AL-MUKALLA: Les tribunaux de la ville de Sanaa, tenue par les Houthis, ont été paralysés samedi, les juges yéménites s'étant mis en grève pour tenter d'obliger la milice soutenue par l'Iran à inculper les personnes impliquées dans le meurtre d'un juge de haut rang la semaine dernière, selon des habitants.
Khaled al-Kamal, un avocat basé à Sanaa qui a visité trois tribunaux samedi, a déclaré à Arab News que ces derniers étaient vides car les juges et les employés de l’administration ont refusé de travailler dans un rare geste de protestation contre le meurtre, ainsi qu’en raison des salaires bas et impayés, et l'ingérence de puissantes figures houthies.
«De gros efforts sont déployés pour reprendre le travail dans les tribunaux», a déclaré Al-Kamal.
Le juge Mohammed Hamran, 63 ans, de la Cour suprême de Sanaa, a été enlevé devant son domicile de la rue Al-Asbahi et retrouvé mort quelques jours plus tard.
Le gouvernement yéménite a accusé les Houthis de ce meurtre, affirmant qu'Hamran s'était précédemment prononcé contre la milice qui a pillé des terres publiques et privées, et d'autres propriétés.
Ce meurtre a incité le Yemen Courts Club, un groupe de coordination des juges du pays, à déclarer une suspension temporaire des activités judiciaires jusqu'à ce que les Houthis traduisent les meurtriers en justice.
Le club a également accusé un journaliste affilié aux Houthis, Mohammed al-Emad, qui dirige la chaîne Al-Hawiah TV, d'avoir incité le public à tuer le juge en alléguant qu'il était corrompu. Ils ont demandé la fermeture de la chaîne et l'inculpation d'Al-Emad.
Les juges ont également exigé la fin de l'ingérence dans le système judiciaire, ainsi que le paiement des salaires des juges, qui n'ont pas été versés depuis plus d'un an.
« 'autorité judiciaire et ses hommes n'ont pas obtenu leur droit légitime à l’autonomie financière. Leur dignité, leur sang et leur prestige n'ont pas non plus été respectés», a déclaré le club dans un communiqué.
Les services de sécurité des Houthis ont affirmé vendredi avoir arrêté les hommes qui ont exécuté le juge, invoquant des différends fonciers «privés» entre le juge et les meurtriers.
Mais les responsables yéménites pensent que les Houthis éliminent les juges qui désobéissent à leurs ordres et ceux qui refusent de cautionner leur contrôle sur des terres publiques et privées.
Jeudi, Abdallah Mohammed al-Kibsi, un ancien législateur et un responsable de la sécurité fidèle aux Houthis, a été abattu devant son domicile à Sanaa. Les Houthis ont affirmé avoir appréhendé les tueurs et attribué le meurtre à un différend familial.
Les Yéménites ont mis en doute les affirmations des Houthis et ont souligné l'escalade de la rivalité interne et de la violence entre les différentes factions houthies, en particulier les familles houthies hachémites de Saada et celles qui sont nées et ont grandi à Sanaa. Al-Kibsi est issu d'une famille hachémite basée à Sanaa.
Par ailleurs, les Houthis ont bombardé samedi, pour la sixième journée consécutive, l'entrée ouest de la ville densément peuplée de Taïz, malgré les appels locaux et internationaux à la désescalade.
Selon des habitants, plusieurs obus tirés par les Houthis depuis des positions situées à l'extérieur de Taïz ont atterri dans la zone d'Al-Dhabab, où se trouve la seule route reliant Taïz à Aden. Depuis dimanche dernier, les Houthis bombardent Al-Dhabab dans l'espoir de prendre le contrôle de la route principale.
Le bombardement de samedi s'est produit quelques heures seulement après que les troupes gouvernementales ont repoussé une attaque des Houthis contre leurs positions dans la même zone.
L'envoyé spécial des Nations unies pour le Yémen et un certain nombre d'autres envoyés occidentaux ont condamné l'escalade militaire des Houthis à Taïz et ont exhorté la milice à respecter la trêve négociée par les Nations unies.
Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com
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