Les concessions faites à l'Iran lors des négociations nucléaires ne font que rendre le régime plus audacieux

Un ingénieur travaillant à l'intérieur de l'usine iranienne d'enrichissement d'uranium de Natanz (Photo, AFP).
Un ingénieur travaillant à l'intérieur de l'usine iranienne d'enrichissement d'uranium de Natanz (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 29 août 2022

Les concessions faites à l'Iran lors des négociations nucléaires ne font que rendre le régime plus audacieux

Les concessions faites à l'Iran lors des négociations nucléaires ne font que rendre le régime plus audacieux
  • À chaque concession faite jusqu'à présent, le régime iranien est devenu plus intransigeant
  • Même si l'accord nucléaire échoue à nouveau, pour quelque raison que ce soit, le régime sera exempté des sanctions américaines pendant deux ans et demi

Faire des concessions à un État voyou ne fait que l’encourager à poursuivre ses politiques destructives. C'est ce qui s'est passé avec le régime iranien depuis sa création il y a quarante ans.

Malheureusement, l'administration du président américain, Joe Biden, ne semble pas avoir appris cette importante leçon d'Histoire. Depuis que M. Biden a pris ses fonctions, son administration a fait plusieurs concessions à la République islamique dans l'espoir que l'establishment théocratique modifie sa position et accepte de relancer le plan d'action global conjoint (PAGC) de 2015, également connu sous le nom d'«accord sur le nucléaire iranien». Donald Trump a retiré les États-Unis de cet accord en 2018.

Mais à chaque concession faite jusqu'à présent, le régime iranien est devenu plus intransigeant. À titre d’exemple, après que l'administration Biden a suspendu certaines des sanctions antiterroristes contre les Houthis au Yémen et révoqué la désignation du groupe comme organisation terroriste, le régime de Téhéran a répondu en augmentant ses livraisons illégales d'armes aux Houthis.

Il s'agit d'une nouvelle violation par l'Iran de la résolution 2 140 du Conseil de sécurité des nations unies: «Obligation de geler tous les fonds, autres avoirs financiers et ressources économiques qui sont la propriété ou sous le contrôle direct ou indirect des personnes ou entités désignées par le Comité, ou de personnes ou entités agissant en leur nom ou sur leurs instructions, ou d'entités qui sont leur propriété ou sont sous leur contrôle; aucun fonds, avoir financier ou ressource économique ne doit être mis à la disposition de ces personnes ou entités ou utilisé à leur profit.»

En outre, après la levée par l'administration Biden des sanctions imposées à trois anciens responsables iraniens et à plusieurs entreprises du secteur de l'énergie, la République islamique a augmenté ses ventes de pétrole à la Chine et exporté du pétrole en Syrie et au Hezbollah, en violation directe des sanctions américaines. Le régime a également pris d'autres otages et il a continué à activer ses cellules terroristes dans d'autres pays.

Par ailleurs, l'administration Biden semble fermer les yeux lorsque Téhéran réprime les manifestations dans son propre pays. Le régime a également choisi un meurtrier de masse présumé, Ebrahim Raïssi, en guise de président.

Des informations en provenance d'Iran, obtenues par le média Iran International, révèlent que l'administration Biden a fait encore plus de concessions pour tenter de relancer l'accord nucléaire. Selon le rapport, «les États-Unis garantissent que leurs sanctions contre le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) n'affecteront pas d'autres secteurs et entreprises: par exemple, une entreprise pétrochimique ne devrait pas être sanctionnée par les États-Unis parce qu'elle fait des affaires avec le CGRI.»

 

À chaque concession faite jusqu'à présent, le régime iranien est devenu plus intransigeant.

Dr Majid Rafizadeh

 

L'administration Biden semble crier victoire, car les dirigeants iraniens ont abandonné une demande essentielle qui impliquait le retrait du CGRI de la liste américaine des organisations terroristes étrangères. Mais si d'autres secteurs liés à cette organisation peuvent librement faire des affaires avec elle selon les termes de l'accord nucléaire, alors sa désignation comme organisation terroriste ainsi que les sanctions à son encontre sont insignifiantes.

Le CGRI détient des parts importantes dans presque tous les secteurs industriels iraniens, notamment le pétrole, les mines, les télécommunications, l'or, le transport maritime et la construction. La concurrence et le secteur privé ne sont pas autorisés, car plus l'économie est fermée, plus il est facile pour le CGRI de la monopoliser. Par conséquent, toute croissance financière dans ces secteurs profitera directement à l'armée iranienne, au CGRI et à sa branche d'élite, la Force Qods, ainsi qu'aux milices et groupes terroristes iraniens opérant dans tout le Moyen-Orient.

L'économie iranienne étant essentiellement contrôlée par le CGRI ou générée par l'État, les revenus supplémentaires seront probablement versés au trésor du CGRI et au bureau du Guide suprême.

Une autre concession majeure qui aurait été faite comprend une disposition selon laquelle seul un rapport de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) peut déclencher une clause de retour en arrière pour le rétablissement des sanctions. Cela signifie que les États-Unis ou l’UE3 (France, Royaume-Uni et Allemagne) ne peuvent pas demander unilatéralement le rétablissement des sanctions contre l'Iran, même s'ils estiment que Téhéran viole l'accord nucléaire. Il s'agirait d'un accord plus favorable pour le régime iranien que la version précédente, étant donné qu'en vertu de l'accord de 2015, tout État partie à l'accord pouvait rétablir unilatéralement les sanctions.

En outre, une question importante concernant le programme nucléaire iranien est liée aux activités nucléaires passées qui auraient eu des dimensions militaires. L'AIEA a ouvert une enquête sur cette question, mais le régime iranien a refusé de fournir des réponses aux questions concernant plusieurs sites nucléaires clandestins. Une autre concession faite à l'Iran serait que l'AIEA devrait interrompre son enquête sur ces activités nucléaires antérieures.

Pour aggraver les choses, même si l'accord nucléaire échoue à nouveau, pour quelque raison que ce soit, le régime sera exempté des sanctions américaines pendant deux ans et demi. En d'autres termes, même s'il s'avère que le régime viole l'accord et que les États-Unis s'en retirent, Téhéran peut apparemment continuer à bénéficier d'une exemption de sanctions pendant plusieurs années.

En conclusion, le régime iranien semble avoir obtenu de nombreuses concessions de la part de l'Occident. Cela ne fera que rendre l'establishment théocratique plus intransigeant et belliqueux, comme l'Histoire l'a prouvé.

 

* Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh


NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur arabnews.com