienter les milliards de dollars qu'il consacre actuellement à ses mandataires vers la création d'emplois dans le pays, l'augmentation des salaires et la modernisation de ses infrastructures. Cela réduirait la frustration économique ressentie par de nombreux Iraniens. L'une des raisons sous-jacentes des manifestationsrécurrentes en Iran est l'économie, en particulier l'inflation galopante, le taux de chômage élevé et les salaires bas.
Par ailleurs, l'Iran serait en mesure d'attirer les investissements étrangers et les pays de la région augmenteraient leurs échanges avec l'Iran, ce qui aiderait Téhéran à réaliser son potentiel économique. Il convient de noter que l'Arabie saoudite possède la plus grande économie du monde arabe et constitue le plus grand marché économique libre du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord.
Enfin, le gouvernement iranien peut tirer une leçon essentielle de l'histoire mondiale. L'Europe a été touchée par des conflits – deux guerres mondiales qui ont dévasté ses populations et ses économies –, mais, à la fin des années 1940, plusieurs nations ont tracé la voie vers l'amélioration de leurs relations diplomatiques, de leurs économies et de leurs niveaux de vie. Elles sont ensuite devenues prospères en se concentrant sur les questions intérieures et en améliorant leurs relations avec leurs voisins.
En un mot, la balle est dans le camp de l'Iran. La République islamique peut profiter de l'élan généré par son accord avec l'Arabie saoudite pour modifier ses politiques régionales, améliorer ses liens avec toutes les nations arabes et, par la suite, renforcer son économie et sa légitimité au Moyen-Orient.
Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Twitter:@Dr_Rafizadeh
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com