Les femmes ont fait d'énormes progrès au niveau mondial pour obtenir davantage de droits, de respect et d'opportunités, malgré les théocrates d'États tels que l'Iran, l'Afghanistan, le Liban et l'Irak, qui font tout pour inverser cette tendance.
Elles ont connu un double coup dur: les talibans les ont exclues de l'enseignement universitaire et du travail dans les ONG, après leur avoir interdit de fréquenter l'école secondaire. L'exclusion d'un si grand nombre de pourvoyeurs de famille – la moitié de la population qui devrait être économiquement active – constitue non seulement un revers pour les femmes, mais aussi une catastrophe pour un pays dont l'économie est déjà en chute libre. Quelque cent cinquante agences humanitaires ont déjà suspendu leurs opérations après la perte d'une partie importante de leur personnel.
Le choc psychologique subi par les femmes professionnellement actives est indescriptible. Elles sont passées de postes de direction où elles supervisaient des équipes importantes de personnel à leurs foyers, obligées de se couvrir de la tête aux pieds et de survivre au gré des caprices de leurs tuteurs masculins – voyant toutes leurs perspectives balayées, comme si elles ne comptaient pas. Les femmes confient que c'est comme si leur âme avait été arrachée.
Bien que l'islam appelle les femmes à être éduquées et respectées, les théocrates régressifs d'Afghanistan et d'Iran les détestent, tout simplement, et ils cherchent à les exclure de la sphère publique.
En Iran, des manifestations menées par des femmes ont duré des mois contre un régime déterminé à réprimer les citoyens – femmes et hommes. Chacun de ces pauvres hommes innocents exécutés a une mère, des sœurs, une épouse qui subissent désormais l'ultime agonie. Certaines femmes détenues ont entamé une grève de la faim pour protester contre le manque de soins médicaux et les conditions inhumaines. Un quart des femmes journalistes incarcérées dans le monde le sont dans les prisons iraniennes.
La situation des détenues a également atteint un niveau de crise au Liban, où les mères n'ont pas accès au lait maternisé ou aux médicaments. Une grande partie d'entre elles n'ont même pas été entendues, et près de 80% de la population carcérale se trouve en détention provisoire. Le taux d'occupation des prisons à l'échelle nationale est de 323%, ce qui est insoutenable.
Des milliers de familles ont déjà fui le Liban et les experts mettent en garde contre un effondrement du taux de natalité, les femmes choisissant «l'infertilité facultative» dans la mesure où avoir des enfants est devenu inenvisageable. Entre 2017 et 2021, les naissances ont diminué d'environ 25%. Avec l'effondrement de la valeur de la livre libanaise, le coût moyen de l'accouchement d'un bébé dépasse 800 dollars (1 dollar = 0,93 euro), en supposant qu'il n'y ait pas de complications. Les jeunes familles doivent ensuite supporter les coûts des couches, du lait, des médicaments, des vaccins – si tant est qu’ils soient disponibles.
Bien que plus de 80% de la population soit plongée dans une grande pauvreté, moins de 5% des ménages libanais reçoivent une aide gouvernementale. Environ 80% ont un membre qui a perdu son emploi depuis 2019. Les femmes sont généralement les premières à être exclues, car les entreprises réduisent inexorablement leurs effectifs.
Entre-temps, des entités telles que le Hezbollah, les Houthis au Yémen et Hachd al-Chaabi en Irak ont vigoureusement cherché à nier le rôle intrinsèque des femmes dans le dynamique patrimoine culturel de la région, comme elles tentent de transformer ces nations en des copies conformes et dysfonctionnelles de la République islamique. Des militantes et des journalistes ont été terrorisées et assassinées par des mafiosi qui cherchent à exclure les femmes du rôle qu'elles méritent dans la société.
Dans l’ensemble de l'Afrique, Daech et Al-Qaïda ont brutalement réprimé les femmes dans les zones qu'ils contrôlent, en contradiction avec les rôles forts que les matriarches ont l'habitude de jouer dans de nombreuses sociétés africaines traditionnelles.
En Ukraine, chaque partie engagée dans le conflit déplore environ cent mille victimes, ce qui inflige des souffrances atroces à d'innombrables foyers. Les hommes ukrainiens étant déployés sur des lignes de front glaciales, les épouses et les enfants ont été dispersés à travers l'Europe et leur avenir est précaire.
Ailleurs, cependant, on assiste à une prolifération d'opportunités extrêmement intéressantes pour les femmes. En Arabie saoudite, leur participation sur le lieu de travail a doublé en cinq ans, passant de 17% à 34%. La semaine dernière, le Royaume a nommé ses quatrième et cinquième ambassadrices, suivant ainsi la voie tracée par la princesse Rima bent Bandar, ambassadrice à Washington. Au cours de l'année écoulée, une équipe nationale saoudienne de football féminin s'est constituée et la première femme arbitre internationale d'Arabie saoudite, Anoud al-Asmari, a été nommée la semaine dernière par la Fifa.
Les libertés et les droits dont nous jouissons en tant que femmes sont précieux et vulnérables et ils ne doivent jamais être considérés comme acquis – en particulier lorsque le Hezbollah, Daech, les ayatollahs et les talibans font tout pour revenir en arrière.
Baria Alamuddin
J'ai séjourné récemment à Bahreïn, où j'ai trouvé un climat d'optimisme incroyable face aux possibilités qui s'ouvrent aux femmes. Les filles dominent dans de nombreuses facultés des universités de la région et excellent dans des domaines clés. Une nouvelle génération de modèles féminins montre de quelle manière les femmes peuvent diriger et mettre la barre haut. Dans ce contexte, je suis immensément fière de mon amie juriste et universitaire, la Pr Rangita de Silva de Alwis, qui a été élue en juin au Comité des nations unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes.
La plus grande bataille que nous ayons à mener est celle contre la passivité et le désengagement. Lorsque j'étais étudiante à l'université américaine de Beyrouth, il ne se passait pas un mois sans que nous nous mobilisions pour une cause mondiale ou une autre. Peut-être étions-nous naïfs, peut-être ne pouvions-nous pas avoir l'impact auquel nous aspirions, mais nous étions passionnés et convaincus par notre devoir: essayer de changer le monde.
De telles aspirations sont rares de nos jours. Les dirigeants israéliens d'extrême droite peuvent difficilement taire leurs ambitions de s'emparer de chaque mètre carré du territoire palestinien, mais où est le monde arabe? Où est l'Occident démocratique? Où sont les Palestiniens eux-mêmes?
Les femmes iraniennes ont brûlé leur hijab dans des actes de bravoure extraordinaires, mais le monde peine à trouver la motivation nécessaire pour suivre l'évolution de la situation, sans même parler d'agir ou d'affirmer notre solidarité et notre engagement commun en faveur de la libération de la tyrannie.
Les libertés dont nous, les femmes, jouissons déjà dans certaines régions du monde ne nous ont pas été accordées gratuitement. Les militantes de l'histoire ont risqué la prison, le déshonneur et même la mort pour obtenir le droit de voter, de travailler, de participer au gouvernement et d'obtenir la place qui nous revient de droit en tant qu'égales des hommes, et parfois supérieures à eux. La confiance en soi est un facteur crucial pour que les femmes soient prêtes à s’emparer des opportunités qu'elles méritent.
Les libertés et les droits dont nous jouissons en tant que femmes sont précieux et vulnérables et ils ne doivent jamais être considérés comme acquis – en particulier lorsque le Hezbollah, Daech, les ayatollahs et les talibans font tout pour revenir en arrière.
Le moyen le plus sûr de protéger nos propres privilèges et nos opportunités est de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour que nos sœurs du monde entier puissent vivre des existences tout aussi heureuses – car aucune société sur Terre ne peut s'épanouir si ses femmes ne sont pas habilitées à jouer pleinement leur rôle.
Baria Alamuddin est une journaliste primée au Moyen-Orient et au Royaume-Uni. Elle est rédactrice en chef du Media Services Syndicate et a interviewé de nombreux chefs d'État.
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.