Comment l’explosion du port a exacerbé les blessures psychologiques de Beyrouth

Le silo détruit au port de Beyrouth se dresse comme un symbole de la dévastation de la capitale libanaise après l’explosion qui a eu lieu en août (Photo, AFP).
Le silo détruit au port de Beyrouth se dresse comme un symbole de la dévastation de la capitale libanaise après l’explosion qui a eu lieu en août (Photo, AFP).
Un Libanais agite un drapeau national lors d’une manifestation marquant le premier anniversaire du début d’un mouvement de protestation dans tout le pays contre le gouvernement, dans le capitale Beyrouth, le 17 octobre 2020 (Photo, Anwar AMRO/AFP).
Un Libanais agite un drapeau national lors d’une manifestation marquant le premier anniversaire du début d’un mouvement de protestation dans tout le pays contre le gouvernement, dans le capitale Beyrouth, le 17 octobre 2020 (Photo, Anwar AMRO/AFP).
Aida Merhi, résidente du quartier très touché de Karantina dans la capitale libanaise, montre sa maison endommagée à la directrice du programme de santé mentale de Médecins du Monde (MDM) le 11 août 2020 (Photo, Anwar AMRO/AFP).
Aida Merhi, résidente du quartier très touché de Karantina dans la capitale libanaise, montre sa maison endommagée à la directrice du programme de santé mentale de Médecins du Monde (MDM) le 11 août 2020 (Photo, Anwar AMRO/AFP).
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Publié le Lundi 09 novembre 2020

Comment l’explosion du port a exacerbé les blessures psychologiques de Beyrouth

  • Plusieurs mois après l’explosion du port, les Libanais luttent pour faire face à l’adversité et au désespoir en l’absence de comptes
  • Les travailleurs en santé mentale affirment que l’impact durable de l’explosion a été exacerbé par les restrictions causées par le coronavirus et la catastrophe économique

BEYROUTH: Il y a près d’un demi-siècle, le Liban a été entraîné dans une guerre civile. Les immeubles criblés de balles rappellent cette époque sombre qu’a vécue la capitale, alors que les gratte-ciels scintillants sont des signes d’espoir et de renouveau. Mais, comme une sorte de grand nivellement historique, l’explosion du 4 août au port a laissé, sans discernement, des cicatrices sur le paysage urbain du pays, ne se souciant guère de l’âge ou de l’apparence d’un immeuble.

La situation au niveau du sol n’est pas très différente. Les rues délabrées de Beyrouth sont une véritable métaphore des blessures émotionnelles de ses habitants qui souffrent déjà d’une économie en crise, de coupures de courant constantes et d’une nouvelle vague de coronavirus. Le gouvernement est largement considéré comme inefficace et indifférent aux demandes de changement.

« Les blessures physiques guérissent, mais les blessures émotionnelles prennent beaucoup plus de temps — je ne sais pas comment nous serons capables de nous en remettre sans justice », déplore Ibana Carapiperis, 24 ans, volontaire à la Croix-Rouge libanaise, se souvenant de ce jour d’été durant lequel 3 000 tonnes de nitrate d’ammonium mal stockées ont pris feu. L’explosion qui en a résulté a fait 204 morts et environ 6 500 blessés. L’indignation générale a forcé le gouvernement de Hassan Diab à démissionner.

« Il est encore difficile pour moi de comprendre mes émotions jusqu’à ce jour. À chaque fois que j’essaye de le faire, je sens que je pourrais flancher à tout moment. L’explosion est toujours aussi vive dans ma mémoire trois mois plus tard. C’est comme si c’était hier », ajoute Mme Carapiperis.

Le 17 octobre marque le premier anniversaire de la « thawra » — ou « révolution » en arabe — durant laquelle des milliers de Libanais sont descendus dans les rues pour demander un changement économique et politique, forçant le Premier ministre Saad Hariri à se désister. Cependant, lorsqu’ils y sont retournés cette année, l’ambiance était différente — obscurcie par des mois de difficultés et de défaites.

De nombreux purs et durs de la thawra n’y ont même pas participé. « Quelle thawra ? », demande l’un. « Nous avons besoin d’unité, nous avons besoin d’un leader. Nous sommes perdus maintenant », lance un autre.

Des volontaires du programme de santé mentale de Médecins du Monde (MDM) prennent une photo, le 11 août 2020, de l’horloge qui s’est arrêtée en raison de l’explosion du 4 août (18h08) dans l’une des maisons détruites du quartier de Karantina dans la capitale libanaise (Photo, Anwar AMRO/AFP).

Quelques jours après la commémoration de la révolution, lorsque Moustapha Adib n’a pas réussi à former son Cabinet non-partisan, la classe politique libanaise a choisi de désigner Hariri pour reprendre ses fonctions de Premier ministre — exacerbant le sentiment d’impuissance des révolutionnaires. Le 21 octobre, les partisans de Hariri ont même mis le feu au « Poing de la révolution » situé à la Place des martyrs, mais il a rapidement été remplacé le matin suivant par des activistes qui refusent d’abandonner.

« Ce qui me donne de l’espoir, c’est de savoir que les gens continuent à se battre tous les jours et descendent dans les rues pour poursuivre la révolution et tenter de changer le système », dit Mme Carapiperis. « Nous ne pouvons pas juste tourner la page en quelques jours, semaines ou mois ».

Son diagnostic est corroboré par ses collègues. « Toutes les blessures ne sont pas visibles, que ce soit sur un corps ou sur une ville bien-aimée », souligne Marco Baldan, chirurgien à la Croix-Rouge qui a aidé à coordonner les interventions d’urgence, dans un communiqué. « Outre les blessures physiques horribles qui sont traitées dans les hôpitaux, les gens risquent de développer des blessures cachées, sauf si une aide psychologique leur est fournie. Le soutien psychologique est une partie vitale de l’intervention médicale ».

Talal Merhi, résident du quartier très touché de Karantina dans la capitale libanaise, discute avec la directrice du programme de santé mentale de Médecins du Monde (MDM) le 11 août 2020 dans sa maison endommagée (Photo, Anwar AMRO/AFP). 

L’explosion a eu lieu lorsque le Liban était déjà plongé dans le désespoir après plusieurs mois sous l’emprise de la pandémie de Covid-19  et de la crise économique.

Plusieurs personnes avaient perdu leurs emplois, leurs commerces et leurs économies ; la situation a contribué à une augmentation de la dépression, des idées suicidaires et du désespoir parmi la population.

« Les gens ne vont pas bien mentalement », affirme Rona Halabi, porte-parole de la Croix-Rouge à Beyrouth. « Environ 300 000 personnes ont perdu leurs maisons. Imaginez donc le stress que cela a causé. À notre avis, la santé mentale est tout aussi importante que la santé physique.

« Après des blessures physiques, les plaies vont éventuellement cicatriser, mais ce dont vous allez vous souvenir, après ce terrible incident, ne s’en ira jamais. Les gens doivent apprendre à faire face au traumatisme et à poursuivre leurs vies normalement ».

Selon les travailleurs en santé mentale, les survivants ne se sentent toujours pas bien et leur situation a été exacerbée par la solitude due aux restrictions causées par le coronavirus.

« Lorsque la pandémie a commencé, les mesures anti-coronavirus telles que le confinement et le couvre-feu ont porté un coup dur aux mécanismes d'adaptation traditionnels des gens, tels que se rassembler et voir des amis pour partager leurs inquiétudes et leurs frustrations », explique Isabel Rivera Marmolejo, déléguée à la santé mentale de la Croix-Rouge au Liban. « L'explosion a été encore un coup de massue ».

LE LIBAN EN CHIFFRES

À 155%, le ratio dette / PIB du Liban est le troisième le plus élevé au monde.
La dette publique devrait atteindre 167% en 2021.
L’inflation devait s’établir en moyenne à 20% en 2020.

Une ligne d’assistance spéciale a été mise en place après l'explosion pour aider les personnes victimes de traumatismes à la place de sessions en face à face. Cependant, même les psychologues libanais qui ont vécu l'explosion disent avoir été affectés.

« Les psychologues libanais souffrent aussi de ce traumatisme », indique Myrna Ghannagé, directrice du département de psychologie à l’Université Saint-Joseph de Beyrouth, à Arab News.

Lors de l'explosion, elle a subi des blessures qui n’ont pas mis sa vie en danger, mais elle reste troublée par son expérience. « Je n'ai jamais rien vu de tel de ma vie », raconte-t-elle. « En tant que Libanais, nous avons perdu notre équilibre mental. Nous sommes toujours perdus. Il y a un manque d'espoir et une peur constante de l'incertitude chez le peuple libanais ».

« Les explosions de Beyrouth ont ravivé les blessures psychologiques de la guerre civile. Nous sommes maintenant très fragiles », ajoute Mme Ghannagé.

Alors, comment aider des personnes qui ont perdu espoir ? « Nous devons les guider afin qu’ils puissent utiliser leurs propres ressources individualistes  », explique Mme Ghannagé. « La société libanaise n’offre rien au peuple. Il doit compter sur ses propres moyens pour survivre. Il n’est pas facile d’aider les gens aujourd’hui. En tant que psychologues, nous pouvons les écouter autant que possible, mais nous n’avons plus le même espoir que nous avions auparavant ».

Noelle Jouane, directrice du programme de santé mentale de Médecins du Monde (MDM) à Beyrouth est sur le terrain dans le quartier de Karantina dans la capitale libanaise, le 11 août 2020 (Photo, Anwar AMRO/AFP).

Largement forcés à se débrouiller tous seuls, de nombreux résidents de Beyrouth ont simplement besoin de temps pour accepter ce qui s’est passé et trouver des moyens sains de s’occuper.

« J’ai encouragé les gens à rester en mouvement, à s’en tenir à leurs routines et à ne pas s’attendre à de hauts niveaux de productivité de leur part », mentionne Gisele Chaine, psychologue libanaise avec la Croix-Rouge.

« Les gens vont revenir lentement à la vie quotidienne. Les personnes avec lesquelles je parle encore au téléphone ont moins de symptômes liés aux traumatismes, comme des cauchemars, un manque de productivité et une faible concentration ».

Cela dépend souvent du niveau de résilience individuel. « Quelquefois, tout ce dont ils avaient besoin était d’une personne à qui parler. Ils avaient besoin d’avoir un espace sûr au téléphone », dit Mme Chaine.

Il existe peut-être une lueur d’espoir dans les nombreuses organisations non gouvernementales et les groupes de soutien qui ont été créés à la suite de l’explosion. Beaucoup de Libanais, semble-t-il, trouvent un sens dans la contribution à la reconstruction de leur communauté, même en l'absence de soutien du gouvernement. Mais là encore, beaucoup d'autres choisissent de quitter le pays pour échapper au traumatisme et au malaise économique grandissant.

La psychologue clinicienne Mia Atwi, co-fondatrice d’Embrace, une ligne d’assistance pour la prévention du suicide, lit des courriels dans la capitale libanaise Beyrouth, le 13 juillet 2018 (Photo, Anwar AMRO/AFP).

« Certaines familles sont toujours à la montagne et n’ont pas encore pu retourner chez eux à Beyrouth par peur d’être dans leurs maisons détruites et proches du site de l’explosion », précise Mia Atwi, co-fondatrice d’Embrace, une ligne d’assistance pour la prévention du suicide lancée en 2013.

« Il y a beaucoup de désespoir, il y a beaucoup de détresse. Beaucoup de gens travaillent pour quitter le Liban. Au téléphone, vous entendez des gens anxieux, déprimés, désespérés, qui se sentent en danger et se sentent très confus ».  Pour de nombreux Libanais, la page ne sera tournée qu'une fois une sorte de justice  atteinte et que des comptes aient été rendus.

« Une partie du processus de guérison pour la plupart d'entre nous est d’instaurer la justice sociale », a déclaré Mme Atwi. « Ce n'est pas un évènement que vous pouvez guérir en utilisant uniquement la traumatologie. Les explosions étaient également un évènement politique. Elles sont le résultat de l'incompétence de notre gouvernement. Nous devons savoir qui est responsable et leur demander des comptes ».

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Une reconnaissance de l'Etat palestinien par la France serait «une récompense pour le terrorisme»

"Une 'reconnaissance unilatérale' d'un Etat palestinien fictif, par n'importe quel pays, dans la réalité que nous connaissons tous, sera une récompense pour le terrorisme et un coup de pouce pour le Hamas", a affirmé M. Saar mercredi soir sur le réseau social X. (AFP)
"Une 'reconnaissance unilatérale' d'un Etat palestinien fictif, par n'importe quel pays, dans la réalité que nous connaissons tous, sera une récompense pour le terrorisme et un coup de pouce pour le Hamas", a affirmé M. Saar mercredi soir sur le réseau social X. (AFP)
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  • Une reconnaissance de l'Etat palestinien par la France pourrait intervenir en juin, selon le président Emmanuel Macron,
  • "Une 'reconnaissance unilatérale' d'un Etat palestinien fictif, par n'importe quel pays, dans la réalité que nous connaissons tous, sera une récompense pour le terrorisme et un coup de pouce pour le Hamas"

JERUSALEM: Une reconnaissance de l'Etat palestinien par la France, qui pourrait intervenir en juin, selon le président Emmanuel Macron, serait "une récompense pour le terrorisme", a estimé le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

"Une 'reconnaissance unilatérale' d'un Etat palestinien fictif, par n'importe quel pays, dans la réalité que nous connaissons tous, sera une récompense pour le terrorisme et un coup de pouce pour le Hamas", a affirmé M. Saar mercredi soir sur le réseau social X. "Ce genre d'actions n'apportera pas la paix, la sécurité et la stabilité dans notre région, mais l'inverse: elles ne feront que les éloigner davantage".

 


Saudi Aramco découvre 14 nouveaux champs pétroliers et gaziers

  Les découvertes comprennent six champs pétroliers, deux réservoirs de pétrole, deux champs de gaz naturel et quatre réservoirs de gaz naturel. (Reuters)
 Les découvertes comprennent six champs pétroliers, deux réservoirs de pétrole, deux champs de gaz naturel et quatre réservoirs de gaz naturel. (Reuters)
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  • L'Arabie saoudite conforte sa position de leader mondial de l'énergie
  • Dans la province orientale, le champ pétrolier de Jabu a été identifié après que du pétrole brut arabe très léger se soit écoulé au rythme de 800 barils par jour du puits Jabu-1

RIYADH : Saudi Aramco a fait une série de découvertes révolutionnaires de pétrole et de gaz dans la province orientale et le quartier vide, consolidant ainsi la position de l'Arabie saoudite en tant que leader mondial de l'énergie.

Annoncées mercredi par le ministre de l'Énergie, le prince Abdulaziz bin Salman, ces découvertes comprennent six champs pétroliers, deux réservoirs de pétrole, deux champs de gaz naturel et quatre réservoirs de gaz naturel, mettant ainsi en évidence le vaste potentiel d'hydrocarbures du Royaume, qui ne cesse de croître.

Dans la province orientale, le champ pétrolier de Jabu a été identifié après que du pétrole brut arabe très léger se soit écoulé au rythme de 800 barils par jour du puits Jabu-1.

Une autre découverte notable a été faite dans le champ de Sayahid, où du brut très léger s'est écoulé du puits Sayahid-2 à un taux de 630 bpj. Le champ d'Ayfan a également montré des résultats prometteurs, le puits Ayfan-2 produisant 2 840 bpj de brut très léger et environ 0,44 million de pieds cubes standard de gaz par jour.

Une exploration plus poussée a confirmé l'existence du réservoir de Jubaila dans le champ de Berri, où le puits Berri-907 a produit du brut léger à un rythme de 520 bpj, ainsi que 0,2 million de pieds cubes standard de gaz par jour. En outre, le réservoir Unayzah-A dans le champ Mazalij a produit du brut léger de première qualité à partir du puits Mazalij-64 à un taux de 1 011 bpj, associé à 0,92 million de pieds cubes de gaz par jour.

Au cours du trimestre vide, le champ de Nuwayr a produit du brut arabe moyen à 1 800 bpj à partir du puits Nuwayr-1, ainsi que 0,55 million de pieds cubes de gaz par jour. Le champ de Damdah, exploité par le puits Damda-1, a produit du brut moyen à partir du réservoir Mishrif-C, à raison de 200 b/j, et du brut très léger à partir du réservoir Mishrif-D, à raison de 115 b/j. Le champ de Qurqas a également produit du brut moyen à 210 bpj à partir du puits Qurqas-1.

En ce qui concerne le gaz naturel, des découvertes notables ont été faites dans la province orientale. Du gaz a été trouvé dans le réservoir Unayzah B/C du champ Ghizlan, le puits Ghizlan-1 produisant 32 millions de pieds cubes de gaz par jour et 2 525 barils de condensat. Dans le champ d'Araam, le puits Araam-1 a produit 24 millions de pieds cubes de gaz par jour et 3 000 barils de condensat. Du gaz non conventionnel a également été découvert dans le réservoir Qusaiba du champ Mihwaz, où le puits Mihwaz-193101 a produit 3,5 millions de pieds cubes par jour et 485 barils de condensat.

Dans le quartier vide, d'importants flux de gaz naturel ont été enregistrés dans le champ de Marzouq, avec 9,5 millions de pieds cubes par jour en provenance du réservoir Arab-C et 10 millions de pieds cubes en provenance du réservoir Arab-D. En outre, le réservoir Upper Jubaila a produit 1,5 million de pieds cubes de gaz par jour à partir du même puits.

Le prince Abdulaziz a souligné l'importance de ces découvertes, notant qu'elles contribuent à consolider le leadership de l'Arabie saoudite dans le secteur mondial de l'énergie et à renforcer le potentiel du Royaume en matière d'hydrocarbures.

Ces découvertes devraient stimuler la croissance économique, renforcer la capacité de l'Arabie saoudite à répondre efficacement à la demande énergétique nationale et internationale et soutenir les objectifs de durabilité à long terme du pays. Elles s'alignent sur les objectifs de la Vision 2030, qui vise à maximiser la valeur des ressources naturelles et à assurer la sécurité énergétique mondiale.


Aux confins de Gaza, Macron appelle à une reprise rapide de l'aide humanitaire

Accueilli à al-Arich par son homologue égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, M. Macron a également condamné "avec force" les attaques visant les humanitaires et secouristes dans la bande de Gaza, deux semaines après la mort de secouristes tués par des tirs israéliens dans le territoire palestinien. (AFP)
Accueilli à al-Arich par son homologue égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, M. Macron a également condamné "avec force" les attaques visant les humanitaires et secouristes dans la bande de Gaza, deux semaines après la mort de secouristes tués par des tirs israéliens dans le territoire palestinien. (AFP)
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  • "La situation aujourd'hui est intenable et elle n'a jamais été aussi grave", a déclaré le président français, appelant "à une reprise le plus rapidement possible de l'aide humanitaire"
  • La quasi-totalité des 2,4 millions d'habitants de la bande de Gaza ont été déplacés au moins une fois par les combats et vivent dans un territoire dévasté et assiégé depuis le début de la guerre

AL-ARISH: Emmanuel Macron a affirmé mardi que la reprise de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza était "la priorité des priorités", lors d'une visite à al-Arich, avant-poste égyptien du soutien humanitaire à Gaza où la situation est "intenable, selon le président français.

Cette rare visite d'un dirigeant européen aux confins de la bande de Gaza intervient dans un contexte tendu, alors que Israël a repris ses opérations militaires le 18 mars après deux mois de trêve. Israël bloque par ailleurs depuis le 2 mars l'entrée de l'aide humanitaire à Gaza.

"La situation aujourd'hui est intenable et elle n'a jamais été aussi grave", a déclaré le président français, appelant "à une reprise le plus rapidement possible de l'aide humanitaire", "la priorité des priorités", selon lui.

La quasi-totalité des 2,4 millions d'habitants de la bande de Gaza ont été déplacés au moins une fois par les combats et vivent dans un territoire dévasté et assiégé depuis le début de la guerre déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël.

Accueilli à al-Arich par son homologue égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, M. Macron a également condamné "avec force" les attaques visant les humanitaires et secouristes dans la bande de Gaza, deux semaines après la mort de secouristes tués par des tirs israéliens dans le territoire palestinien.

"Nous condamnons évidemment avec force ces attaques, et il faut qu'ensuite la vérité soit établie comme il se doit,  parce que le monde a des règles, et c'est une bonne chose", a-t-il déclaré.

Le 23 mars, 15 personnes ont été tuées par des tirs israéliens sur des ambulances à Rafah, point de passage entre l'Egypte et Gaza à 50 km d'al-Arich, selon l'ONU et le Croissant-rouge palestinien. Le drame suscite un tollé international et le chef de l'armée israélienne a ordonné lundi une "enquête plus approfondie".

"Pas un projet immobilier" 

"La protection des civils et du personnel humanitaire ainsi qu'un plein accès de l'aide humanitaire constituent des obligations en vertu du droit international et du droit international humanitaire et doivent être respectées", avaient déjà plaidé lundi au Caire les présidents Macron et al-Sissi ainsi que le roi Abdallah II de Jordanie, dans une déclaration conjointe.

Ils ont aussi "appelé à un retour immédiat au cessez-le-feu pour que les Palestiniens soient protégés et reçoivent de l'aide humanitaire en quantité et dans les plus brefs délais".

Un message réitéré de vive voix à Donald Trump dans un appel téléphonique à quatre, juste avant que le président américain ne reçoive le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, à la Maison Blanche.

Interrogé mardi lors d'un point de presse à al-Arich sur les déclarations de Donald Trump, qui avait évoqué une prise de contrôle de la bande de Gaza par les Etats-Unis pour la reconstruire et en faire la "Riviera du Moyen-Orient", M. Macron a répondu que le territoire palestinien n'était "pas un projet immobilier".

"La réalité, c'est que vous avez 2 millions de personnes qui sont enfermées (...)  Après des mois et des mois de bombardements d'une guerre terrible, des dizaines de milliers de personnes ont perdu la vie. Vous avez des dizaines de milliers d'enfants qui sont mutilés sans famille. C'est ça dont on parle quand on parle de Gaza. C'est pas d'un projet immobilier", a souligné M. Macron.

Depuis octobre 2023, plus de 330 travailleurs humanitaires, la plupart d'entre eux appartenant à l'Unrwa, l'agence des Nations unies d'aide aux réfugiés palestiniens, ont été tués dans la bande de Gaza, selon les données de l'ONU datant de novembre.