PARIS : Omniprésent dans les médias, en première ligne sur les retraites, jamais à court d'une pique contre les oppositions, Gabriel Attal poursuit sa précoce ascension au sein de la majorité, qui commence à lui imaginer un avenir au delà du ministère du Budget.
Le temps n'est plus -juillet 2020, une éternité- où le Premier ministre Jean Castex se demandait quel "os à ronger supplémentaire" refiler au "jeune Gabriel", tout juste promu porte-parole du gouvernement. Désormais, le "jeune Gabriel", 33 ans, est sur tous les fronts.
Lundi, le ministre délégué aux Comptes publics épaulait Olivier Dussopt pour l'examen de la réforme des retraites à l'Assemblée. Et si le ministre du Travail peaufine ce dossier depuis des mois, c'est son jeune collègue qui a déclenché le buzzomètre avec sa formule: "une réforme ou la faillite".
Une assertion contestée par des spécialistes (l'homme d'affaires Pierre Ferracci, l'économiste Michaël Zemmour). "On a compris que vous aviez décidé de mettre de très gros sabots", a rétorqué le socialiste Jérôme Guedj. Qu'importe: "c'est plus facile d'écouter un slogan qu'une réponse technique", observe un cadre de la majorité.
Le débat parlementaire promet. En octobre, le patron des députés communistes André Chassaigne avait déjà traité d'"insolent" cet impétrant qui dénonçait une "coalition de l'irresponsabilité" des oppositions.
Gabriel Attal tient la ligne. Et l'incarne en grande partie. C'est lui qui est envoyé au 20h00 de TF1 au soir de la deuxième journée de mobilisation. Lui encore qui est dépêché sur France 2 après Élisabeth Borne pour contrer les oppositions.
Depuis son passage au porte-parolat (2020-2022), chacune de ses sorties a le don de rasséréner la macronie. "Attal, il est formidable. Il parle, on l'écoute. C'est une voix. Il a du talent", s'émerveille un conseiller de l’Élysée.
"Le président s'appuie beaucoup sur Gabriel parce qu'il a cette qualité, authenticité, simplicité, proximité", poursuit cette source.
Porte-parole du gouvernement est pourtant un métier délicat. Tous ceux qui l'ont précédé dans l'ère Macron -Christophe Castaner, Benjamin Griveaux, Sibeth Ndiaye- ont disparu du champ politique. Sa remplaçante Olivia Grégoire a tenu un mois et demi avant de retourner à Bercy, remplacée par Olivier Véran, rompu à l'exercice au ministère de la Santé pendant deux ans.
Incarner l'espace central
C'est en avril 2018 que Gabriel Attal, ex-militant PS, marcheur de la première heure devenu député, a percé le mur du son en dénonçant la "gréviculture" à la SNCF.
Sa biographie mentionne une expérience professionnelle d'un an à la Villa Medicis à Rome et une activité de quatre mois de consultant en auto-entrepreneur en 2017. Entre temps, ce diplômé de Sciences Po Paris fut cinq ans durant conseiller de Marisol Touraine, ministre de François Hollande.
Ses ambitions politiques furent nettes dès 2018 lorsque Gabriel Attal annonça sa candidature à la présidence du groupe à l'Assemblée, avant de la retirer. Quelques jours plus tard, il entrait au gouvernement, dépossédant François Baroin du record de précocité de la Ve République.
En le voyant promu à Bercy en 2022, nombre de voix dans la majorité l'imaginaient déjà tenter de "manger son ministre de tutelle, comme il l'a fait à l'Education avec (Jean-Michel) Blanquer", selon les mots d'une conseillère. Mais pour l'heure, point de friction apparente avec Bruno le Maire.
"Il y a un enjeu pour lui de passer d'un homme médiatique à un homme de dossiers. C'est une étape de sa construction politique", juge une source proche du ministre de l'Economie. Mais "ça se passe bien, d'autant que souvent, tu te demandes qui de Bruno ou de Gabriel est le plus à droite."
"Attal n'a mis qu'un mois à vraiment devenir ministre du Budget", salue un député Renaissance qui l'imagine encore monter en grade. "Il commence à se renseigner sur son avenir", affirme un des premiers compagnons de route du président.
Avec un axe politique: incarner l'espace central. "Trop souvent, chez Renaissance, on se positionne par rapport à l'aile gauche ou l'aile droite", lançait l'intéressé lors des université d'été du MoDem. Là où certains de ses collègues envisagent un retour du clivage droite-gauche pour l'après Macron.