Le sauvetage oublié en août 1942 d'une centaine d'enfants juifs à Lyon

Les chasseurs nazis français Serge Klarsfeld et son épouse Beate Klarsfeld à l'inauguration du «Mur des noms» rénové du mémorial de la Shoah à Paris, le 27 janvier 2020, à l'occasion du 75e anniversaire de la libération du camp d'extermination nazi d'Auschwitz-Birkenau (Michel Euler/Pool/AP/AFP)
Les chasseurs nazis français Serge Klarsfeld et son épouse Beate Klarsfeld à l'inauguration du «Mur des noms» rénové du mémorial de la Shoah à Paris, le 27 janvier 2020, à l'occasion du 75e anniversaire de la libération du camp d'extermination nazi d'Auschwitz-Birkenau (Michel Euler/Pool/AP/AFP)
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Publié le Vendredi 20 novembre 2020

Le sauvetage oublié en août 1942 d'une centaine d'enfants juifs à Lyon

  • En août 1942, une centaine d'enfants juifs, internés en France dans un camp près de Lyon et promis à la mort, vont être sauvés grâce à une formidable chaîne de solidarité
  • Ce sauvetage de 108 enfants juifs étrangers au cours d'une opération coup de poing était jusque-là méconnu

LYON, France : C'était une page d'histoire effacée des mémoires : en août 1942, une centaine d'enfants juifs, internés en France dans un camp près de Lyon et promis à la mort, vont être sauvés grâce à une formidable chaîne de solidarité et l'abnégation de leurs parents.  

"Je me suis intéressée au camp de Vénissieux en 1992, pour mon mémoire de maîtrise, puis plus tard (dans) deux thèses. Depuis près de 30 ans, je n'ai pas arrêté !", explique à l'AFP l'historienne Valérie Portheret, qui a retrouvé des sauveteurs et des sauvés, ou leurs descendants, les interviewant à Lyon (centre-est), en Israël ou aux États-Unis.

"Ce sauvetage de 108 enfants juifs étrangers au cours d'une opération coup de poing était jusque-là méconnu. Aucun autre d'une telle ampleur n'a eu lieu en France pendant la Seconde guerre mondiale", assure-t-elle.

L'avocat et "chasseur de nazis", Serge Klarsfeld, qui évoquait le camp de Vénissieux en 1983 dans l'un de ses livres, a encouragé la chercheuse à reconstituer la liste des enfants sauvés, qui n'existait pas. "C'est devenu pour moi une mission", relève-t-elle.

Grâce à sa ténacité, l'historienne a retrouvé les noms de 90 des 108 enfants.

Ce 26 août 1942, pour répondre aux exigences des nazis, le gouvernement de Vichy ordonne la rafle des juifs étrangers dans la région de Lyon. Originaires d'Allemagne, d'Autriche, de Pologne, de Tchécoslovaquie ou d'URSS, ils sont 1.016 à être arrêtés et rassemblés dans le camp de Vénissieux.

Selon une circulaire du 5 août, les enfants non accompagnés de leurs parents ne peuvent être déportés. Les sauveteurs s'engouffrent dans cette brèche.

Dans la nuit du 28 au 29 août, des membres d'oeuvres sociales, faisant partie de la commission chargée de déterminer si un interné bénéficie d'une exemption, vont convaincre en catimini les parents de signer un acte d'abandon en faveur de l'association l'Amitié chrétienne. Des dizaines de délégations de paternité en blanc sont ronéotypées.

Au total, 108 attestations sont signées. Valérie Portheret va retrouver en 2006 dans un vieux carton d'archives plusieurs de ces documents à l'encre désormais délavée.

Photos exceptionnelles

Dans le camp, les scènes sont déchirantes: "demander à des parents d'abandonner leurs enfants, c'est terrible, même pour les sauver. Il fallait avoir vraiment confiance".

Les enfants sont exfiltrés le 29 août. On les cache. Ils seront recueillis par des familles de toutes confessions. Le même jour, 545 adultes sont conduits par les gendarmes à la gare, direction Drancy, près de Paris. Puis le camp d'Auschwitz. La majorité sera gazée.

Les sauveteurs ont exfiltré d'autres Juifs en danger, soutenus par le primat des Gaules (haut responsable de l'église catholique française), Mgr Pierre Gerlier.

Mais l'odyssée des enfants n'est pas terminée. La police se lance à leur poursuite. Ils devront ensuite souvent changer de domicile.

Dans des tracts, la Résistance prévient: "Vous n'aurez pas les enfants". C'est le titre choisi par Valérie Portheret pour son livre retraçant ce bouleversant épisode (éditions XO), lauréat du prix Seligmann 2020 contre le racisme.

"Tout avait été fait pour ne laisser aucune trace du camp", explique l'historienne. Mais des travailleurs indochinois en transit dans son enceinte ont pris des photos. "J'ai retrouvé certains clichés".

"C'est fou que ce soient eux qui aient gardé ces traces exceptionnelles. J'y ai reconnu Lotte, l'une de mes premiers témoins. Quelle émotion !".

C'est "le seul fonds photographique des rafles de l'été 1942". Pour celle du Vel d'Hiv, il n'y a qu'une photo prise à l'extérieur.

"Les sauveteurs ne se voyaient pas en héros. Pour eux, cela coulait de source de ne pas livrer des enfants aux nazis. La première chose qu'ils me demandaient, c'était : que sont-ils devenus ?", s'émeut l'historienne qui voudrait faire un "grand film percutant sur cette histoire".

"J'ai approché des producteurs et suis en train d'écrire un synopsis détaillé". L'intrigue sera centrée sur une famille de Chicago, des émigrés polonais qui tentent de sauver une petite fille de compatriotes. Eux n'y parviennent pas. Elle sera sauvée à Vénissieux.

"Je veux faire connaître cette histoire à l'international".

"Il y a aussi un documentaire en cours et un projet de BD. Mon livre doit par ailleurs être traduit en anglais et le musée d'Auschwitz souhaiterait une traduction en polonais".


« Attentat terroriste » en France : un mort, le ministre de l'Intérieur blâme l'Algérie sur l'immigration

La police scientifique française travaille sur le site d'une attaque au couteau où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux policiers à Mulhouse, dans l'est de la France, le 22 février 2025. (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
La police scientifique française travaille sur le site d'une attaque au couteau où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux policiers à Mulhouse, dans l'est de la France, le 22 février 2025. (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
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  • dans l'est de la France, un homme de 37 ans, fiché pour risque de « terrorisme », a tué une personne et blessé au moins trois policiers à l'arme blanche.
  • Selon le président Emmanuel Macron, il s'agit d'un « acte de terrorisme », tandis que le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a mis en cause la non-coopération de l'Algérie sur l'immigration.

MULHOUSE, FRANCE : Samedi, dans l'est de la France, un homme de 37 ans, fiché pour risque de « terrorisme », a tué une personne et blessé au moins trois policiers à l'arme blanche. Selon le président Emmanuel Macron, il s'agit d'un « acte de terrorisme », tandis que le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a mis en cause la non-coopération de l'Algérie sur l'immigration.

Selon des témoignages concordants obtenus par l'AFP, l'assaillant a crié « Allah u Akbar » (« Dieu est le plus grand » en arabe) à plusieurs reprises samedi, lors de l'attaque menée dans la ville de Mulhouse, ainsi que lors de son interpellation par les forces de l'ordre.

Selon le parquet de Mulhouse, l'assaillant a agressé les victimes avec un couteau, blessant notamment un Portugais de 69 ans qui est décédé.

Deux policiers municipaux ont été grièvement blessés, l'un à la carotide et l'autre au thorax, a affirmé à l'AFP le procureur de Mulhouse Nicolas Heitz. Si le second a pu sortir de l'hôpital, le premier doit être transféré dimanche au centre hospitalier de Colmar, à environ 40 kilomètres de Mulhouse. Trois autres policiers municipaux auraient été plus légèrement atteints, a précisé le procureur.

En déplacement au Salon de l'agriculture à Paris, Emmanuel Macron a dénoncé un « acte de terrorisme islamiste » qui ne fait pas de doute.

Nicolas Heitz a déclaré que le suspect était inscrit au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste.

Interrogé sur la chaîne TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et accusé l'Algérie de l'avoir refusé à dix reprises.

« Une fois de plus, c'est le terrorisme islamiste qui a frappé. Et, une fois de plus, j'ajoute que ce sont les désordres migratoires qui sont aussi à l'origine de cet acte terroriste », a-t-il lancé.

Devant l'hôtel de police de Mulhouse, où il a rendu hommage au sang-froid des policiers, M. Retailleau a précisé que le suspect présentait également « un profil schizophrène » et que son acte présentait « une dimension psychiatrique ».

Selon des sources syndicales, le suspect était placé sous contrôle judiciaire avec assignation à résidence.

Les faits se sont déroulés à 15 h 40 (14 h 40 GMT), près d'un marché très animé du quartier populaire.

L'homme a d'abord blessé grièvement des agents de stationnement, puis un sexagénaire portugais, mortellement atteint d'un coup de couteau.

« Nous ne savons pas s'il s'est trouvé par hasard sur son chemin ou s'il a fait un acte de bravoure en s'interposant », a indiqué le ministre.

L'assaillant a ensuite été poursuivi par des policiers municipaux qui sont parvenus à le maîtriser sans faire usage d'armes à feu.

À la nuit tombée, plusieurs membres de la police scientifique s'affairaient encore à la lueur d'un projecteur sur la dalle située à l'extérieur du marché couvert. Le périmètre était gardé par des militaires.

« Le fanatisme a encore frappé et nous sommes en deuil », a réagi le Premier ministre centriste François Bayrou, qui a adressé ses « félicitations aux forces de l'ordre pour leur intervention rapide ».

« L'horreur vient de saisir notre ville », a déploré la maire de Mulhouse, Michèle Lutz, sur Facebook.

En janvier, un homme de 32 ans avait blessé une personne au couteau dans un supermarché d'Apt, dans le sud de la France, en criant « Allah Akbar ». Il a été inculpé et écroué pour tentative d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste.

Fin janvier, le procureur antiterroriste, Olivier Christen, avait souligné que « l'absence d'actes terroristes mortels en France en 2024 ne reflète pas une diminution du risque terroriste », rappelant que neuf attentats ont été déjoués l'an dernier sur le territoire français.


Plusieurs centaines de personnes ont manifesté lors d'un rassemblement antifasciste à Paris

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  • Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée.
  • « Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle.

PARIS : Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée, pour laquelle six membres de l'ultradroite ont été inculpés, a constaté un journaliste de l'AFP.

« Paris, Paris, Antifa ! », « Pas de quartier pour les fachos, pas de fachos dans nos quartiers », « Nous sommes tous antifascistes », ont scandé les manifestants réunis place de la République. Un drapeau rouge « No pasaran » a été accroché sur un flanc de la statue, au centre de la place emblématique.

Ce rassemblement se tient six jours après l'agression à l'arme blanche d'un homme membre du collectif Young Struggle, qui se présente comme une « organisation de jeunesse socialiste » et adhérent au syndicat CGT. Il avait dû être hospitalisé quelques heures.

Dimanche dernier, « une vingtaine de personnes » appartenant à la mouvance d'ultradroite, « cagoulées et munies de tessons de bouteille » selon la préfecture de police, avaient pénétré dans la cour d'un immeuble où se situe une association culturelle de travailleurs immigrés de Turquie et agressé une personne avant de prendre la fuite.

Six jeunes hommes ont été inculpés pour violences volontaires aggravées. L'un d'eux, qui avait du sang sur ses vêtements et qui a reconnu sa participation, a été incarcéré.

« Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle, avant de faire siffler le nom de Bruno Retailleau, ministre français de l'Intérieur et connu pour ses positions très conservatrices.

« Partout, l'extrême droite se répand, encouragée par les saluts nazis de Elon Musk et Steve Bannon », a déclaré à sa suite Mathilde Panot, cheffe des députés du parti de gauche radicale LFI (La France Insoumise).

Steve Bannon, ancien conseiller de Donald Trump, a récemment été sous le feu des projecteurs pour un geste qualifié de salut nazi lors de la convention CPAC, la grand-messe des conservateurs américains près de Washington.

Il a brièvement tendu sa main en l'air après avoir déclaré devant les supporters de Donald Trump : « Nous n'allons pas reculer, nous n'allons pas capituler, nous n'allons pas abandonner. Luttez, luttez, luttez ! »

En janvier, le milliardaire Elon Musk, conseiller de Donald Trump, avait lui-même été épinglé pour un geste ambigu analogue.


Macron dira à Trump qu'entre alliés on ne peut pas "faire souffrir l'autre" avec des droits de douane

Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
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  • "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris
  • Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques

PARIS: "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris alors que Donald Trump menace d'imposer des droits de douane sur de multiples produits européens.

"Je vais (lui) en parler parce qu'on a besoin d'apaiser tout ça", a relevé le président français qui doit rencontrer son homologue américain lundi à Washington.

"La filière agricole et agroalimentaire (française), c'est une grande filière d'exportation, donc il faut la défendre pour la rendre encore plus compétitive", a-t-il ajouté.

Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques, c'est-à-dire que les États-Unis appliqueront le même niveau de droits de douane sur les produits en provenance d'un pays que le niveau appliqué dans ce pays aux produits américains.

Il a également annoncé le retour de droits de douane sur l'acier et l'aluminium. Et, s'il a déjà visé le Canada, le Mexique et la Chine, il a régulièrement assuré que les pays européens étaient également menacés.

En France, les viticulteurs sont particulièrement inquiets d'un retour des droits de douane américains sur le cognac et le vin, qu'ils exportent en masse vers les États-Unis, d'autant que le cognac souffre déjà d'un différend commercial entre l'UE et la Chine, son premier marché en valeur.

"Je suis déterminé sur tous les sujets pour avoir un échange" avec Donald Trump, a encore dit Emmanuel Macron. "On partagera nos accords, nos désaccords et j'espère surtout qu'on trouvera des solutions sur la question de l'Ukraine".

Le président américain est reparti à la charge vendredi contre son homologue ukrainien. Tout en estimant que Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine allaient "devoir se parler", pour "mettre fin au massacre de millions de personnes", il a jugé que la présence de l'Ukrainien n'était "pas importante" dans des négociations avec la Russie.

Il a ciblé par ailleurs Emmanuel Macron, et Keir Starmer, qui n'ont selon lui "rien fait" pour mettre un terme à la guerre. Le Premier ministre britannique est attendu jeudi à Washington.