VESOUL: Pour la partie civile, c'était la journée de la dernière chance pour arracher "toute la vérité" à Jonathann Daval. Mais la mère d'Alexia ne l'a cette fois pas fait craquer: l'accusé qui a reconnu avoir tué intentionnellement sa femme, a campé sur ses positions pour le reste.
Appelée pour la dernière fois à la barre de la cour d'assises de la Haute-Saône où le procès s'est ouvert lundi, Isabelle Fouillot refuse de croire que sa fille ait été tuée pour "de simples mots". Elle a tout tenté pour lui arracher d'ultimes explications. "Je pense qu'Alexia voulait s'en aller, c'est pour ça que tu l'as tuée ?", a interrogé d'une voix douce, presque maternelle.
Mais l'accusé a répliqué par un "non" sans appel à celle qu'il appelait autrefois "maman" et qu'il continue d'appeler par son prénom.
Dépitée, Isabelle Fouillot a achevé sa déposition par ces mots prononcés froidement : "Je te souhaite un bon séjour en prison, Jonathann. Adieu."
"C'est une dispute, Isabelle, faut le croire (...) J'ai perdu pied. Tout est ressorti en moi, toutes ces années de colère, que j'ai emmagasinées, ces reproches", a-t-il soutenu, maintenant sa déposition de la veille.
"Quel gâchis"
"Quel gâchis. Tu as détruit Alexia et tu nous a détruits aussi", a lâché la mère d'Alexia.
Jeudi, Jonathann Daval avait reconnu pour la première fois avoir sciemment "donné la mort" à son épouse en l'étranglant longuement à l'issue, affirme-t-il, d'une violente dispute.
Ce procès restera dans les annales pour son intensité, mais aussi pour le rôle central joué par la partie civile dans le prétoire comme devant les caméras.
Ce fut une nouvelle fois le cas vendredi matin avant le reprise des débats quand Jean-Pierre Fouillot, le père d'Alexia, a résumé dans une interview à BFMTV toute l'ambivalence des sentiments qui l'animent encore à l'endroit de son gendre.
"Le Jonathann que j’ai connu, qu’on a choyé, qu’on a aimé (...), celui-là, je serais tenté de dire que je l’aime encore mais le Jonathann, le meurtrier, la deuxième personne, celle qui a fait toutes ces horreurs, ce Jonathann-là, c'est fini, c'est terminé, on ne veut plus en entendre parler", a-t-il confié.
Autre moment d'une rare intensité vendredi matin quand les images de la bouleversante confrontation entre les Fouillot et leur gendre, le 7 décembre 2018, ont été projetées devant la cour.
Avant cette confrontation et au prix d'un énième revirement, Jonathann était revenu sur ses premiers aveux, accusant même son beau-frère Grégory Gay d'être le meurtrier.
Mais dans le huis clos du cabinet du juge d'instruction, Isabelle Fouillot trouve les mots justes qui le feront craquer.
"On te pardonnera. Pourquoi tu veux pas du pardon, tout le monde peut être pardonné, il faudra que tu te reconstruises un jour. T’as pas tout perdu. Ce que je comprends pas c’est pourquoi on en est arrivé là ? Explique-moi s’il te plaît ? […] C’est quoi le déclencheur ?", l'avait-elle exhorté.
Premières plaidoiries
Alors, Jonathann craque et avoue pour la seconde fois avoir tué Alexia, même s'il prétend encore que ce n'était pas intentionnel.
Survient alors cette incroyable scène : il se met à genoux devant sa belle-mère, elle s’approche, lui prend les mains, le relève et ils se prennent dans les bras, en larmes.
Ces images, Jonathann Daval n'a pas voulu les revoir depuis le box des accusés, détournant le regard.
Longuement entendu jeudi sur les faits, l'informaticien de 36 ans devait encore être interrogé vendredi sur sa personnalité.
Puis la cour procèdera à l'audition de plusieurs témoins, parmi lesquels Martine Henry, sa mère, déjà entendue brièvement lundi.
Viendra alors l'heure des plaidoiries de la partie civile. Samedi matin, si tout se passe comme prévu, ce sera au tour de l'avocat général de prononcer son réquisitoire puis à la défense de plaider, avant que l'accusé n'ait la parole, en dernier.
Le verdict, qui devait tomber initialement vendredi soir, est désormais attendu pour samedi en fin de journée.
Jonathann Daval encourt la réclusion criminelle à perpétuité.