Accusations russes de «bombe sale» en Ukraine, Kiev et Washington craignent un prétexte pour l'escalade

Des résidents ukrainiens se tiennent près d'une structure en feu après le bombardement de la ville de Bakhmut, dans la région du Donbass, dans l'est de l'Ukraine (Photo, AFP).
Des résidents ukrainiens se tiennent près d'une structure en feu après le bombardement de la ville de Bakhmut, dans la région du Donbass, dans l'est de l'Ukraine (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 24 octobre 2022

Accusations russes de «bombe sale» en Ukraine, Kiev et Washington craignent un prétexte pour l'escalade

  • Le ministre russe a également téléphoné dimanche au chef du Pentagone, Lloyd Austin
  • La Russie fait actuellement face à une vaste contre-offensive ukrainienne

KIEV: Moscou a accusé dimanche, lors d'entretiens téléphoniques avec des pays de l'Otan, l'Ukraine de se préparer à utiliser une "bombe sale", des allégations rejetées par Kiev et Washington qui disent craindre un prétexte pour une escalade.

Le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, s'est entretenu dimanche au téléphone avec ses homologues américain, français, britannique et turc du conflit en Ukraine, a annoncé le ministère russe de la Défense.

Au cours de ces échanges d'une intensité inédite en un seul jour pour M. Choïgou depuis le début de l'offensive russe en Ukraine le 24 février, il a fait part à la plupart de ses interlocuteurs de "ses préoccupations liées à d'éventuelles provocations de la part de l'Ukraine avec recours à une +bombe sale+", selon son ministère.

"Les affabulations russes à propos de l'Ukraine qui se préparerait à utiliser une bombe sale sont aussi absurdes qu'elles sont dangereuses", a réagi dimanche en début de soirée le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba sur les réseaux sociaux.

"Si la Russie appelle et dit que l'Ukraine serait en train de préparer quelque chose, cela signifie une seule chose: la Russie a déjà préparé tout cela. Je crois que désormais le monde doit réagir aussi durement que possible", a pour sa part fustigé le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

Si la Russie a préparé "une nouvelle étape dans l'escalade, elle doit voir maintenant, de façon préventive et avant une de ses nouvelles +saletés+, que le monde ne l'acceptera pas", a-t-il ajouté.

Les Etats-Unis rejettent "les allégations clairement fausses du ministre Choïgou, selon qui l'Ukraine se prépare à utiliser une bombe sale sur son propre territoire", a réagi la Maison Blanche, prévenant que "le monde ne serait pas dupe en cas de tentative d'utiliser cette allégation comme prétexte à une escalade".

Le ministère français des Armées a confirmé dans un communiqué que M. Choïgou avait dit craindre une "frappe de bombe sale par les Ukrainiens sur leur territoire, pour en faire porter la responsabilité à la Russie". Le ministre français Sébastien Lecornu lui a rappelé que "la France (refusait) toute forme d'escalade, singulièrement nucléaire".

Son homologue britannique Ben Wallace a "réfuté" durant l'entretien les affirmations de Moscou selon lesquelles les pays occidentaux facilitaient une escalade de la guerre en Ukraine.

Le ministre russe a également téléphoné dimanche au chef du Pentagone, Lloyd Austin - leur seconde conversation depuis vendredi, et la troisième depuis le début du conflit.

Coupures d'électricité à Kiev

Les Ukrainiens ont une nouvelle fois subi dimanche des coupures d'électricité, conséquence des frappes russes répétées visant les infrastructures du pays.

L'opérateur national Ukrenergo a procédé à des coupures électriques à Kiev pour "stabiliser" la fourniture en électricité, selon le fournisseur privé d'électricité ukrainien DTEK.

Plus d'un million de foyers ukrainiens ont été privés d'électricité à la suite d'attaques russes contre les infrastructures électriques, avait précisé samedi la présidence d'Ukraine.

Depuis une dizaine de jours, la Russie multiplie les frappes sur le réseau ukrainien, entraînant la destruction d'au moins un tiers de ses capacités, juste avant l'hiver.

Les frappes de l'armée russe ont aussi ciblé et détruit dimanche dans le centre de l'Ukraine un dépôt avec 100.000 tonnes de carburant destiné à l'aviation ukrainienne, ainsi que plusieurs dépôts de munitions et un réservoir de pétrole avec du carburant diesel destiné aux véhicules militaires ukrainiens, a affirmé le ministère russe de la Défense.

Frontière russe en alerte

La Russie fait actuellement face à une vaste contre-offensive ukrainienne et dénonce une "augmentation considérable" des tirs ukrainiens sur plusieurs régions russes frontalières, dont celles de Belgorod et de Koursk.

Deux lignes de défense ont été construites dans la région de Koursk pour faire face à une éventuelle attaque des forces ukrainiennes, a annoncé dimanche le gouverneur de la région, Roman Starovoït. "Nous sommes prêts à faire face à toute atteinte à notre territoire", a-t-il assuré.

Le gouverneur de la région de Belgorod, où deux personnes ont été tuées samedi par des frappes ukrainiennes selon les autorités locales, a également annoncé le même jour le début de la construction d'une ligne de défense.

Dans le sud de l'Ukraine, les autorités prorusses de la région de Kherson, première ville importante à avoir été prise par les forces russes au début de leur offensive et qui a depuis été annexée, ont appelé samedi les civils à quitter "immédiatement" la capitale régionale, face à l'avancée des forces de Kiev.

Les évacuations vers la rive gauche du fleuve Dniepr, qui borde Kherson, sont en cours depuis mercredi.

Une personne a été tuée dimanche dans l'explosion d'un engin artisanal accroché à un poteau dans une rue à Kherson, ont indiqué les autorités d'occupation prorusse.


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.