BEYROUTH: Le Parlement libanais n’a pas réussi à élire un successeur au président, Michel Aoun, jeudi, pour la deuxième fois en moins d’un mois.
Certains députés ont boycotté le vote, ce qui signifie que le quorum n’a pas été atteint, tandis que d’autres qualifient de «farce» les circonstances de l’échec de la réunion.
Bien que quatre-vingt-huit députés aient été présents au siège du Parlement, seuls soixante et onze ont participé à la séance de vote.
Le quorum requis est de quatre-vingt-six sur cent vingt-huit députés, soit deux tiers du nombre total.
Le président de la Chambre des députés, Nabih Berri, a appelé à un autre vote le 20 octobre avant que le mandat de Michel Aoun ne se termine à la fin du mois.
Michel Aoun doit quitter le palais présidentiel à minuit le 31 octobre.
La séance de jeudi a été reportée faute de quorum et d’accord sur un candidat sérieux.
Le bloc parlementaire de dix-neuf députés, qui constitue l’équipe du président Aoun, dirigée par son gendre, Gebran Bassil, a boycotté la session, car elle coïncidait avec le trente-deuxième anniversaire de l’entrée par effraction de l’armée syrienne au palais présidentiel de Baabda.
Des centaines de soldats libanais avaient été tués lors de l’attaque. Michel Aoun, quant à lui, avait trouvé refuge à l’ambassade de France.
Les députés arméniens, alliés du Courant patriotique libre (CPL) de Gebran Bassil, ont également boycotté la session parlementaire de jeudi.
Le député George Bushekian affirme que tous les blocs politiques doivent parvenir à un consensus.
«Jusqu’à présent, la situation n’est pas claire et nous voulons choisir la bonne personne pour servir les intérêts du pays», déclare-t-il.
Plusieurs députés étaient absents pour des raisons médicales, dont la députée réformiste Cynthia Zarazir, qui a pris d’assaut une banque la semaine dernière pour récupérer ses économies bloquées afin de pouvoir payer une intervention chirurgicale.
Bien qu'il n’ait manqué que quinze députés supplémentaires pour atteindre le quorum, certains parmi les quinze députés du Hezbollah et les quinze autres du mouvement Amal, présents au siège du Parlement, ne sont pas entrés dans la salle où se tiennent les sessions.
Cela a incité certains députés à qualifier les événements de «farce» puisque le quorum a été atteint au siège du Parlement, mais pas durant la session elle-même.
La députée réformiste Paula Yacoubian déclare: «Si nous savions que cela arriverait, nous n’aurions pas assisté à la session et gaspillé de l’essence.»
La plupart des députés qui ont assisté à la session ont exprimé leur inquiétude face à la menace d’un vide présidentiel au cas où le Parlement ne parviendrait pas à élire un président la semaine prochaine.
Le député du Hezbollah Hassan Fadlallah indique avant la session: «Le pays a besoin d’ententes et de consensus entre les blocs parlementaires. S’affronter les uns les autres mènera à un vide.»
Dans le même temps, le député Michel Moussa a révélé que le groupe de M. Berri dont il fait partie aurait recours au vote blanc lors de la session.
Gebran Bassil, qui se tenait avec son groupe devant la tombe du Soldat inconnu, près du siège du Parlement, soutient: «Ce moment est imprégné de sang, de douleur et de violence, et il est plus important que tout le reste. Nous aurions dû respecter les martyrs des uns et des autres. Ce jour-là, des soldats ont été martyrisés au nom de la légitimité et de notre patrie, mais certains ont trahi leur mémoire.»
Le président Berri avait sarcastiquement répondu à l’objection du CPL quant à la tenue de la session le 13 octobre, en disant: «Je ne savais pas que c’était un jour férié.»
Les blocs qui ont participé à la session pouvaient soit recourir au vote blanc, soit voter pour le candidat Michel Moawad, soit inscrire le mot «Liban» sur le bulletin.
Les Forces libanaises (FL), le parti socialiste progressiste, ainsi que les partis Kataëb (Phalanges libanaises) et Tajaddod ont annoncé qu’ils auraient de nouveau voté pour M. Moawad. On s’attendait à ce qu’il obtienne quarante voix, bien qu’il en ait besoin de soixante-quatre pour être élu président.
Le chef adjoint des FL, le député Georges Adwan, précise: «Il n’y a aucune excuse pour que les blocs ne votent pour personne. Il n’y a aucune excuse pour ne pas avoir de candidat avec une position claire. M. Moawad a la capacité de mettre en place le changement souhaité.»
Hadi Abou al-Hassan, député du parti socialiste progressiste, affirme: «Michel Moawad fait preuve de patriotisme, il croit en l’accord de Taëf et il a une vision économique claire. La plupart des blocs d’opposition étaient d'accord avec lui. Pourquoi ne pas voter pour lui à l’unanimité?»
Il a critiqué les députés qui ont perturbé la session en déclarant: «Nous venons de faire des progrès majeurs sur la question de la délimitation des frontières maritimes, qui nécessite de relancer les institutions de l’État, de créer un atelier de réforme au Parlement et de reprendre les négociations avec le Fonds monétaire international (FMI). Pourquoi laisserions-nous passer notre chance d’assurer un avenir sûr et prospère aux Libanais?»
Des députés réformistes et deux députés indépendants de Sidon ont indiqué qu’ils ne voteront pas blanc.
Le député Oussama Saad note: «J’aurais voté pour le Dr Essam Khalifa pour protester contre le processus de délimitation des frontières maritimes. Ce dernier est l’un des chercheurs les plus acharnés qui ont critiqué l’adoption par le Liban de la ligne 23 pour délimiter la frontière maritime, au lieu de la ligne 29 qui garantit au Liban ses droits sur une partie du champ gazier de Karich.»
Après la session, le député Melhem Khalaf a exigé que le président Berri appelle le Parlement à tenir une session d’urgence pour discuter de la délimitation des frontières maritimes.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com