Au procès de l'attentat de Nice, l'état psychiatrique de l'auteur au coeur des débats

Des fleurs gisent au pied d'une statue commémorative pour rendre hommage près de la basilique Notre-Dame de l'Assomption avant une cérémonie organisée pour marquer le premier an d'un attentat, à Nice, le 29 octobre 2021. (AFP)
Des fleurs gisent au pied d'une statue commémorative pour rendre hommage près de la basilique Notre-Dame de l'Assomption avant une cérémonie organisée pour marquer le premier an d'un attentat, à Nice, le 29 octobre 2021. (AFP)
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Publié le Jeudi 27 octobre 2022

Au procès de l'attentat de Nice, l'état psychiatrique de l'auteur au coeur des débats

  • Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, Niçois de 31 ans de nationalité tunisienne, avait fait 86 morts et plus de 400 blessés au volant d'un camion-bélier sur la Promenade des Anglais avant d'être abattu par la police
  • Dans son enfance, il se distingue par son comportement «brutal» et son intolérance à la frustration, se rappelle son père, 63 ans, venu de Tunisie pour témoigner

PARIS: Les éventuels antécédents psychiatriques de l'auteur de l'attentat de Nice le 14 juillet 2016 ont été mercredi au coeur des débats au procès à Paris, avec l'audition de sa famille, qui l'a décrit comme "violent", "agressif" et "impulsif", mais pas "fou".

Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, Niçois de 31 ans de nationalité tunisienne, avait fait 86 morts et plus de 400 blessés au volant d'un camion-bélier sur la Promenade des Anglais avant d'être abattu par la police.

La question de son équilibre mental revient régulièrement dans les débats devant la cour d'assises spéciale depuis le début du procès, même s'il n'y a, pour l'accusation, "aucun élément objectif du dossier en faveur d’une pathologie psychiatrique avérée".

Dans son enfance, il se distingue par son comportement "brutal" et son intolérance à la frustration, se rappelle son père, 63 ans, venu de Tunisie pour témoigner.

"Quand il y avait un problème qu'il ne pouvait pas résoudre" ou qu'il n'avait pas ce qu'il voulait, "il s'énervait", résume cet homme aux cheveux et à la moustache blanche, ses larges mains jointes devant lui.

Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, que tout son entourage appelle par son deuxième prénom, Salman, grandit dans une famille de 11 enfants à M'Saken, petite ville près de Sousse (est de la Tunisie).

Parti en France en 2007, il ne reviendra qu'à deux reprises, en 2012.

Son origine modeste et rurale, source de moqueries à l'école, était une frustration pour le jeune homme, confie à la barre sa tante paternelle Rafika, 65 ans, également partie vivre à Nice et restée proche de lui.

"Il en avait trop sur le cœur. Il avait trop de haine envers ses parents. Il m'a dit: +c'est des rats, pas des parents+", assure-t-elle, en gros manteau et voile noir. Selon elle, son père "avait des sous mais le privait de tout".

Des témoignages ressort aussi une violence familiale banalisée. "Tout le monde frappe ses enfants", lâche le père, agriculteur, concédant "une gifle ou un coup de pied" si son fils rentre tard ou "vole des fruits".

«Tout le monde avait peur de lui»

"Oui ça arrivait, c'est normal", confirme sa mère Chérifa, 58 ans, visage marqué, couverte d'un châle beige. Elle reconnaît à demi-mot avoir elle-même subi des violences.

Mohamed Lahouaiej-Bouhlel frappe aussi ses frères et soeurs, "quand on touchait ses affaires" ou qu'il devait répéter les choses. "Mais de façon normale (...) il ne laissait pas de traces", banalise à son tour sa soeur Rabeb, 34 ans aujourd'hui.

Dans un témoignage aussi volubile et décousu que ses parents s'étaient montrés réservés, la jeune femme dit à la fois: "Tout le monde avait peur de lui" et "il ne me paraissait pas perturbé du tout".

La violence de son grand frère s'aggrave en 2004, alors qu'il a 19 ans.

Selon Rabeb, "il a changé de comportement, il est devenu énervé" lorsqu'après le bac, il a voulu devenir "coach sportif, et papa a refusé, il voulait qu'il devienne ingénieur".

Son père dément lui avoir "interdit" cette orientation, puis prétend avoir "oublié" l'épisode.

Père et fille racontent en revanche que "Salman" les a, un jour, enfermés dans la maison au moyen de chaînes et de cadenas, après le refus de lui acheter une moto. Un autre jour, il a "cassé toutes les portes et les fenêtres de la maison".

Son père l'emmène alors chez un psychiatre à Sousse, qui évoque un lien avec sa forte consommation de protéines pour la musculation - habitude qu'il avait toujours une fois en France, selon sa tante Rafika.

Le médecin lui prescrit une ordonnance assez lourde - un anti-psychotique, un anxiolytique et un anti-dépresseur.

Entendu pendant l'enquête, le praticien a toutefois précisé que le jeune homme n'ayant pas réagi pendant l'entretien, il n'avait pas pu poser un diagnostic.

Un deuxième rendez-vous était prévu, mais "il n'a pas voulu retourner. Il m'a dit : +ces médicaments me brouillent l'esprit pour étudier+", justifie son père.

"C'est lui qui décide, je ne vais pas l'emmener de force", ajoute-t-il, provoquant la colère de l'une des accusées, Enkeledja Zace, poursuivie pour trafic d'armes.

"C'est pas possible, ça fait six ans... Nous on va en prison" à cause des actes de son fils, s'écrie-t-elle depuis le banc des accusés, avant d'être calmée par plusieurs avocats de la défense.


La manifestation de soutien à Le Pen "n'est pas un coup de force", dit Bardella

La présidente du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), l'eurodéputé Jordan Bardella (G) et la présidente du groupe parlementaire du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, quittent le palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 26 août 2024, après leur rencontre avec le président français. (Photo by Bertrand GUAY / AFP)
La présidente du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), l'eurodéputé Jordan Bardella (G) et la présidente du groupe parlementaire du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, quittent le palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 26 août 2024, après leur rencontre avec le président français. (Photo by Bertrand GUAY / AFP)
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  • « Ce n'est pas un coup de force, c'est au contraire une défense très claire et très profonde de l'État de droit et de la démocratie française.
  • « Cela nous semblait nécessaire que nous puissions nous exprimer directement aux Français.

STRASBOURG : La manifestation de soutien à Marine Le Pen prévue dimanche à Paris « n'est pas un coup de force », mais une mobilisation « pour la démocratie », a assuré mercredi Jordan Bardella, président du Rassemblement national, à des journalistes au Parlement européen à Strasbourg.

« Ce n'est pas un coup de force, c'est au contraire une défense très claire et très profonde de l'État de droit et de la démocratie française. C'est une mobilisation en réalité, non pas contre, mais pour la démocratie française », a déclaré l'eurodéputé au sujet de ce rassemblement annoncé par le RN après la condamnation de la triple candidate à la présidentielle à une peine d'inéligibilité immédiate.

« Cela nous semblait nécessaire (...) que nous puissions nous exprimer directement aux Français par l'intermédiaire de ces discours qui seront prononcés dimanche avec l'ensemble de nos cadres, de nos parlementaires et de nos militants », a-t-il ajouté.

Cette condamnation, que le RN qualifie de « scandale démocratique », compromet grandement ses chances de concourir une quatrième fois à la fonction suprême en 2027.

Pour Jordan Bardella, cela ne change « absolument rien » à sa relation avec Marine Le Pen, « si ce n'est qu'elle est peut-être encore plus forte qu'elle ne l'a été par le passé ».

« Je suis à ses côtés, je vais continuer à l'être (...) Nous allons évidemment mener le combat », a assuré l'eurodéputé qui faisait son retour au Parlement européen après avoir manqué les deux premiers jours de la session.

Il a qualifié de « bonne nouvelle » l'annonce de la justice qu'une décision en appel devrait être rendue « à l'été 2026 », donc bien avant la présidentielle.


Condamnation de Marine Le Pen: Macron rappelle au gouvernement l'indépendance de la justice

Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
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  • Le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés
  • Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours ».

PARIS : Mercredi en Conseil des ministres, le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés, après la condamnation de la cheffe de l'extrême droite Marine Le Pen qui a suscité des attaques contre les juges, ont rapporté des participants.

Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours », selon ces sources. La justice a déjà fait savoir qu'un nouveau procès en appel pourrait se tenir dans des délais qui laissent une porte ouverte à une éventuelle candidature présidentielle en 2027 de la leader du Rassemblement national (RN), principale formation d'extrême droite française. 

Devant la presse, à l'issue du Conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement Sophie Primas a rapporté mercredi les propos du chef de l'État.

« La première chose qu'il a rappelée, a poursuivi Mme Primas, est que la justice est évidemment indépendante et prend ses décisions en toute indépendance, et qu'il faut donc la respecter comme l'un des piliers de notre démocratie. La première, a-t-elle dit, est que la justice est indépendante et qu'elle prend ses décisions en toute indépendance et qu'il faut donc la respecter comme un pilier de notre démocratie.

« La troisième chose, pour rappeler que les menaces qui sont faites à l'encontre des magistrats sont absolument insupportables et intolérables, puisque nous sommes encore une fois dans une démocratie. Et la justice est tout à fait indépendante et doit être respectée », a-t-elle ajouté.

« Et la troisième chose, pour rappeler que chacun a le droit à une justice équivalente et que le droit est le même pour tous. »


Bac: l'épreuve de maths en première se précise pour l'an prochain

La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
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  • Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté
  • L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première,

PARIS : Le projet d'épreuve de mathématiques en classe de première pour l'an prochain, qui vise à mettre en œuvre le « choc des savoirs » annoncé par l'ex-ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal, a été présenté mardi devant une instance consultative de l'Éducation nationale, étape-clé avant sa publication.

Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté instaurant cette « épreuve terminale de culture mathématique aux baccalauréats général et technologique ».

Ils ont recueilli 0 voix pour, 27 contre, 31 abstentions et 4 refus de prendre part au vote (l'administration ne votant pas dans cette instance), un vote indicatif qui n'empêche pas la mise en œuvre de la réforme, selon des sources syndicales.

Cette épreuve écrite d'une durée de deux heures, qui entrera en vigueur au printemps 2026, sera « affectée d'un coefficient 2 » (points pris sur l’épreuve du Grand oral en terminale), selon ces textes, consultés par l'AFP.

L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première, un projet confirmé en novembre 2024 par sa successeure, Anne Genetet.

Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat du second degré (collèges et lycées), qualifie auprès de l'AFP la mesure de « rafistolage supplémentaire du bac Blanquer », décidé en 2019 par l'ex-ministre Jean-Michel Blanquer.

Pour Jérôme Fournier, secrétaire national du SE Unsa, la nouvelle épreuve « alourdit la fin de l'année pour les élèves et les correcteurs ».

La première partie, qui est commune à tous les élèves, sera sous forme de QCM et pourrait être corrigée automatiquement, ce à quoi « de nombreuses organisations syndicales sont opposées », a-t-il ajouté, tandis que la deuxième partie devrait consister en des résolutions de problèmes.

Des projets de textes ont par ailleurs été votés au CSE relatif à « la mise en place du +parcours renforcé+ en classe de seconde générale et technologique » ou professionnelle à partir de la rentrée 2026, avec trois votes pour, 45 contre et 13 abstentions.

Mis en place par la ministre Élisabeth Borne, ce parcours est destiné aux élèves n’ayant pas obtenu le diplôme du brevet. Son organisation relèvera « de l’autonomie de l’établissement sur la base indicative de deux heures hebdomadaires sur tout ou partie de l’année », selon le projet d'arrêté.

Sophie Vénétitay déplore « une coquille vide » tandis que Tristan Brams (CFDT Éducation) regrette l'absence de « moyens supplémentaires ».