Au Liban, l'inquiétant effondrement des institutions

Un manifestant jette une brique sur une banque après avoir mis le feu à des pneus lors d'une manifestation à Beyrouth le 16 février 2023. (AFP)
Un manifestant jette une brique sur une banque après avoir mis le feu à des pneus lors d'une manifestation à Beyrouth le 16 février 2023. (AFP)
Short Url
Publié le Vendredi 03 mars 2023

Au Liban, l'inquiétant effondrement des institutions

  • Sans président depuis quatre mois, le pays est dirigé par un gouvernement démissionnaire aux pouvoirs réduits alors que le pouvoir judiciaire vacille que le secteur public s'effondre
  • La crise économique et financière inédite, qui a fait plonger dans la pauvreté plus de 80 pc de la population, alimente les craintes d'une dérive sécuritaire

BEYROUTH: Le chef de l'un des principaux organes de sécurité au Liban a achevé son mandat vendredi sans qu'il soit remplacé, un nouvel exemple du délitement des institutions qui alimente les craintes de la communauté internationale de voir ce pays sombrer.

Sans président depuis quatre mois, le pays est dirigé par un gouvernement démissionnaire aux pouvoirs réduits alors que le pouvoir judiciaire vacille que le secteur public s'effondre.

La crise économique et financière inédite, qui a fait plonger dans la pauvreté plus de 80 pc de la population, alimente les craintes d'une dérive sécuritaire.

Malgré ces menaces, les dirigeants politiques ont été incapables de s'entendre pour prolonger le mandat du puissant général Abbas Ibrahim, directeur de la Sûreté générale, ou lui trouver un remplaçant.

L'officier, qui a atteint l'âge de la retraite, s'était imposé comme médiateur politique au Liban et avait contribué à la libération d'otages en Syrie.

"Le pays est dans un état de délitement quasi-absolu", explique l'analyste Karim Bitar. "Nous vivons en direct un effondrement de toutes les institutions étatiques qui tenaient encore debout".

Grèves et absentéisme paralysent quasi-totalement le secteur public, les salaires étant devenus dérisoires en raison de la perte de plus de 95 pc de la valeur de la monnaie nationale.

"L'Etat n'est même plus en mesure de collecter ses impôts", l'immatriculation d'une voiture ou l'enregistrement de transactions deviennent quasi-impossibles, l'année scolaire est quasiment perdue pour les élèves du secteur public en raison d'une grève des enseignants, souligne l'analyste.

Selon lui, "cette crise est probablement la plus grave dans l'histoire du Liban", qui a pourtant vécu une guerre civile aux implications régionales (1975-1990) et de nombreuses secousses au cours de ses cent ans d'existence.

Jeudi, le groupe de soutien international au Liban, qui comprend notamment les cinq membres du Conseil de sécurité de l'ONU, s'est dit "profondément inquiet des ramifications de la vacance présidentielle prolongée".

Dans un communiqué, il a averti que "le statut quo n'est pas viable" et "paralyse l'Etat à tous les niveaux", appelant "les responsables politiques et les membres du parlement à assumer leurs responsabilités (...) en élisant un président sans délai".

Réunion de Paris 

Profondément divisés entre le camp du puissant Hezbollah pro-iranien et ses celui de ses opposants, les députés se sont réunis à 11 reprises sans pouvoir s'entendre sur l'élection d'un successeur à Michel Aoun, dont le mandat a expiré le 31 octobre.

Depuis le 19 janvier, le chef du Législatif Nabih Berri n'a plus convoqué de nouvelle réunion, laissant le pourrissement s'installer.

Face à ce blocage, Paris a réuni le 6 février des représentants des Etats-Unis et de trois importants pays de la région, l'Arabie saoudite, l'Egypte et le Qatar.

La réunion a abouti à une "totale unité de vues" sur le fait que le prochain président devra "ne pas être clivant, être intègre, capable de regagner la confiance de la communauté internationale et de garantir l’unité et la cohésion du pays", indique une source diplomatique occidentale à l'AFP.

Il devra dans le même temps être "capable de travailler avec un Premier ministre et un gouvernement qui portent un projet de réforme et envoient un signal de changement et de réformes sérieuses", ajoute cette source.

La réunion a évoqué des "leviers de pression" sur les responsables politiques qui bloquent le processus, sans les préciser, d'après cette source.

Les divergences entre le président sortant et différents Premiers ministres ont conduit à des mois de paralysie politique.

Selon des sources proches de participants à la réunion, ils ont constaté que les noms du commandant en chef de l'armée Joseph Aoun, qui jouit de bonnes relations avec la plupart des parties politiques, et l'ancien ministre Sleiman Frangié, allié du Hezbollah, se détachaient.

Mais d'autres noms ont également été évoqués, comme Jihad Azour, responsable régional du Fonds monétaire international (FMI), avec lequel un accord est vital pour le pays.

Le FMI a dénoncé la lenteur des autorités dans la mise en place des réformes nécessaires pour débloquer les aides internationales.

Pour Karim Bitar, seul "un accord entre les puissances régionales qui se livrent des guerres par procuration sur le territoire libanais".

Il exprime la crainte de voir "une dégradation encore plus forte de la situation économique qui pourrait aboutir à des incidents sécuritaires".

Impuissants face à cette impasse, les évêques maronites, puissante communauté chrétienne dont doit être issu le chef de l'Etat, ont appelé ... à une "journée de prières" le 10 mars pour l'élection d'un président de la République.


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Short Url
  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Short Url
  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).


L'Égypte annonce que 50 camions-citernes de carburant entreront chaque jour dans la bande de Gaza

Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
Short Url
  • Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.
  • M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

LE CAIRE : Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.

M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

La trêve devrait entrer en vigueur dimanche à 13 h 30 GMT, ouvrant ainsi la voie à un afflux massif d'aide, selon les médiateurs.

Des centaines de camions sont garés du côté égyptien du poste frontière de Rafah, un point d'entrée autrefois vital pour l'aide humanitaire, fermé depuis mai, lorsque les forces israéliennes ont pris le contrôle du côté palestinien du point de passage.

Au cours d'une conférence de presse conjointe avec son homologue nigérian, M. Abdelatty a déclaré : « Nous espérons que 300 camions se rendront au nord de la bande de Gaza », où des milliers de personnes sont bloquées dans des conditions que les agences humanitaires qualifient d'apocalyptiques.

Les travailleurs humanitaires ont mis en garde contre les obstacles monumentaux qui pourraient entraver les opérations d'aide, notamment la destruction des infrastructures qui traitaient auparavant les livraisons.