KHARTOUM: L'ex-président soudanais Omar el-Béchir, chassé du pouvoir l'an passé par une révolte populaire, a comparu mardi devant une cour spéciale à Khartoum où il doit répondre du coup d'Etat qui l'avait porté au pouvoir en 1989.
La première audience n'a duré qu'une heure car la salle n'a pu accueillir les 191 avocats de la défense. La cour spéciale formée de trois juges a fixé au 11 août la prochaine audience.
« La salle du tribunal n'est pas assez grande pour accueillir tous les avocats de la défense qui sont 191 », a déclaré le président de la cour spéciale, qui a décidé d'ajourner la séance au 11 août pour « permettre l'accueil de tous les avocats ».
L'ex-autocrate âgé de 76 ans et 27 autres accusés risquent la peine de mort pour avoir renversé le gouvernement démocratiquement élu du Premier ministre Sadek al-Mahdi il y a 31 ans. Parmi eux figurent des militaires et des civils, qui étaient regroupés dans des cages, ainsi que les anciens vice-présidents Ali Osman Taha et le général Bakri Hassan Saleh.
La majorité des détenus portaient l'habit blanc traditionnel et une coiffe de la même couleur.
« Cette cour va écouter chacun d'entre eux et nous allons donner à chacun des 28 accusés la possibilité de se défendre », a-t-il ajouté en début de séance.
Des mesures de sécurité exceptionnelles ont été par ailleurs prises pour éviter tout incident. Les familles des accusés, venues en nombre, ont crié à l'arrivé des fourgons cellulaires « Allah Akhbar ».
Omar el-Béchir, en pantalon et chemise beige, portait un masque et des gants et s'est caché le visage devant les photographes. Il n'a fait aucune déclaration.
Des parents des accusés ont aussi regretté de ne pas avoir été admis au sein du tribunal.
« Ils n’ont pas autorisé la majorité des familles d'assister au procès bien que nous ayons présenté nos requêtes il y a trois jours », a déclaré Mohammad Nafaa, le fils d'un ancien ministre de l'agriculture.
Un procès inédit
Il s’agit d’un procès inédit dans le monde arabe. Jamais l'auteur d'un putsch réussi n'y avait été jugé dans l'histoire récente.
Le Soudan s'est également engagé à livrer M. Béchir à la Cour pénale internationale (CPI) pour qu'il soit jugé pour crimes de guerre et génocide dans le cadre du conflit au Darfour en 2003-2004, qui a fait 300.000 morts et des millions de déplacés.
« Ce procès sera un avertissement à toute personne qui essaiera de détruire le système constitutionnel et sera jugée pour ce crime. Cela sauvegardera la démocratie soudanaise. Nous espérons ainsi clore l'ère des putschs au Soudan », a affirmé Moaz Hadra, un des avocats à l'origine de la procédure contre le dictateur déchu.
Pour Me Hachem al-Gali, qui défend les prévenus, « il s'agit d'un procès politique qui se cache derrière la loi. Ce procès va se dérouler dans un environnement hostile de la part du système judiciaire envers les accusés et nous pourrons le prouver », a-t-il dit.