Tensions entre Ankara et Paris après la dissolution des « Loups Gris »

Le président Recep Tayyip Erdogan accuse son homologue français Emmanuel Macron de mener une « campagne de haine » contre l'islam et mis en cause son « état de santé mentale » (Photo, AFP)
Le président Recep Tayyip Erdogan accuse son homologue français Emmanuel Macron de mener une « campagne de haine » contre l'islam et mis en cause son « état de santé mentale » (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 05 novembre 2020

Tensions entre Ankara et Paris après la dissolution des « Loups Gris »

  • Dénonçant une « provocation », la Turquie a prévenu qu'elle répliquerait « de la plus ferme des manières »
  • Ces crispations se sont encore intensifiées depuis fin octobre, lorsque M. Erdogan a appelé à boycotter les produits français

ISTANBUL : La Turquie a menacé mercredi de « répliquer fermement » à la dissolution en France d'un groupe ultranationaliste turc, une décision qui allume un nouveau foyer de tension entre ces deux membres de l'Otan à couteaux tirés.

Après de récentes violences visant la communauté arménienne de France, le ministre français de l'Intérieur a annoncé mercredi la dissolution du mouvement ultranationaliste des « Loups Gris », dont de nombreux membres soutiennent le président Recep Tayyip Erdogan.

Dénonçant une « provocation », la Turquie a prévenu qu'elle répliquerait « de la plus ferme des manières », sans toutefois donner d'indication sur les mesures qu'elle pourrait prendre.

Cette passe d'armes intervient en pleines tensions diplomatiques entre la France et la Turquie, liées notamment à des désaccords sur la Syrie, la Libye et la Méditerranée orientale.

Ces crispations se sont encore intensifiées depuis fin octobre, lorsque M. Erdogan a appelé à boycotter les produits français, accusant son homologue français Emmanuel Macron d' « islamophobie » pour avoir défendu le droit de caricaturer le prophète Mahomet.

M. Erdogan a accusé M. Macron de mener une « campagne de haine » contre l'islam et mis en cause son « état de santé mentale ».

« Actions violentes »

A l'origine, les « Loups Gris » sont un surnom donné aux membres des « Foyers idéalistes », un mouvement ultranationaliste qui s'est développé à partir des années 1960 dans l'orbite du parti turc d'extrême droite MHP. 

Ralliés à l'idéologie « panturquiste » et soupçonnés d'accointances avec la mafia turque, ils ont surtout fait parler d'eux dans les années 1970 et 1980 par leurs actions violentes dans les rues et sur les campus en Turquie contre des militants de gauche et des minorités, allant jusqu'au meurtre.

En annonçant sa dissolution mercredi, le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin a qualifié les « Loups Gris » de groupe qui « incite à la discrimination et à la haine et est impliqué dans des actions violentes ».

« Plusieurs foyers de ce mouvement ont été identifiés sur le territoire » français et « ses membres participent à des camps d'entraînement », notamment un « camp des armes de jeunesse » organisé en Ardèche (Sud de la France) en décembre 2019, selon le décret de dissolution.

Les « Loups Gris » promeuvent « une idéologie tendant à discriminer voire à provoquer à la violence contre les personnes d'origine kurde et arménienne », selon le texte.

Dimanche, un mémorial du génocide arménien a été retrouvé tagué avec l'inscription « Loups Gris » dans la région de Lyon (centre-est de la France) et de nouvelles inscriptions anti-Arméniens ont été découvertes lundi à Meyzieu (Est) et sur les murs du consulat d'Arménie à Lyon.

Ces dégradations ont pour toile de fond la guerre dans la région indépendantiste du Nagorny Karabakh, opposant l'Arménie et l'Azerbaïdjan, soutenu par la Turquie.

« Hypocrisie »

La dissolution des « Loups Gris » est le signe que « le gouvernement français est désormais complètement sous la coupe des milieux d'influence arméniens », a réagi mercredi le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué.

Il a aussi accusé Paris de faire montre d' « hypocrisie » et de « deux poids, deux mesures » en interdisant les « Loups Gris » tout en autorisant les activités en France du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et d'autres groupes qualifiés de « terroristes » par Ankara.

Si les « Loups Gris » ne terrorisent plus les campus turcs aujourd'hui, leurs symboles sont néanmoins devenus omniprésents, dans un contexte de virage nationaliste du président Erdogan, notamment depuis un putsch manqué en 2016.

Le président turc est d'ailleurs allié à l'actuel dirigeant du MHP, Devlet Bahçeli, qui a largement contribué à museler les éléments les plus violents de la mouvance nationaliste.

Dans ce cadre, le signe de ralliement des « Loups Gris », un pouce joint au majeur et à l'annulaire pour former une tête de loup, est devenu un geste courant en Turquie: on le voit dans les tribunes lors des matchs de football ou au bord des routes lorsqu'un convoi militaire passe.

M. Erdogan lui-même a plusieurs fois effectué ce geste lors de meetings, pour tenter de séduire l'électorat nationaliste.


Première mission du porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle aux Philippines

Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
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  • L'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.
  • La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

SUBIC BAY FREEPORT ZONE PHILIPPINES : Le porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle a effectué sa première mission aux Philippines, où l'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.

« Compte tenu de la montée des tensions, il est d’autant plus important de défendre le droit international et la liberté de navigation, que ce soit en mer ou dans les airs », a déclaré l'ambassadrice Marie Fontanel sur le pont du porte-avions, dans la baie de Subic, au nord de Manille.

Le groupe aéronaval a rejoint la marine des Philippines vendredi pour ces exercices.

Constitué de quelque 3 000 marins, il avait quitté le port de Brest en novembre pour une mission de plusieurs mois en mer Rouge, dans l'océan Indien et dans le Pacifique, durant laquelle il doit intégrer régulièrement des frégates ou des sous-marins de pays étrangers.

La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

Les Philippines cherchent pour leur part à renforcer leurs relations avec leurs alliés face aux confrontations régulières entre Manille et Pékin concernant la mer de Chine méridionale. Pékin y revendique en effet la majeure partie de cette voie navigable stratégique.

En novembre, Manille avait annoncé l'achat à la France de 40 vedettes rapides de patrouille dans le cadre d'un accord de 440 millions de dollars (environ 420 millions d'euros).


L'écrivain Boualem Sansal a entamé une grève de la faim, a déclaré son avocat

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  • « Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.
  • Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

PARIS : L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, incarcéré en Algérie depuis mi-novembre, a entamé lundi une grève de la faim, a indiqué son avocat dimanche à l'AFP, précisant tenir cette information d'une source judiciaire.

« Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.

Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

« Ni la pondération dans l'expression de sa défense, ni la retenue face à la campagne abjecte que j'ai subie dans certains médias algériens, ni le respect du cadre judiciaire de ce pays ne semblent avoir été appréciés par un régime qui persiste à me refuser le visa sans raison valable, privant Boualem Sansal de la défense de son choix », a martelé l'avocat.

Ce dernier a également affirmé que le protocole de soin suivi par Boualem Sansal avait été interrompu, alors que l'écrivain souffrirait d'un cancer, d'après des informations de presse.

Boualem Sansal est poursuivi en vertu de l'article 87 bis du Code pénal algérien, qui sanctionne comme acte terroriste ou subversif tout acte visant la sûreté de l'État, l'intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions.

Selon le quotidien français Le Monde, le pouvoir algérien aurait mal pris les déclarations de Boualem Sansal au média français Frontières, réputé d'extrême droite, reprenant la position du Maroc selon laquelle le territoire de ce dernier pays aurait été amputé sous la colonisation française au profit de l'Algérie.

Son incarcération a provoqué les protestations de nombreux intellectuels et écrivains, qui estiment les poursuites sans aucun fondement.

Boualem Sansal a longtemps affirmé être né en 1949, ce qui lui donnerait aujourd'hui 75 ans. En décembre, son éditeur Antoine Gallimard avait pour sa part indiqué qu'il était en vérité né en 1944 et avait donc 80 ans.


Immigration : un conseil interministériel se réunit mercredi

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
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  • Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.
  • Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

PARIS : Le gouvernement français réunira un conseil interministériel de contrôle de l'immigration mercredi, alors qu'une attaque au couteau, perpétrée par un Algérien en situation irrégulière, a fait un mort samedi à Mulhouse, a assuré dimanche le ministre des Affaires étrangères.

Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.

Au cours de l'entretien, le ministre a été interrogé sur les discussions avec ses homologues algériens concernant les obligations de quitter le territoire français (OQTF).

« Cette attaque terroriste nous appelle à amplifier encore la mobilisation qui est la nôtre pour mieux contenir et prévenir les conséquences de la présence de ce terroriste islamiste sur le territoire national », a estimé le ministre avant d'évoquer le conseil interministériel.

Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

Le Premier ministre, François Bayrou, a d'ailleurs convoqué un conseil interministériel de contrôle de l'immigration ce mercredi. « Nous devons faire plus et nous devons faire mieux », a-t-il déclaré.

M. Barrot a également affirmé avoir demandé « aux 19 ambassadeurs, dans les pays où nous rencontrons le plus de difficultés pour renvoyer les étrangers en situation irrégulière, à me faire un rapport circonstanciel dont je présenterai les résultats ce mercredi au Premier ministre pour que nous puissions prendre des mesures fortes ».

« Il y a des pays vis-à-vis desquels il nous faut effectivement prendre des mesures fortes. Il y en a d'autres où, au contraire, il nous faut des mesures d'accompagnement », a-t-il ajouté.