LONDRES: Les Libyens désespèrent que la situation politique et humanitaire désastreuse dans leur pays soit résolue de sitôt, a averti un conseiller supérieur de la représentation américaine à l'ONU.
Jeffrey DeLaurentis a déclaré au Conseil de sécurité de l'ONU que les Libyens «perdaient l’espoir que leur pays puisse être libre de toute corruption et d'influence étrangère», à la suite des affrontements entre factions rivales dans la capitale Tripoli la semaine dernière, qui ont fait 32 morts.
Le peuple libyen, a-t-il ajouté, doute «que les forces armées puissent être unifiées et que les combattants et mercenaires étrangers soient évacués du pays».
«Les Libyens sont privés des services publics de base tandis que les personnes qui ont le pouvoir concluent des accords pour répartir les revenus des hydrocarbures en fonction de leurs propres intérêts, en particulier entre les milices contrôlées par diverses factions, privant ainsi le peuple de sa richesse nationale.»
L'ONU a fait peu de progrès en Libye depuis la médiation en 2020 d'un cessez-le-feu et l'accord sur la perspective d’élections nationales. L’organisation n’a pas réussi à nommer un nouvel envoyé spécial dans le pays depuis novembre 2021.
Entre-temps, les élections appuyées par l'ONU, prévues pour le 24 décembre 2021, restent hors de propos en raison de désaccords sur la Constitution et les critères d’éligibilité pour se présenter, dans un contexte de violences entre les partisans des deux Premiers ministres rivaux, Abdel Hamid Dbeibah et Fathi Bachagha, chacun contrôlant différentes parties du pays.
Tarek Megerisi, expert de la Libye au Conseil européen des relations internationales (ECFR), a déclaré au Conseil de sécurité que les récents affrontements étaient la première fois que des armes lourdes et d'artillerie ont été utilisées à Tripoli, contrôlée par le gouvernement d'unité nationale de Dbeibah.
Les combats ont éclaté lorsque des miliciens fidèles à Bachagha, soutenu par Khalifa Haftar, sont entrés à Tripoli pour tenter de renverser Dbeibah, mais ont été repoussés par les forces du gouvernement d’unité nationale. Au moins 150 personnes ont été blessées dans les affrontements.
«Le résultat renforce Dbeibah pour le moment, mais ne fait que souligner la nécessité d'un processus politique toujours absent», a indiqué Megerisi. Dbeibah, qui a été désigné avec l’appui de l’ONU en février 2021 comme Premier ministre, a déclaré qu'il ne quitterait pas le pouvoir avant la tenue d'élections.
Bachagha, quant à lui, a été intronisé en février 2022 comme Premier ministre libyen par la Chambre des représentants du pays basée à Tobrouk. Chacun a accusé l'autre d'agression et de corruption.
Karim Mezran, de l'Atlantic Council, a déclaré au quotidien britannique The Guardian que les milices belligérantes de la Libye étaient «des organisations criminelles totalement vouées au pouvoir et à l'argent, ainsi qu’à l'accaparement des ressources, à n’importe quel prix».
«C'est une erreur de les considérer comme des organisations idéologiques politiques, il faut au contraire les appréhender comme des organisations mafieuses qui ont tout intérêt à empêcher le développement d'un État qui fonctionne correctement.»
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com