Un voyage à Bahreïn, clé du succès pour Cartier

Jacques Cartier et des marchands de perles à Bahreïn en 1912. (Fourni)
Jacques Cartier et des marchands de perles à Bahreïn en 1912. (Fourni)
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Publié le Vendredi 23 décembre 2022

Un voyage à Bahreïn, clé du succès pour Cartier

  • Au début du XXe siècle, les perles étaient un signe de richesse et de pouvoir; elles ornaient les poignets, les décolletés et les têtes des membres de la famille royale et des mondains
  • Selon feu le grand-père de Brickell, Jean-Jacques Cartier, qui a vendu l'entreprise dans les années 1970, 60% des créations de Cartier comportaient des perles naturelles

LONDRES: En 1916, une jeune femme nommée Maisie Plant pose ses yeux sur le collier le plus cher du monde. Il vaut un million de dollars, l'équivalent de plus de 27 millions de dollars aujourd'hui (1 dollar = 0,94 euro). Exposé dans la vitrine de la marque de joaillerie française Cartier à New York, le collier comporte deux rangs d'une centaine de perles brillantes. Ce qui s'est passé ensuite, c'est une affaire stupéfiante entre le joaillier de la troisième génération Cartier, Pierre, et le mari beaucoup plus âgé de Maisie, le financier américain Morton Plant.
Plant possédait une maison de ville – également évaluée à un million de dollars – sur la très chic Cinquième Avenue de New York. Les deux hommes ont conclu un accord: Plant donnerait à Cartier sa maison de ville en échange du collier. L'élégant hôtel particulier a été transformé en une toute nouvelle boutique Cartier, où il se trouve encore aujourd'hui.

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La reconstitution d'une image ancienne montre Francesca Cartier Brickell avec les descendants des quatre marchands de perles que Jacques Cartier a rencontrés en 1912. (Fourni)

Au début du XXe siècle, les perles étaient un signe de richesse et de pouvoir; elles ornaient les poignets, les décolletés et les têtes des membres de la famille royale et des mondains. «Les perles, c'était ça. C'est ce que tout le monde voulait, plus que tout autre chose, peut-être comme les diamants aujourd'hui», déclare à Arab News Francesca Cartier Brickell, l'auteure anglaise de The Cartiers et descendante directe de la famille. «Les perles étaient les objets les plus précieux du monde. Une perle avait quatre fois plus de valeur qu'un diamant de la même taille.»
Selon feu le grand-père de Brickell, Jean-Jacques Cartier, qui a vendu l'entreprise dans les années 1970, 60% des créations de Cartier comportaient des perles naturelles. Cela a été en grande partie rendu possible grâce à un voyage à Bahreïn, «le pays des Perles», effectué par Jacques Cartier, le plus jeune des trois frères Cartier, en 1912.

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Une photographie du début du XXe siècle montre une femme qui arbore des bijoux en perles de Cartier. (Fourni)


À l'époque, la société Cartier comptait trois grandes boutiques à Paris, Londres et New York, qui étaient réparties entre les trois frères. Brickell a trouvé leurs vieilles lettres dans une malle à la résidence de son grand-père. Elle a été émue par l'ambition et par la détermination des frères.
«Le lien entre les frères était saisissant», confie-t-elle. «Ils entretenaient ce rêve depuis leur plus jeune âge: construire la première entreprise de joaillerie au monde. C'est remarquable de voir de jeunes garçons transformer leur rêve en réalité. Cela semble à un conte de fées, mais c’est bel et bien la façon dont cela s'est passé.»
Pierre et Louis sont considérés comme les génies du design et des affaires de la marque, tandis que Jacques, un expert en pierres précieuses qui dirige la succursale de Londres – est moins connu. On dit de lui qu'il était un homme sage et spirituel; il voulait devenir prêtre catholique, et non joaillier. Il a également risqué sa vie en combattant au front pendant la Première Guerre mondiale, malgré sa tuberculose.

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Francesca Cartier Brickell avec le propriétaire de Mattar Jewelry, à Bahreïn, une entreprise familiale visitée par son arrière-grand-père en 1912. (Fourni)


Jacques adorait les voyages, qui étaient essentiels pour la croissance et l'innovation de Cartier. Il s'est rendu en Égypte, où il a acheté de petits ornements. Au Sri Lanka, il a visité des mines et s'est procuré des saphirs. L'Inde a également été une destination importante. Cartier entretenait des liens étroits avec plusieurs maharajas et l’intérêt des Indiens pour les couleurs vives allait inspirer les bijoux de Cartier dans les années 1920 et 1930, combinant rubis, saphirs et émeraudes.
Avec l'aide d'un traducteur, Jacques s’est immergé dans les lieux qu'il a visités.
«Lorsqu'il arrive dans les mines de saphir, il veut vérifier qu'elles sont bien aménagées et que les hommes qui y travaillent se trouvent vraiment en sécurité», raconte Brickell. «Il ne se contente pas d'entrer et de sortir pour essayer d'obtenir les bijoux ou de faire le meilleur commerce: il s'intéresse véritablement aux gens.»


Lorsque Jacques visite le Moyen-Orient, il est fasciné par son architecture unique et dessine des croquis dans ses journaux intimes. «Il l’observe avec l'œil d'un artiste», explique Brickell. «C'est ça, Jacques: quand il visitait un endroit, il ne se contentait pas de le visiter et d’en savourer la cuisine et de rencontrer les gens. Sa bibliothèque est remplie de livres sur les religions, les cultures et les costumes. Il voulait vraiment comprendre la culture de l'intérieur.» Finalement, des motifs architecturaux de la région ont été intégrés dans les horloges et les boîtes à cigarettes de Cartier.
Le voyage de Jacques à Bahreïn est motivé par la concurrence des frères parisiens Rosenthal, qui avaient déjà conclu un accord exclusif pour acheter des perles directement à la source. Jacques convient avec Louis qu'il doit s'arrêter à Bahreïn sur le chemin du retour de l'Inde pour participer à cette opération. «Les meilleures perles viennent du Golfe», estime Brickell.


C'était la première fois que Jacques se rendait à Bahreïn, où la plongée perlière constitue l'épine dorsale de l'économie. Il est monté dans des bateaux de pêche aux perles et a parlé avec des plongeurs. Il a visiblement vécu un choc culturel, notamment en mangeant assis par terre. Il existe une rare photographie en noir et blanc de lui, vêtu d'un costume élégant et tenant une cigarette, assis entre quatre éminents marchands de perles de Bahreïn.
Jacques a scellé l'affaire et, pendant de nombreuses années, les perles ont généré une part importante des revenus de Cartier – la marque était présentée comme «importatrice de perles». Cependant, les choses se sont gâtées lorsque, des années plus tard, les perles de culture ont torpillé le marché et fait chuter la valeur des perles naturelles. «C'était terrible pour Cartier», souligne Brickell. «Mon grand-père pensait que c'était pire que la Grande Dépression».


Plus d'un siècle plus tard, Brickell a entrepris le voyage à Bahreïn en suivant les traces de son arrière-grand-père et en utilisant son journal intime comme guide. C'était aussi sa première visite sur l'île du Golfe. Elle y a donné des conférences et a pratiqué la plongée perlière. Elle a constaté à quel point ce métier est difficile.
«Les perles proviennent des fonds marins. Ce n'est pas forcément un début glamour, comparé à l'endroit où elles finissent. C'est important de s'en souvenir», déclare-t-elle.
Brickell avait été en contact avec certains des descendants des marchands de perles qui figurent sur la photo de Jacques et elle a fini par les rencontrer pour reconstituer l'image de leurs ancêtres de 1912. «C'était incroyablement émouvant», se souvient Brickell. «J'ai eu les larmes aux yeux, car toutes leurs familles étaient là. C'était tout simplement incroyable de penser que tous nos ancêtres se connaissaient, que ce lien survit à travers les générations.»
Décrit autrefois comme «le joaillier des rois et le roi des joailliers», Cartier a été porté par des personnalités telles que Jackie Onassis, Elizabeth Taylor et la princesse Diana. Brickell pense que l'un des principaux secrets du succès durable de Cartier réside dans les valeurs familiales de l'entreprise.
«Ils ont fini par se forger lentement une clientèle, mais aussi par se doter d’ employés fidèles», précise-t-elle. «Ils prenaient soin de leurs employés, qui étaient tellement fiers de travailler pour Cartier.»
Brickell a abandonné sa carrière d'analyste financier pour écrire un livre sur l'histoire remarquable de sa famille. Cartier a été fondée comme une modeste start-up avec peu d'argent il y a cent soixante-quinze ans et elle a survécu à des pandémies, des révolutions politiques, deux guerres mondiales et des récessions financières mondiales.
«C'est une histoire de résilience et d'ambition. Tout n'est pas parfait. Il y a des disputes familiales et des déchirements», raconte encore Brickell. «Je voulais partager cette expérience. J'avais l'impression que je le leur devais.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les Émirats arabes unis, protagonistes du film hollywoodien « Now You See Me : Now You Don't »

Le tournage de cette production, qui sortira en novembre, a duré 13 jours et s'est déroulé dans plusieurs lieux emblématiques de la capitale, a indiqué jeudi l'Autorité des médias créatifs. (Instagram)
Le tournage de cette production, qui sortira en novembre, a duré 13 jours et s'est déroulé dans plusieurs lieux emblématiques de la capitale, a indiqué jeudi l'Autorité des médias créatifs. (Instagram)
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  • Les Émirats arabes unis ont décroché un rôle principal dans le prochain film hollywoodien "Now You See Me : Now You Don't", dont les scènes seront filmées dans la capitale Abou Dhabi

DUBAI : Les Émirats arabes unis ont décroché un rôle principal dans le prochain film hollywoodien "Now You See Me : Now You Don't", dont les scènes seront filmées dans la capitale Abou Dhabi.

La production, qui sortira en novembre, a terminé un tournage de 13 jours dans plusieurs lieux emblématiques de la capitale, selon l'Autorité des médias créatifs jeudi.

Le film, qui comporte de nombreuses scènes de casse, a été tourné dans des lieux tels que le Louvre Abou Dhabi, le pont Sheikh Zayed, le désert de Liwa, le Ferrari World Abu Dhabi, le CLYMB, le circuit Yas Marina, le W Abou Dhabi - l'île de Yas, ainsi que dans diverses rues de la ville.

Le troisième volet de la célèbre franchise, réalisé par le cinéaste américain Ruben Fleischer, fait revenir Jesse Eisenberg, Woody Harrelson, Dave Franco et Morgan Freeman dans leurs rôles précédents, rejoints par un ensemble d'acteurs comprenant Justice Smith, Dominic Sessa, Ariana Greenblatt et Rosamund Pike.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L’histoire saoudienne mise à l’honneur à la Foire du livre d’Abou Dhabi

Archives photographiques et rapports sur la remise en service du chemin de fer du Hejaz.
Archives photographiques et rapports sur la remise en service du chemin de fer du Hejaz.
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  • Sélection de l'offre du marchand de livres rares Peter Harrington, basé à Londres, à la foire des EAU, du 26 avril au 5 mai

La grande mosquée de La Mecque

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Avec une préface de l'ancien ministre saoudien des Finances Sheikh Mohammed Abalkhail et des photos du photojournaliste africain primé Mohamed Amin, cette "somptueuse production" retrace le quart de siècle de restauration de la grande mosquée et de la Sainte Kaaba à La Mecque au milieu du 20e siècle. "Le texte contient une description historique de la Sainte Kaaba, Masjid al-Haram, un résumé des constructions récentes à l'époque saoudienne et des notes architecturales. Le reste du volume est consacré aux photographies d'Amin, qui présentent des vues détaillées des divers et vastes développements", peut-on lire dans les notes du libraire. Amin a été "le premier photographe à être autorisé à documenter le Hajj et l'un des premiers à photographier des sections des saintes mosquées de La Mecque et de Médine". Pendant trois ans, au cours des années 1970, il a voyagé à dos de chameau, en hélicoptère, en voiture et à pied jusqu'à Médine, Arafat et La Mecque".

Rapports confidentiels des premier et troisième congrès arabes du pétrole

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On ne saurait sous-estimer l'importance historique mondiale du premier congrès arabe du pétrole, qui s'est tenu en 1959. C'est là qu'a été introduite l'idée d'une organisation productrice de pétrole (une idée qui est finalement devenue l'OPEP). "Au cours des débats, l'influente journaliste pétrolière Wanda Jablonski a présenté le Saoudien Abdullah Tariki au Vénézuélien Juan Pablo Perez Alfonzo, tous deux mécontents des récentes baisses de prix. Ils ont rallié les délégués à la signature du pacte secret de Maadi, suggérant la création d'une commission de consultation sur le pétrole pour coordonner les réactions des producteurs. Cette initiative a jeté les bases de la conférence de Bagdad de 1960, au cours de laquelle l'OPEP a été officiellement créée", peut-on lire dans les notes du libraire. Ce groupe de documents contient des rapports internes d'Aramco sur ce congrès et sur le troisième congrès arabe du pétrole en décembre 1961, ainsi que d'autres documents produits par Aramco entre 1956 et 1961.

Archives photographiques et rapports sur la remise en service du chemin de fer du Hedjaz

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Le libraire décrit cette collection comme "des archives uniques relatives à la première tentative d'après-guerre de reconstruire le chemin de fer du Hedjaz et de relier Damas à Médine". Le dernier train à avoir parcouru toute la longueur de la voie ferrée remonte à 1925, après quoi "la ligne au sud de Mudawwara a été emportée, et les conflits qui ont conduit à la création de l'Arabie saoudite en 1932 ont freiné les efforts collectifs de reconstruction". Les archives comprennent des photos inédites et des rapports originaux publiés par l'International Resources Engineering and Exploration Group, qui s'est vu confier la conception du projet en 1956. "La couverture est particulièrement détaillée pour le centre et le nord de l'Arabie saoudite, notamment la région autour de Mada'in Salih et de Khur Himar", indique le vendeur, et comprend des images du parti rencontrant des responsables locaux, notamment les souverains d'AlUla et de Tabuk.

Une collection de diapositives sur lanterne magique de Harry St John Bridger Philby et Alec Horace Edward Litton Holt

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L'officier de renseignement britannique Philby - qui fut conseiller du fondateur de l'Arabie saoudite, le roi Abdulaziz Ibn Saoud - et l'ingénieur et explorateur Holt ont parcouru ensemble 600 miles en 1922 à travers le désert via la province d'Al-Jawf en Arabie saoudite "au plus fort des tensions croissantes entre Ibn Saoud et les Hachémites". Selon le libraire, ces 23 diapositives ont probablement été utilisées pour illustrer la présentation qu’ils ont faite de leur voyage devant la Royal Geographic Society, au Royaume-Uni, le 12 février 1923. "La collection montre Holt et Philby en costume arabe, des voitures et des avions Ford à Jidd, des scènes de désert, un condensateur Ford et des labours pour des terrains d'atterrissage, entre autres.

Dossier de presse éducatif d'Aramco

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Pour tenter d'attirer les étudiants et les diplômés américains dans les années 60 et 70, Aramco a produit plusieurs collections de matériel promotionnel comprenant des affiches semblables à celle-ci, qu'elle a distribuées dans les écoles et les universités des États-Unis. "Les affiches, très vivantes, explorent l'histoire de l'Arabie saoudite et les activités de la compagnie, chacune étant illustrée par des photographies de personnages historiques (dont T. E. Lawrence), du personnel de la compagnie, des puits de pétrole et de l'architecture saoudienne", indique le libraire.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Kojo Marfo dévoile «HOME» à Dubaï: une immersion vibrante dans l’identité, l’esprit et l’essence du foyer

HOME: Heart of My Existence est à découvrir à la JD Malat Gallery, Dubaï, du 16 avril au 31 mai 2025. (Photo: Arab News)
HOME: Heart of My Existence est à découvrir à la JD Malat Gallery, Dubaï, du 16 avril au 31 mai 2025. (Photo: Arab News)
HOME: Heart of My Existence est à découvrir à la JD Malat Gallery, Dubaï, du 16 avril au 31 mai 2025. (Photo: fournie)
HOME: Heart of My Existence est à découvrir à la JD Malat Gallery, Dubaï, du 16 avril au 31 mai 2025. (Photo: fournie)
HOME: Heart of My Existence est à découvrir à la JD Malat Gallery, Dubaï, du 16 avril au 31 mai 2025. (Photo: Arab News)
HOME: Heart of My Existence est à découvrir à la JD Malat Gallery, Dubaï, du 16 avril au 31 mai 2025. (Photo: Arab News)
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  • Marfo qualifie «HOME» de tournant introspectif dans son parcours artistique
  • Ce n’est pas qu’une expansion géographique, mais aussi une évolution de sa démarche artistique

DUBAÏ: L'artiste ghanéen-britannique Kojo Marfo présente sa première exposition personnelle aux Émirats arabes unis, HOME: Heart of My Existence, qui se déroule à la JD Malat Gallery de Dubaï. Du 16 avril au 31 mai 2025, cette exposition réunit treize œuvres monumentales et audacieuses, invitant les spectateurs à une réflexion profonde et intime sur la signification réelle du mot «appartenir» et sur l'origine de ce sentiment.

À son arrivée à Dubaï, Marfo a partagé ses premières impressions lors d'un entretien exclusif: «Tout le monde semble très poli et discipliné», a-t-il déclaré. «Cela rend les choses très authentiques, et on se sent plus libre de faire ce que l’on souhaite. L’énergie est incroyable – tout le monde semble positif et profite pleinement de la vie.»

Un cadre qui correspond parfaitement à HOME, une série que Marfo qualifie de tournant introspectif dans son parcours artistique. Célèbre pour son style vibrant, qu'il désigne sous le nom d'AfroGenesis, l'artiste mêle les influences de son héritage ghanéen – en particulier les artefacts et sculptures Akan – avec des courants artistiques occidentaux comme le cubisme et les techniques des grands maîtres. Cela donne naissance à un langage visuel unique, où des figures monumentales et colorées, à la fois énigmatiques et profondément expressives, prennent forme.

Une conversation en couleurs et en formes

Si les couleurs éclatantes et les formes stylisées captivent au premier regard, c’est le message profond de l’exposition qui demeure. «Il s’agit de lancer des conversations», explique Marfo. «On pense qu’on sait tout, mais ce n’est pas vrai. Nous vivons constamment dans nos pensées – c’est notre esprit qui nous guide, qui nous dicte nos émotions. L’espace physique devient insignifiant lorsque l’esprit est en chaos.»

L’idée de HOME ne se limite pas à un lieu physique. Pour Marfo, le foyer est une notion intérieure, façonnée par l’émotion, l’expérience et la mémoire. «Peu importe ce qu’on fait, on pense que notre “chez soi”, ce sont quatre murs, un toit et une serrure – mais ce n’est pas ça», dit-il. «Cette exposition est une invitation à regarder en soi. Il faut apprendre à se connaître, à s’accepter, et à en tirer des leçons.»

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Kojo Marfo - Fury and Freedom, 2025. (Photo: Arab News) 

L’une des œuvres phares de l’exposition, intitulée Fury and Freedom, illustre ce tumulte intérieur. «On voit à quel point tout est chaotique», commente Marfo. «Il y a un bouclier – c’est ce que la société appelle porter un masque. Il nous protège des agressions inutiles. C’est notre manière de vivre.» Pour l’artiste, ce masque symbolise les identités changeantes de l’humanité, ses mécanismes de défense émotionnels, et l’équilibre délicat entre expression de soi et protection de soi.

Une évolution artistique

Bien que Marfo ait exposé dans des villes majeures comme Paris, Tokyo ou Londres, cette exposition à Dubaï représente un moment charnière. «Quand la galerie m’a contacté, je me suis dit que j’allais apporter quelque chose de différent ici», se souvient-il. «La plupart de ces œuvres n’ont jamais été exposées. Mon objectif principal était de créer un dialogue à Dubaï.»

Ce n’est pas qu’une expansion géographique, mais aussi une évolution de sa démarche artistique. Puisant son inspiration dans les interactions humaines et les comportements, Marfo crée avec une histoire à l’esprit. «Parfois je peins d’abord, puis j’essaie de construire une histoire – mais c’est plus difficile. Je préfère m’inspirer des échanges, les faire miens, puis peindre.»

Bien qu’il ait été influencé à ses débuts par Picasso, Marfo a su se détacher des modèles pour forger son propre univers esthétique. «Avec le temps, j’ai développé mon propre style, mes propres idées – je l’appelle AfroGenesis. Ça sonne comme un mouvement, mais pour moi, c’est juste ma façon de dire que je suis original. Je ne cherche pas à lancer un mouvement – je suis juste là pour dire: “Je suis authentique.”»

Un échange culturel

HOME ne met pas seulement en lumière la maîtrise technique et la voix créative de Marfo – elle crée un pont. Entre les continents, entre les traditions culturelles, entre paysages intérieurs et réalités extérieures. Cette première immersion dans le monde de l’art moyen-oriental est à la fois une célébration et une invitation: une méditation universelle sur l’identité, le foyer et la condition humaine.

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Kojo Marfo - Stranger, 2023. (Photo: Arab News) 

«Je crée des œuvres vivantes et colorées pour capter l’attention», explique-t-il. «Mais mon but n’est pas que les gens se contentent de les observer – je souhaite qu’ils s’approchent et découvrent l’histoire qui se cache derrière. »

Et avec HOME, les amateurs d’art à Dubaï sont invités à bien plus qu’une simple visite de galerie – c’est une exploration réfléchie, intensément humaine, de ce que signifie être au monde.